Tous ceux qui ont assisté à la prestation de Jean-Pierre Chevènement au CCF d'Oran, en début de soirée du dimanche, sont sortis avec une question pendante: à quelles motivations répond la communication de l'ex ministre de l'Intérieur et de la Défense français ? Dans quel agenda doit-elle être inscrite ? Vers la fin de son intervention, J.P. Chevènement a déclaré «je ne suis pas là pour m'immiscer dans la politique intérieure algérienne ni de faire de l'anti Sarkozysme». Intitulée «République, laïcité et Religions», la communication de l'actuel sénateur et maire de Belfort a abordé certaines questions intéressant l'Algérie et la France et ils sont légion depuis quelques années- par le biais des possibilités de la laïcité et de l'esprit de la République. D'ailleurs, il a été très clair à ce propos «faites confiance aux républicains français pour être les défenseurs du culte de l'Islam» et d'ajouter «la République, c'est l'élévation. Ce n'est pas un hasard que la plus importante institution républicaine soit l'école». Pour nombreux universitaires, hommes politiques et militants associatifs qui ont suivi l'intervention du président d'honneur du MRC (Mouvement Républicain et Citoyen) ; ce dernier est venu pour rassurer sur l'avenir des relations entre les deux pays. «A terme, je suis très confiant sur l'avenir des relations entre les deux peuples». A terme signifie-t-il l'après Sarkozy? Soulignons que J.P. Chevènement a déclaré le 8 septembre, dans une émission animée par Michel Field sur LCI, qu'il serait probablement candidat aux présidentielles de 2012. Où tout bonnement le sénateur du territoire de Belfort, fort du capital sympathie dont il jouit en Algérie, suite à sa démission du poste de ministre de la Défense, lors de la première guerre du Golfe, est investi d'une mission visant à apaiser le climat des relations entre son pays et son ancienne colonie? C'est entre autres le sentiment qu'a laissé sa communication chez certains de ceux qui l'ont suivie. Au-delà du factuel, l'Algérie et la France finiront par se retrouver et aplanir ce qui les sépare. Ceux qui soutiennent cette lecture de l'intervention de J.P. Chevènement se réfèrent à ses propos «l'avenir sera plus long que le passé» a-t-il soutenu. «Nous serons côte à côte» a-t-il ajouté. Ou encore «Nous avons remonté un lourd passif avec l'Allemagne». Passif historique marqué par les affres de la guerre s'entend. Pour atteindre une telle accalmie dans les relations entre les deux peuples et les deux pays, J.P. Chevènement invite les républicains et les laïcs des deux bords «à éviter les dérapages» qu'il fera l'économie d'énumérer. De même, il préconisera de ne pas sombrer dans «les replis communautaristes» et surtout «de ne pas emboîter le pas au fondamentalisme chrétien et celui des néoconservateurs américains». Pour lui, l'élection de Barack Obama aux USA est une sorte de correctif et de «résurgence» de l'esprit républicain, au niveau de cette grande nation. J.P. Chevènement qui se revendique de Jacques Berque, et le choix n'est pas fortuit puisque cet humaniste appartient aussi bien à l'Algérie où il est né et à la France, souhaite un dialogue entre les deux rives de la Méditerranée dépassant le cadre «de la simple coopération économique». La référence répétitive à Jacques Berque, présenté par l'orateur comme maître et ami, lui a permis la désertion volontaire des catégories politiques, surtout celles qui fâchent, genre «repentance» et «crimes de guerre». Il se contentera de dire à ce sujet «il faut que les séquelles du colonialisme soient effacées», comme il reconnaîtra qu'il y a eu «beaucoup de moments heureux entre la France et l'Algérie». Mais il est clair que pour J.P. Chevènement qui fait sienne l'assertion de Jacques Berque parlant «d'une idée pacifiée de la laïcité contre les intégrismes», ce sont les laïcs et les républicains qui sont en mesure de permettre à la France et à l'Algérie de se retrouver sur des bases sereines et pérennes. La laïcité dans son entendement signifie le respect de toutes les religions et non leur abolition. D'ailleurs, Chevènement revendiquera plus d'une fois la visibilité dont bénéficie actuellement le culte musulman en France. Il rappellera que c'est lui qui a entamé l'œuvre d'organisation du culte musulman en France en évoquant son instance représentative le CFCM (Conseil français du culte musulman). Dans ce cadre, il ajoutera qu'actuellement il existe plus de 1.800 lieux de cultes de l'Islam en France. «On ne pratique plus sa prière dans les sous-sols ou les garages» lance t-il. J.P. Chevènement a tenu à se présenter à son auditoire en tant qu'ami de l'Algérie. Il rappellera son histoire avec l'Algérie qui avait débuté à la fin des années cinquante. Il dira qu'il avait rencontré Houari Boumediene et Ahmed Ben Bella, le 10 juillet 1962, c'est-à-dire cinq jours après l'accession à l'indépendance. En venant en masse, les Oranais ont, de leur part, essayé d'exprimer leur sympathie à cet homme d'Etat. Probablement que le message a été reçu ..