Les personnes incarcérées à tort peuvent enfin être indemnisées en guise de réparation pour le préjudice financier causé par l'erreur judiciaire. Le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a promulgué, le 21 avril dernier, un décret exécutif fixant les modalités de paiement des indemnisations prononcées par la commission d'indemnisation instituée auprès de la Cour suprême, en raison de la détention provisoire injustifiée et de l'erreur judiciaire. La Commission nationale d'indemnisation de la détention préventive abusive et de l'erreur judiciaire est une instance rattachée à la Cour suprême. «Ce paiement, précise ce décret qui vient d'être publié dans le Journal officiel, est effectué par le trésorier de chaque wilaya en sa qualité de comptable mandataire et devra faire l'objet d'une régularisation annuelle sur la base d'un ordonnancement émis par le ministre chargé des Finances, sur le budget de l'Etat». Il faut dire que la réforme de la justice a mis beaucoup de temps à accoucher d'un dispositif législatif permettant d'indemniser les victimes des erreurs judiciaires. Pour rappel, en juin 2001, dans le code de procédure pénale n° 08-01, amendé et adopté par le Parlement, le législateur a prévu des dispositions qui consacrent la réhabilitation et l'indemnisation des personnes injustement incarcérées. Mais il a fallu attendre six ans pour que la Cour suprême crée enfin en 2007 un tribunal spécial pour l'indemnisation des personnes ayant subi des préjudices durant une détention provisoire. Ce tribunal, composé de trois magistrats, a statué sur beaucoup de dossiers de personnes ayant subi des préjudices durant une détention provisoire. Mais les victimes des erreurs judiciaires n'ont, à ce jour, perçu aucune indemnisation, faute de textes d'application censés préciser les modes de paiement. De plus, les justiciables ignorent souvent les procédures juridiques à suivre pour engager une action en réparation dans des délais fixés par la loi. La loi a institué, en effet, un délai de péremption : une fois dépassé, les demandeurs se verront signifier une fin de non-recevoir aux requêtes qu'ils ont introduites pour obtenir réparation de la justice. Ainsi, à la faveur de ce nouveau texte législatif, les personnes détenues à tort pourront être indemnisées pour les erreurs judiciaires qu'ils ont subies. L'indemnisation porte sur trois champs, à savoir la faute de la justice, le préjudice matériel et la détention préventive. Le montant total de l'indemnisation est fixé après évaluation du préjudice par une expertise judiciaire. «En général, la jurisprudence s'adaptera au fur à mesure à des taux d'indemnisation qui seront déterminés en fonction de la gravité du préjudice subi», explique un juriste. Les relaxés qui ont bénéficié d'un non-lieu définitif seront ainsi soulagés après la réparation financière de leur préjudice.