Les Egyptiens ont peut-être vu pour la dernière fois, hier, Hosni Moubarak arriver en civière à la deuxième audience de son procès. Comme pour signifier la fin du spectacle et dans la foulée d'une décision d'ajourner le procès au 5 septembre, le président du tribunal, Ahmed Refaat, a annoncé que le procès ne sera plus retransmis en direct à la télévision. Le juge a décidé également que Moubarak et son ex-ministre de l'Intérieur, Habib el-Adli, seraient jugés lors d'un seul et même procès, accédant ainsi à une principale demande des avocats des familles des victimes. L'annonce a été accueillie avec satisfaction par les avocats des victimes de la répression sanglante durant la contestation populaire en janvier-février 2011. Seul dirigeant arabe à être jugé depuis le début des contestations politiques dans le monde arabe, Moubarak, ramené par hélicoptère, a été ramené en civière et placé dans le box des accusés alors que ses deux fils tentaient de le masquer aux caméras. L'ex-Raïs est accusé d'avoir donné l'ordre de tirer à balles réelles sur les manifestants descendus à partir du 25 janvier dans la rue pour réclamer son départ faisant près de 850 morts. Il est également poursuivi pour corruption et d'avoir permis la vente de gaz égyptien à Israël à des prix inférieurs à ceux du marché. Gamal et Alaa Moubarak sont accusés de corruption, tout comme l'homme d'affaires Hussein Salem, un proche des Moubarak jugé par contumace. L'ajournement n'est pas une surprise, les avocats ayant besoin de temps pour examiner les pièces du dossier. Par contre, la décision d'arrêter la diffusion en direct du procès était inattendue. Le juge Refaat a justifié la fin de la diffusion télévisée des audiences par le souci de «préserver l'intérêt général». La décision de diffuser le procès en direct avait été prise afin de rassurer les Egyptiens que justice sera faite. L'invocation de «l'intérêt général» risque en tout cas de laisser les opposants égyptiens dubitatifs. D'autant que le président du tribunal ne s'est toujours pas prononcé sur la demande formulée par les avocats de citer comme témoin le maréchal Mohamed Hussein Tantaoui, le chef du Conseil suprême des forces armées (CSFA) qui dirige le pays. En attendant le maréchal Tantaoui Certains constatent que les partisans de Moubarak ont pu manifester en sa faveur dans les abords du palais de justice et se sont attaqués à une équipe d'Al Jazira. Des affrontements ont eu lieu entre les partisans de Moubarak et les familles des manifestants tués lors de la révolte devant le siège de l'académie de police où se tient le procès. Une trentaine de personnes ont été blessées au cours de ces affrontements. La fin de la diffusion en direct pourrait être marquée par le souci de préserver le maréchal Tantaoui dans le cas où il serait appelé à témoigner. La situation illustre parfaitement le fait que le procès ne concerne que le clan Moubarak au sens restreint et ne touche pas le régime. Le maréchal Tantaoui a été le ministre de la Défense de Moubarak pendant deux décennies. Certains avocats d'ailleurs considèrent le maréchal Tantaoui comme un témoin à décharge. «Les avocats de la défense considèrent Tantaoui comme un témoin à décharge, qui disculpera Moubarak. Les avocats des plaignants, eux, attendent de lui qu'il dise avoir reçu l'ordre de tirer, ce qui est nécessaire pour condamner Moubarak», déclare un avocat. Il reste encore au juge Refaat à trancher sur la convocation du maréchal. Il a déjà choisi de ne pas trop l'exposer en mettant fin à la diffusion en direct du procès. Et en satisfaisant du même coup, les partisans de Moubarak qui considéraient cette diffusion humiliante.