Devant la montée de l'extrême droite en Europe, les organisations juives et musulmanes d'Europe montent au front et s'impliquent, ouvertement, en politique. A l'occasion de la «Journée de l'Europe» célébrée le 8 mai, une initiative inter-religieuse regroupant les musulmans et juifs d'Europe (et aux USA) pour contrer l'islamophobie, l'antisémitisme et le racisme a été lancée simultanément dans plusieurs pays d'Europe. Elle a démarré hier à Paris, se poursuivra à Londres, Berlin, Vienne, Bruxelles, Amsterdam, Rome, etc. pour se clôturer le 30 mai à Bruxelles, devant le siège des Institutions de l'UE. Une déclaration commune sera remise au président de la Commission européenne, Manuel Barroso. Dans l'avant-projet de déclaration, les Conseils représentatifs des juifs et musulmans d'Europe déclarent leur «volonté d'œuvrer ensemble pour contrer les efforts visant à diaboliser et à marginaliser l'une ou l'autre communauté. Le sectarisme envers un juif ou un musulman est une attaque contre tous les musulmans et tous les juifs. Nous sommes unis dans notre croyance en la dignité de toutes les personnes.» Les sponsors de cette initiative inter-religieuse sont «l'Amitié judéo-musulmane de France», «l'Organisation Children of Abraham» de Londres avec le parrainage et le soutien de la «Fondation américaine for Ethnic Understanding» ainsi que le «Congrès juif mondial» et le «Congrès mondial musulman». L'objectif de cette campagne est, selon ses initiateurs, de faire barrage à la montée dans les opinions publiques européennes des partis politiques d'extrême droite, notamment le Front national en France. Ils interpellent les dirigeants européens sur leur permissivité et leur «flirt» avec les idées racistes d'extrême droite, constaté depuis l'apparition de la crise économique et sociale en Occident. Ils s'élèvent avec force contre le discours de certains dirigeants européens, tels le Premier ministre britannique et la Chancelière allemande, Angela Merkel, qui ont évoqué la faillite du multiculturalisme dans leurs pays. «Nous sommes conscients que les questions de l'identité, de l'intégration, du multiculturalisme et de l'immigration sont complexes et doivent être traitées de façon appropriée, en consultation avec les communautés minoritaires en Europe. Toutefois, il ne doit y avoir aucune tolérance pour la diabolisation d'une communauté dans son ensemble», estiment les initiateurs de cette campagne. Ainsi, face à l'utilisation par les pouvoirs politiques de la religion, les organisations religieuses n'hésitent plus à répondre et à s'impliquer, ouvertement, dans le champ politique. Une anomalie politique et philosophique dans les démocraties occidentales. Comment en est-on arrivé à cette «collusion» entre religion et politique ? Qui veut manipuler qui ? Dans ce cas précis il est clair que les responsables religieux juifs et musulmans réagissent aux attaques régulières des extrémistes politiques de tous bords qui expliquent les effets de la crise sociale et économique en Occident par la présence des «autres», les étrangers. Par ailleurs et cela n'a échappé à personne, cette initiative intervient au moment où le monde arabo-musulman vit des bouleversements politiques décisifs pour son avenir, ainsi que la décision des Palestiniens à la réconciliation et la proclamation de leur indépendance et un Etat souverain, en septembre prochain. Rappelons que l'Amitié judéo-musulmane de France, qui a donné le top départ de cette campagne, est parrainée par le Crif, le Consistoire et la Grande Mosquée de Paris.