Le projet de joint-venture pour le montage de véhicules Renault à Rouïba aura vécu l'espace d'un printemps. Des exigences, jugées rédhibitoires par Alger, du constructeur français ont fait capoter le projet. Renault, plus fortement engagé au Maroc, pourrait «compenser» dans le créneau des véhicules industriels. Sans convaincre. Janvier 2009. Des opérateurs privés algériens qui allaient se lancer dans des projets de montage automobile avec des Chinois sont stoppés par décision politique. M. Abdelhamid Temmar, à l'époque ministre de l'Industrie et de la Promotion de l'investissement, a invoqué un argument de «qualité». Les projets des privés algériens ont été conclus avec des constructeurs chinois de «second rang» et «ne respectent pas le cahier de charges» et les «normes en vigueur». Le message a été compris. L'Etat ne veut pas se contenter de montage et de sous-traitance, il veut aller vers la fabrication. La stratégie consiste donc à créer, pour la SNVI ou pour une entreprise nationale publique, un partenariat avec un constructeur mondial, européen ou asiatique, avec un taux d'intégration appréciable. Exit donc les Chinois. Commence alors un épisode Renault-Rouïba qui va être vite refermé. Le constructeur français avait, à la suite de fuites dans la presse, admis que des discussions étaient engagées avec les autorités algériennes pour un projet de joint venture avec SNVI, sur le site industriel de Rouïba, pour produire 50 000 véhicules an, des modèles low-coast, Renault Symbol et Dacia Sandero et Logan, semble avoir définitivement renoncé. C'est qu'entre janvier 2009 où l'Algérie empêchait les projets algéro-chinois de se mettre en place et le début 2010 où le projet «Renault» était médiatisé, le cadre global de l'investissement étranger a changé. Pour accepter de se lancer dans la joint-venture, le constructeur français a posé deux exigences jugées inacceptables par Alger. Le constructeur français aurait en effet exigé le rétablissement du crédit automobile pour assurer un marché à l'investissement et la conservation de l'exclusivité des ventes des véhicules produits à Rouïba. Le rétablissement du crédit automobile était inacceptable. Plus à l'aise à Tanger-Med Le gouvernement algérien qui avait pris le risque de la suspension du «crédit automobile» malgré son impopularité ne pouvait, aussi rapidement, se raviser. Renault, qui reste le premier vendeur en Algérie, a pratiquement tiré un trait sur le projet de Rouïba. Dans la foulée d'informations faisant état de l'abandon de «la piste algérienne, «tant qu'une négociation n'est pas conclue, il n'y a rien à dire», avait prévenu Pelata au mois de février dernier, Renault a annoncé officiellement au mois de juin dernier qu'il fabriquera à partir de 2012 dans la zone franche du terminal de Tanger-Med jusqu'à 400.000 Dacia destinées au marché européen, avec un nouveau design. Au Maroc, Renault est à l'aise : le coût de la main-d'œuvre représente à peine 20% de ceux de la France, des avantages fiscaux très attractifs comme les exonérations de TVA, ainsi que la proximité de la première usine du groupe, à Casablanca, qui fabrique également des Logan. Renault Trucks, l'illusion ? Mais, Renault n'abandonne pas tout à fait le marché algérien. Dans le créneau des véhicules industriels (camions, gros tracteurs de remorquages, véhicules de carrières et de forage ), Renault-Trucks veut garder intactes ses parts de marché face à de potentiels concurrents : Mercedes-Benz, Daewoo, MAN, Volvo. Au Salon international du véhicule industriel, qui se tient actuellement à la Safex d'Alger, Renault Trucks est bien présent, a côté des nouveaux arrivés, les constructeurs chinois. Selon son directeur «Algérie», des négociations sont en cours pour le montage en CKD des véhicules industriels de Renault Trucks. «Nous sommes déjà en discussions avec les responsables», a-t-il déclaré aux journalistes, ajoutant que «nous espérons arriver à un accord pour nous implanter, ici, en Algérie». Les discussions iront-elles jusqu'au bout ? Le groupe français, présent depuis 1958 avec l'ancienne usine Berliet de Hussein-Dey, reste prudent ? Le même responsable de Renault-Trucks Algérie avertit : «nous faisons des unités de montage là où il y a notre intérêt. C'est la règle du marché». Et, comme pour le réseau des véhicules de tourisme, Renault Trucks a des usines de montage au Maroc, en Tunisie, en Afrique du Sud, mais pas encore en Algérie, où il a déjà vendu 2.500 unités en 2010. Les chiffres de vente du groupe français sont tellement importants en Algérie qu'il compte ouvrir en 2011, selon le même responsable, onze points de vente, notamment à Hassi-Messaoud, Tindouf, Bechar et Biskra.