La Suisse est en tête de ce classement établi par le Rapport sur la compétitivité mondiale 2010-2011, publié par le World Economic Forum, en prélude à sa « Réunion annuelle des nouveaux champions 2010 » qui se tiendra à Tianjin. Les Etats-Unis perdent deux places et reculent à la quatrième position, dépassés par la Suède (2) et Singapour (3), après avoir déjà cédé la première marche à la Suisse l'année dernière. L'Algérie vient en 86e position sur 139 pays. Pour le recul des Etats-Unis, il est expliqué par la situation budgétaire déficitaire, «une érosion de la confiance dans les institutions publiques et privées ainsi que les inquiétudes persistantes concernant l'état des marchés financiers». Les pays d'Europe du Nord continuent d'être bien placés dans le classement, avec la Suède (2e), la Finlande (7e) et le Danemark (9e) parmi les dix premiers et la Norvège à la quatorzième place. Le Royaume-Uni, après avoir chuté dans le tableau ces dernières années, gagne une place et prend la douzième position, avant la France (15e). Plusieurs pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord se situent dans la première moitié du tableau avec, dans l'ordre, le Qatar (17e), l'Arabie Saoudite (21e), Israël (24e), les Emirats Arabes Unis (25e), la Tunisie (32e), le Koweït (35e) et le Bahreïn (37e), la plupart des Etats du Golfe poursuivant leur progression. En Afrique subsaharienne, l'Afrique du Sud (54e) et l'île Maurice (55e) figurent également dans la première moitié du classement, suivies par la Namibie (74e), le Maroc (75e), le Botswana (76e) et le Rwanda (80e), lequel est couvert pour la première fois. La Tunisie vient en tête du continent et du Maghreb. L'Algérie, prisonnière des critères L'Algérie est classée cette année en 86e position, moins bien que l'année dernière (83e), mais mieux que l'année d'avant (99e). Elle n'est même pas au milieu du tableau sur les 139 pays classés, élaboré selon une vision économique libérale. La plupart des pays étaient représentés dans l'élaboration de ce «palmarès». Pour l'Algérie, il y avait l'économiste Youcef Benabdellah du Centre de recherche en économie appliquée pour le développement (CREAD) et Yassine Mohamed Ferfera, professeur et directeur du CREAD. Avec tout l'amour qu'ils ont pour leur pays, ils n'auraient pas pu faire gagner une seule place de mieux à l'Algérie dans ce classement. Tout ce qu'ils ont dû faire consistait à veiller à ce que l'application des critères de ce classement corresponde à la situation économique de l'Algérie. Plus précisément, ce rapport sur la compétitivité mondiale que le Forum de Davos a pris l'initiative de confectionner se fonde sur le classement établi par l'indice de compétitivité mondiale (Global Competitiveness Index, GCI), développé par le professeur Sala-i-Martin pour le World Economic Forum et introduit en 2004. Le «GCI» couvre 12 dimensions et brosse une image «détaillée» de la compétitivité de pays se trouvant à des stades de développement différents. Ces catégories sont les suivantes: institutions, infrastructure, environnement macroéconomique, santé et éducation de base, éducation supérieure et formation, efficacité du marché des biens, efficacité du marché du travail, développement du marché financier, développement technologique, taille du marché, sophistication des activités commerciales et innovation. L'indice de compétitivité mondiale est établi sur la base d'une combinaison de données statistiques et des résultats de sondages, notamment l'Enquête annuelle auprès des chefs d'entreprises, conduite par le World Economic Forum en collaboration avec son réseau d'instituts partenaires (instituts de recherche et organisations économiques de renom) situés dans les pays étudiés. Selon le Forum, cette année, plus de 13.500 chefs d'entreprise ont ainsi été sondés dans 139 pays. Le rapport propose un « profil détaillant la performance » de chacune des 139 économies couvertes par l'étude, ainsi que des tableaux statistiques pour les quelque 110 critères qui composent le « GCI ». Un hit-parade à relativiser L'économiste français Jean-Yves Naudet relativise la portée de ce hit-parade de la compétitivité version «GCI» de Davos. Il l'a exprimé lors de la publication du précédent rapport et son analyse demeure valable pour le présent rapport. Pour lui, les critères sont complexes et nombreux. Le professeur Naudet relativise leur pertinence. Si certains des 110 critères sont significatifs comme « par exemple celui du marché du travail : plus il est rigide, plus la compétitivité est faible, et plus il est souple, libre, rendant les travailleurs mobiles, plus la note est bonne». Ou encore «la qualité du système éducatif, primaire ou supérieur, est également un critère important et justifié, puisque l'investissement en capital humain est un élément essentiel de la compétitivité»; d'autres le sont moins, estime-t-il. Il relève, à ce propos, l'exemple du critère «qualité des soins», trop général car on ne sait pas s'il faut prendre en compte l'espérance de vie ou la protection sociale. Mais ce qui choque le plus l'économiste français, c'est le sondage des chefs d'entreprise. Ils ont été 13.500 à l'être pour le rapport 2010-2011. Pour le professeur Naudet, «on est là dans la subjectivité la plus totale, et par définition cela n'a aucun caractère scientifique». Il reste que la rencontre annuelle de Davos est un rendez-vous où l'on se bouscule au portillon. «Il faut à tout prix s'y montrer, au milieu des grands ce monde. Cela fait partie du jeu médiatique politiquement correct», commente Jean-Yves Naudet.