Pour Dominique Strauss-Kahn, accusé de crimes sexuels, l'avenir est dorénavant suspendu au 6 juin prochain, correspondant à la date de sa comparution devant le juge, qui décidera s'il y aura procès ou non, selon que l'ex-patron du FMI plaidera coupable ou non coupable. Mis en prison dimanche dernier à Rikers Island, près de New-York, après avoir agressé, selon l'accusation, une femme de chambre dans l'hôtel où il résidait, «DSK» voit ainsi son avenir politique passablement assombri, après avoir vu celui de son passage au FMI écourté. Et, vendredi, le Fonds monétaire international a annoncé qu'il ouvrirait, lundi et jusqu'au 10 juin, les candidatures au poste de directeur général, et qu'il se fixait pour «objectif» de désigner son numéro un «d'ici au 30 juin». L'institution de Washington a indiqué que son conseil d'administration, réuni dans la journée, avait décidé d'une «période de candidatures qui commencera le 23 mai 2011 et sera close le 10 juin 2011». «L'objectif du conseil d'administration est de sélectionner le directeur général par consensus avec l'objectif d'achever le processus de sélection d'ici au 30 juin 2011", a annoncé le Fonds. L'autre objectif est que ce choix «se fasse d'une manière ouverte, fondée sur le mérite, et transparente», ajoute le FMI dans son communiqué. En fait, la succession de «DSK» est déjà au centre d'une bataille feutrée entre les pays européens et émergents. Les pays européens, notamment ceux membres du G8, les pays les plus industrialisés de la planète, étant confiants pour prendre le poste qui leur est revenu depuis la création des institutions de Bretton Woods, les Américains se réservant celui de la Banque mondiale. Cette fois-ci encore, l'Europe s'est déjà exprimée pour la succession de «DSK», mais sans pour autant désigner nommément son candidat, même si la ministre française de l'Economie, Christine Lagarde, recueille le plus de suffrages pour succéder à son compatriote. Cette fois-ci, le poste est convoité par d'autres pays autres qu'européens, même si depuis la création du poste en 1946, les Européens l'ont toujours obtenu avec l'assentiment des Etats-Unis. Selon une source européenne, l'Union européenne était près de se mettre d'accord sur le nom de la ministre française de l'Economie, Christine Lagarde. A l'inverse, les grands pays émergents qui pourraient prétendre à un rôle plus important au FMI, n'affichaient aucune entente entre eux. Pour Daniel Bradlow, professeur de droit à Washington, spécialiste des institutions internationales et du FMI, l'axe transatlantique reste de toutes les manières, prépondérant. «Vote ne signifie pas nécessairement démocratie. Même en imaginant un vote à bulletin secret, les administrateurs ne voudront pas forcément aller contre un Européen donné comme favori, ni être parmi ceux qui n'annoncent pas publiquement qu'ils ont voté pour le nouveau directeur général», explique-t-il. Une candidature commune des BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) plus l'Afrique du Sud n'est plus possible, chacun d'entre eux ayant déjà un candidat à proposer. Et, si les spéculations redoublent pour désigner le futur patron d u FMI, la chancelière allemande Angela Merkel a apporté son soutien du bout des lèvres à Christine Lagarde, en disant avoir pour elle «une estime particulière». Quant aux Américains, ils ont indiqué qu'ils étaient «prêts à soutenir» comme candidat une personne capable de susciter une «large» adhésion parmi les membres de l'institution. Bref, la bataille risque d'être épique pour la succession de «DSK» à la tête du Fonds. «DSK» sort de prison, mais reste surveillé Celui-ci est, par ailleurs, sorti vendredi de prison, et loge dans un appartement de Manhattan, mais étroitement surveillé et portant des bracelets électroniques. Dominique Strauss-Kahn est sorti de prison après qu'un juge new-yorkais eut approuvé tous les documents fixant les conditions qui accompagnent sa libération conditionnelle. Il restera «quelques jours», selon le juge Michael Obus de la Cour suprême de New York, dans cette résidence près de Ground Zero, appartenant, selon la presse locale, à la compagnie Stroz Friedberg chargée d'assurer sa mise en résidence surveillée. Il ne pourra sortir de cette résidence temporaire, à moins d'un cas de force majeure. Il quittera ensuite cet appartement pour un autre permanent duquel il pourra sortir pour des raisons spécifiques - audiences, rendez-vous d'avocats, visites chez le médecin ou à la synagogue - s'il en fait la demande au moins six heures à l'avance, a indiqué la justice new-yorkaise. Et il ne pourra pas sortir entre 22H00 et 06H00. Le juge Michael Obus avait signé vendredi après-midi l'ordonnance de libération de Dominique Strauss-Kahn, écroué depuis lundi à la prison de Rikers Island, après que ses avocats et son garant judiciaire eurent remis la caution d'un million de dollars, ainsi qu'un dépôt de garantie de cinq millions de dollars. L'ancien patron du FMI est accusé d'agression sexuelle et de tentative de viol, le 14 mai, contre une femme de ménage guinéenne de 32 ans, de l'hôtel Sofitel de Manhattan. La justice avait autorisé jeudi sa libération si un ensemble de conditions étaient respectées. Outre la caution et le dépôt de garantie, ce dernier devait prouver qu'il allait vivre dans une résidence de Manhattan sous surveillance 24h sur 24. La prochaine convocation de M. Strauss-Kahn devant la justice a été fixée au 6 juin. Lors de cette audition, il devra plaider coupable ou non coupable des sept chefs d'accusation pesant contre lui. S'il plaide coupable, il n'y aura pas de procès mais une condamnation à plusieurs années de prison, dont le nombre sera négocié avec le juge. S'il plaide non coupable, comme ses avocats l'ont suggéré, un procès aura lieu. Et il sera très long. Quant à son avenir en France, «sur le plan politique, ce sera à Dominique Strauss-Kahn et à lui seul» de dire «s'il peut ou ne peut plus être candidat à la primaire du PS», a déclaré François Hollande, lui-même candidat aux primaires, démentant les commentaires des socialistes, qui ont déjà rayé la candidature «DSK».