Il n'y a rien à prouver de nouveau en affirmant que l'Occident, Etats-Unis en tête, apprécie différemment les scrutins des pays qui ne sont pas apprivoisés pas la circulation des capitaux, telle que définie dans les théories de la mondialisation et du libéralisme qui la soutient. Le cas de l'Iran vient d'illustrer l'attitude méprisante à l'égard de la réélection d'Ahmadinejad qui, pourtant, est un civil, dans un pays de plus de 70 millions d'habitants, dont la civilisation remonte à près de 5.000 ans dans l'Histoire et qui pratique l'agriculture depuis plus de 6.000 ans. Lorsque Obama affirme « je suis profondément troublé par les violences que j'ai vues à la télévision », Bernard Koutchner rouvre son cirque habituel en déclarant « nous sommes très respectueux de la manière dont les Iraniens se livrent à ces démonstrations qui tendent vers la démocratie » et donc vers l'Occident post-hitlérien en parlant des manifestations dans le quartier nord de Téhéran. Un tel engagement de la part de la France aurait été souhaitable lors du coup d'Etat en Mauritanie. Mais, la Mauritanie n'intéresse que les Mauritaniens en plus du fait que ce n'est ni une menace pour Israël, ni ne dispose du nucléaire. Pourtant, l'opposition a manifesté son désaccord avec la junte au pouvoir. Le monde associatif n'étant pas tout à fait clair, bien que certaines organisations se consacrent véritablement à l'humanitaire, une ONG américaine avait conclu au succès du président Iranien s'il engageait les réformes tant attendues. C'est dire que l'homme, issu d'une famille pauvre et ingénieur de formation, avait toute latitude pour fédérer les laissés-pour-compte et impulser à son pays une dynamique dont il n'est pas le seul décideur. Il faut souligner que l'âge minimum de l'électeur iranien est de 15 ans. Par ailleurs, le système politique repose sur un maillage d'institutions où la compétence et l'expertise sont mises en avant. C'est une « théocratie constitutionnelle » où le clergé détient un pouvoir de guide des activités d'un pays de plus d'un million et demi de km². Son produit intérieur brut par habitant s'élève à 8.400 dollars, de quoi faire rougir nos gouvernants qui pratiquent un autre type de théocratie sans experts. L'Iran est le 4ème producteur de pétrole au monde et le 2ème exportateur de l'OPEP. Il dispose aussi de la 2ème plus grande réserve en gaz naturel, après la Russie, et en est le 6e producteur. C'est ainsi que l'on comprend pourquoi les majorettes françaises en veulent à l'Iran et essaient de trouver une interprétation en leur faveur des événements bien que condamnables, qui ont suivi les élections présidentielles. On attend de l'Iran une révolution bleue ou orange ou encore dans un autre ton qui s'apparenterait des voeux de cet Occident qui refuse de changer de regard sur d'autres systèmes que celui qui vient de l'étouffer en une crise destructrice. La manipulation du spectre de la démocratie a déjà occasionné tant de dégâts à travers le monde, refusant aux sociétés dites sous-développées de se nourrir de leurs propres contradictions internes qui auraient pu les engager sur d'autres voies de développement plus harmonieuses et mieux adaptées au rythme de leurs évolutions. Si la mondialisation a ouvert des pistes d'échange humainement positives, elle a par contre piétiné les valeurs culturelles en se servant du libéralisme comme unique trajectoire. La « dictature libérale », en s'essoufflant, entraîne dans sa chute l'ensemble des peuples. Les chiffres ont tout tué. L'attitude des Iraniens quant aux deux questions qui permettent de les fragiliser est claire. Ils ne renonceront pas sous peine de guerre à l'enrichissement de l'uranium et Israël demeurera un ennemi contre la stabilité de toute une région, l'Iran, étant la cible la plus visée qui menace l'Etat hébreu. C'est ce qui explique cet acharnement où l'appartenance communautaire de Kouhner l'emporte sur la raison et plus particulièrement la Raison d'Etat. L'islamisme de l'Iran n'est qu'un prétexte de plus pour le décor car, on ne peut plus islamiste que l'Arabie Saoudite qui est considéré comme un pays ami avec lequel bien des affaires sont traitées. Et l'on se demande jusqu'à quand l'Occident continuera, profitera de sa superpuissance pour imposer aux sommets des Etats des hommes qui l'arrangent étant entendu que même lorsque la possibilité d'élections réellement libres peuvent se tenir dans une contrée lointaine, on tient à ce qu'elles soient conformes aux seuls intérêts économiques. C'est ce qui fait dire au président du groupe des sages africains, Ahmed Ben Bella, « la résurgence des crises et conflits consécutifs aux processus électoraux en Afrique nous interpelle et impose à notre groupe d'engager une profonde réflexion sur les voies et moyens pour y faire face ». Le problème c'est que cette réflexion ne devrait plus se limiter à la seule Afrique, car le modèle de renversement et d'encouragement aux guerres civiles ne concerne pas seulement notre continent. Ben Bella en sait quelque chose.