Le ministère de la Justice rectifie le tir en décidant d'ouvrir un dialogue direct avec les greffiers. Une rencontre aura lieu aujourd'hui, au siège du ministère à Alger, entre des hauts responsables du département de Tayeb Belaïz et des représentants des greffiers issus de l'ensemble des cours du pays, au sujet des revendications émises par ce corps. En discutant, en tête-à-tête, avec la corporation, au lieu de passer par l'intermédiaire d'un syndicat en mal de représentativité ou en utilisant ses parquets généraux comme interface, le ministère de la Justice s'est mis enfin sur la bonne voie, la seule pour espérer désamorcer cette crise dans les meilleurs délais. Toutes les tentatives précédentes de la «Chancellerie», à coups de fax très laconiques diffusés via son circuit administratif hiérarchisé et de communiqués trop rassurants signés SNGA, ont fait long feu. Hier, à travers les 36 cours du pays, le personnel de greffe procédait à la désignation, par voie de vote, de ses représentants qui prendront part, aujourd'hui, à la réunion de dialogue, sur initiative de la tutelle. Dans chaque palais de Justice, les fonctionnaires du greffe ont recouru hier, aux urnes pour mandater un délégué qui aura à transmettre leurs doléances à l'administration centrale. Avant de se mettre à la table des négociations, un briefing devra, en principe, avoir lieu entre les représentants des greffiers pour accorder leurs violons, dans le but de dégager une plateforme de revendications commune. Tous les regards seront donc braqués aujourd'hui, sur cette réunion, qualifiée, d'ores et déjà, de virage décisif quant à l'évolution de cette situation délicate et qui prend, au fil des jours, l'allure d'un bras de fer entre la tutelle et la corporation de greffe. Entre autres signes révélateurs du pourrissement, avec le temps, de la situation: les grévistes durcissent leurs actions de protestation, sans pour autant sortir du pacifisme, sous de nouvelles formes tels les rassemblements de masse devant les sièges de cour (jusque-là, le personnel de chaque tribunal restait cloitré dans l'enceinte de son établissement), en criant à tue-tête et en scandant des banderoles, mais surtout l'inobservation du service minimum ou d'une permanance dans certains tribunaux. Effectivement, par effet de lassitude et de démoralisation peut-être, les greffiers, jusque-là très disciplinés et professionnels, ont tendance, faute de voir venir une réponse concrète et sérieuse à leurs aspirations légitimes, à boycotter des tâches qu'ils assuraient auparavant, tout en étant en grève, comme les audiences concernant des détenus, la présentation des mis en cause devant le parquet, le service d'exécution des peines, les audiences de la chambre d'accusation, la délivrance de permis de communiquer pour les familles des détenus, etc. Et ce n'est guère la décision, pour le moins irréfléchie, de certains responsables de tribunaux, de remplacer des greffiers d'audience par des huissiers de justice, à qui ils font porter la robe noire le temps d'un procès, qui est pour arranger les choses. A Saida, les greffiers de la Cour et ceux du tribunal du chef-lieu observent aussi la grève. Toutefois, le service minimum sera levé d'ici demain si la tutelle persiste dans son mutisme, indique les greffiers, auxquels se sont ajoutés les agents administratifs et de service.