Pour avoir menacé son peuple entré en révolte contre lui et son régime de répression sanglante, Muammar El-Kadhafi s'est mis à dos la communauté internationale et a suscité le vote par le Conseil de sécurité de la résolution 1973, qui a autorisé une intervention militaire en vue de protéger la population libyenne des exactions promises par son « guide ». En Syrie, la répression menée par les bras armés du régime de Bachar El-Assad contre les contestataires a atteint un seuil de violence et de barbarie inqualifiable. Ce que Kadhafi a promis à son peuple, Bachar El-Assad l'exercice à huis clos contre le sien. Sans pour autant que les Nations unies s'empressent, comme ce fut le cas pour la Libye, de prendre des mesures afin de protéger le peuple syrien de la criminelle répression qui s'abat sur lui. Y aurait-il pour ces Nations unies une gradation de l'horreur des répressions justifiant, selon le cas, qu'elles fassent preuve d'extrême fermeté dans leurs réactions ou au contraire qu'elles se contentent de s'indigner et d'appeler à la retenue ? Il semble que pour ces Nations unies, ce qui se passe en Syrie n'entre pas encore dans le genre de situation leur imposant d'agir dans la première forme. Tout ce que le président syrien et son régime se sont attirés après des semaines d'impitoyable répression exercée par eux contre leur population, ce sont de platoniques condamnations et des mesures de rétorsion limitées et totalement inaptes à les dissuader de cesser les massacres qu'ils provoquent. Bien sûr que la communauté internationale est horrifiée par le bain de sang dont la Syrie est le théâtre, qu'elle le réprouve. Mais si elle ne traduit pas en actes fermes sa réprobation, c'est parce que la majorité de ses membres a tiré enseignement de la calamiteuse gestion faite par des puissances occidentales en Libye du concept de la responsabilité de protéger les populations contre leurs dictateurs. A part ces puissances, les autres Etats ne veulent plus cautionner d'opération similaire à celle engagée contre Kadhafi et son régime sous couvert des Nations unies et qui s'est transformée en opération occidentale sous l'égide du triangle franco-anglo-américain visant à atteindre des objectifs non assignés par la résolution 1973 du Conseil de sécurité. Pour un temps encore, Bachar El-Assad peut continuer à réprimer avec toute la force de ses appareils militaires et policiers, sans craindre de la part des Nations unies qu'elles lui appliquent le même traitement que celui auquel a eu droit son homologue libyen. Même le triangle franco-anglo-américain se fait moins offensif contre le régime syrien qu'il ne l'est contre celui de Kadhafi. Bien que le trio sache que la confrontation entre le régime de Damas et son peuple a dépassé le point de non-retour et qu'il n'est plus possible qu'une solution négociée entre eux soit envisageable. Aucun d'entre sa composante n'a ouvertement et fermement appelé au départ du dictateur syrien et au démantèlement de son régime. A croire que malgré sa posture de rejet et de condamnation du comportement du régime syrien, le trio a convenu d'accorder à celui-ci le temps d'en finir avec la révolte de son peuple. Le statu quo en Syrie, favorable à la dictature, est de toute évidence une situation qui arrange les intérêts géostratégiques des puissances occidentales et de leur allié principal dans la région, Israël.