Le Ramadhan est-il un mois de grande gabegie ou celui de l'abstinence ? Cette question chacun se la pose à chaque fois que le Grand mois des musulmans arrive. En fait, il n'est pas à vrai dire ni celui de l'abstinence, encore moins de la gabegie. En Algérie, comme dans certains pays voisins, se pose surtout la question de la disponibilité des fruits et légumes, des viandes et du poisson, et à des prix abordables. Le mois de carême étant un mois de forte consommation et de grand affairisme, il est également accompagné par une montée en puissance des prix des produits de large consommation. Dans le couffin, il y a cette année la viande ovine et bovine, quelque chose comme 10.000 tonnes qui vont débarquer prochainement en provenance d'Inde pour faire, dit-on, tomber les prix du Ghelmi de chez nous pendant le Ramadhan. Ben oui !, faut croire que les pouvoirs publics ont pris cette année le taureau par les cornes pour occire toute tentative de surenchère sur les prix des viandes. Déjà, on annonce la constitution de stocks importants de poulets qui seront mis en vente quelques jours avant le début du mois sacré au niveau de points de vente d'offices publics. Cette annonce, coïncidence (?), intervient au moment où les prix du poulet sont en train d'atteindre les 300 DA/kg. La tactique des pouvoirs publics pour mettre sur le marché des produits à des prix abordables est-elle en train de montrer ses limites ? Et puis, pourquoi importe-t-on du Ghelmi d'Inde, oui, du pays de Janitou, alors que juste à côté de chez nous, il existe des marchés potentiels ? «Moi, je ne mangerais jamais de cette viande qui vient d'Inde. Laisser notre Ghelmi pour celui d'Inde, c'est pas normal cette histoire», assure un chauffeur de taxi de Blida, renversé par cette manie d'aller chercher de la viande de très loin. Avant, la viande bovine importée par l'Algérie venait d'Argentine, du Brésil et de l'Uruguay, mais les prix étant assez élevés, la nouvelle tendance s'est rabattue sur le pays des Maharadjahs. C'est beau l'Inde, le pays des Rajpoutes, de la bombe atomique, des fusées qui placent des satellites algériens en orbite. C'est aussi Calcutta, le tigre du Bengale et le pays où la vache est sacrée. Mais, alors, d'où sortent les tonnes de viande bovine importée du pays de Nehru ? Les prix pratiqués y sont très bas. La vache est sacrée, en Inde, mais pas le pauvre mouton. Alors, lorsqu'un programme d'importation de viande ovine et bovine est lancé pour lutter contre la spéculation sur les prix des viandes rouges chez nous, des tas de questions se posent, comme ça, en un clin d'œil. Qui est-ce qui fixe les prix dans ce pays pour que, à l'approche du Ramadhan, on annonce l'arrivée de milliers de tonnes de viandes pour que les Algériens puissent acheter leur ration quotidienne de protéines sans être grugés ? Cette histoire n'est pas normale. L'Algérie, par la faute d'une gestion à 1000 années-lumière du bons sens, en est arrivée à des programmes d'importation sans ancrage sur la réalité économique du pays, des programmes en 2010 qui rappellent étrangement la période faste du PAP (programme anti-pénurie) des années 80. Quelle tristesse ! Jamais, depuis les années 80, les grands diffuseurs d'informations nationales n'ont annoncé l'arrivage d'autre chose que de la bouffe. Allons, soyons sérieux, avec ou sans viande indienne, les prix du Ghelmi seront les mêmes, cette année, comme celle d'avant et d'après. Le Ramadhan, c'est spécial, tout se régule durant les premiers jours, après tout rentre dans l'ordre des choses. Alors, pourquoi tout ce ramdam ?