Ce qui devait arriver a eu lieu dans la matinée d'hier. La jonction entre les étudiants des différentes filières toujours en grève s'est réalisée. Les étudiants en architecture et ceux de l'Institut de maintenance et sécurité industrielle se sont retrouvés dans un même sit-in sur l'entrée principale de la wilaya d'Oran. Apparemment, cette jonction n'a pas été discutée préalablement. Pour preuve, les étudiants d'architecture, qui sont à leur troisième sortie dans la rue, se sont regroupés sur une placette devant le siège de l'ENTV. Au même moment, leurs camarades de l'Institut de la maintenance ont pris place sur les escaliers de l'entrée du siège de la wilaya. Les premiers viennent de l'USTO et les seconds de l'IAP, donc relevant de l'université d'Es-Sénia. Mais les forces de police, et pour la troisième fois encore, sont intervenues de manière musclée. Ils ont embarqué une trentaine d'étudiants. Toutes ces formes d'intimidation n'ont pas réussi à persuader les étudiants en architecture de se disperser. Au contraire, c'est en groupe et en scandant leurs slogans qu'ils ont parcouru une partie du boulevard Ahmed Ben Abderrezak pour le sit-in devant la wilaya. Ceux qui ont suivi les sorties des étudiants de cette filière ont relevé qu'hier leur nombre a presque triplé par rapport à leurs précédentes démonstrations. Par contre, les étudiants de l'Institut de maintenance n'ont pas subi le même traitement par la police que leurs camarades architectes. On ignore comment ils sont parvenus jusqu'à la wilaya. Est-ce par petits groupes ou ensemble ? Sur place, ils ont étalé une banderole où ils récusent le bricolage des autorités publiques. Ils ont scandé quelques passages de «Kassaman», l'hymne national. Il faut dire qu'au niveau des slogans, les architectes se sont montrés plus virulents. Hier, ils ont clamé «imazighen» en joignant le cri à un geste des mains. Ce que personne n'arrive à expliquer. Sans se fondre l'un dans l'autre, les deux groupes ont tenu leur sit-in jusqu'en milieu de l'après-midi. Vers la fin de la matinée, on a parlé d'une délégation d'étudiants qui devait être reçue par le wali. Mais on nous confirmera par la suite qu'aucun responsable ne les a reçus. Sur une banderole confectionnée sur un support en toile de plastique, on pouvait lire «Diplôme supérieur, statut inférieur». Ce qui résume les revendications de ces étudiants. Que ce soit les architectes ou les ingénieurs en maintenance, graduellement, ils sont en train de grignoter du terrain pour s'imposer au cœur de la cité. La semaine dernière, la protestation des architectes n'a pas débordé le quartier de l'USTO, prolongement spatial immédiat de leur campus. Les voilà en plein centre-ville, devant une institution représentant le pouvoir central. Pour leur part, les ingénieurs ont fait preuve de beaucoup de patience en acceptant de circonscrire leur mouvement de protestation au niveau de l'enceinte de l'IAP. Mais désormais, c'est sur l'espace public que se déversera leur colère. Et il n'est pas exclu que les étudiants de pharmacie, eux aussi en grève depuis deux mois, décident de s'associer aux architectes et ingénieurs en maintenance pour grossir davantage les rangs des contestataires. D'ailleurs, hier, ils devaient tenir une AG pour examiner entre autres cette éventualité. Hier, tous les automobilistes passant devant la wilaya ont marqué un arrêt, malgré les sifflets des agents de l'ordre, pour s'enquérir sur ce qui se passait. De ce point de vue, les étudiants mécontents du décret présidentiel ont marqué un point: ils ont réussi à conférer de la visibilité à leur protestation. Vers 14h 30 mn, un autre délégué désigné par ses camarades devait être reçu par les responsables de la wilaya. Au bout d'une demi-heure, il est revenu pour les informer que la wilaya leur a refusé l'autorisation d'organiser une marche. Les étudiants ont décidé de se disperser et de se revoir dans leur campus pour décider des suites à donner à leur mouvement, appelé à se prolonger dans le temps.