Belkhadem a beau minimiser l'ampleur de la dissidence qui s'exprime dans les rangs de son parti, les faits sur le terrain le contredisent. Le FLN est bel et bien secoué par une fronde qui rallie à elle des pans entiers de son appareil et de sa base. L'étrange dans l'affaire est justement que le secrétaire général de l'ex-parti unique se comporte de la sorte et s'enferre dans la passivité à l'égard de ses détracteurs. Il donne ainsi l'apparence d'être dépassé par les évènements, ou bien contraint par de puissantes injonctions à subir sans réagir. Cela alors que le mouvement de «redressement» qui le conteste prend l'allure d'une opération du type de celles qui ont emporté ses prédécesseurs, Mehri, Benhamouda et Benflis. Dans un premier temps, la contestation qui vise Belkhadem a semblé se réduire à un «coup de chaleur», comme en subit le FLN à chaque fois que pointe une échéance électorale. Donc le fait de caciques du parti ambitionnant d'obtenir à avoir à dire leur mot sur le choix des candidatures. Mais il est vite apparu qu'elle avait une autre teneur, à partir du moment où de «grosses pointures» en ont pris la direction. Des protagonistes qui n'ont pas pour habitude ce genre d'action. Qui peut croire en effet que El-Hadi Khaldi et Kara, pour ne citer que ceux-là, ont pris le train de la contestation contre Belkhadem uniquement pour «sauver le FLN des périls» où le plongerait la gestion de celui-ci ? Un long et passif compagnonnage les lient au personnage, qui exclut que l'on prenne pour argent comptant les arguments sur lesquels ils déclarent fonder leur fronde à son égard. Il reste que si les motivations qui ont servi à la réalisation du «coup d'Etat scientifique» contre Mehri, pour la déchéance de Boualem Benhamouda et au mouvement «de redressement» contre Benflis étaient visibles et découlaient d'enjeux politiques discernables, celles qui font agir les détracteurs de Belkhadem le sont moins. Ce qui est certain, c'est que si l'on veut pousser l'actuel secrétaire général au départ de son poste, ce n'est pas parce qu'il piétine le règlement du parti, mais parce que son maintien n'arrange pas les calculs politiques d'un cercle ou un autre du pouvoir. En apparence, c'est Bouteflika qui serait perdant au cas où le mouvement «de redressement» qui affecte le FLN parvient à ses fins. La proximité entre les deux personnalités est en effet tellement avérée que le départ forcé de Belkhadem du secrétariat général du FLN ne pourra être décrypté par l'opinion publique que comme nouvelle preuve de l'affaiblissement de l'autorité présidentielle, venant après celles données par les évictions de Zerhouni du ministère de l'Intérieur et de Chakib Khelil du ministère de l'Energie. Eux aussi marqués par leur proximité à Bouteflika. Néanmoins, il faut se garder de faire fond à l'apparence. Certains des chefs de file de la dissidence sont eux aussi réputés faire partie du cercle des inconditionnels de Bouteflika. Peuvent-ils par conséquent prêter la main à une opération censée viser à l'affaiblir ? Il le font parce que peut-être avisés que Belkhadem est devenu un problème gênant pour les desseins politiques du Président et chargés de le «régler». Il est vrai que l'actuel «patron» du FLN n'a pas bonne presse ni pour ses convictions affichées ni pour ses relations. Beaucoup de monde applaudirait à sa marginalisation politique. Ce que Bouteflika n'ignore pas et, en tacticien redoutable, n'hésitera pas à laisser réaliser si elle arrange son objectif qui est de préparer lui-même sa succession. La dissidence qui se développe au sein du FLN vue sous cet angle, la passivité de Belkhadem s'expliquerait.