Le projet de loi modifiant et complétant la loi 91-04, portant organisation de la profession d'avocat, divise les robes noires. Les 15 bâtonnats qui composent l'Union nationale des barreaux d'Algérie (UNBA), qui se sont réunis en assemblée générale ordinaire, ce week-end à l'université de Bejaia, ont exprimé des avis très divergents sur ce texte de loi. D'un côté, il y a les opposants qui ont réitéré leur revendication liée au retrait de ce texte en brandissant de recourir à des marches et des grèves cycliques. Ces derniers émettent des réserves concernant une vingtaine d'articles jugés «restrictifs des droits de la défense.» De l'autre, les partisans de ce projet de statut qui mettent en exergue «plusieurs avancées». Ces derniers soulignent «des points positifs ayant trait notamment à l'amélioration de la formation avec l'institution d'une école dédiée à la formation d'avocats». Les opposants à ce projet de loi jugent ce dernier comme étant «en totale contradiction avec les principes des droits de la défense». Position portée notamment par des figures comme le bâtonnier d'Alger, Me Abdelmadjid Selini ou encore Me Bourayou. Mais leur position est aux antipodes de celle défendue par le président de l'Union des barreaux d'Algérie (UNBA), Me Lenouar Mustapha qui souligne que «les 15 barreaux ont bel et bien participé à l'élaboration de ce projet». «Le texte peut être corrigé. Le ministère nous a promis de le faire», explique Me Lenouar. Les avocats d'Alger ont observé, en juin dernier, une journée de protestation afin d'exiger le retrait du projet de statut de la profession d'avocat. Ce projet de statut est «liberticide, scélérat et en total retrait sur les droits de la défense», affirme Me Sellini. Selon lui, «le texte met l'avocat sous la coupe du parquet». «L'Etat de droit est menacé dans ses fondements», ajoute-t-il. Pour lui, «le ministre n'a pas respecté ses engagements de tenir compte des propositions des avocats». «Nous ne comprenons pas que l'on puisse, d'un côté, engager des réformes, et de l'autre, ne pas attendre les résultats de ces démarches afin de faire passer un texte de loi qui comprend des articles et des dispositions aussi dépassés et révolus», critique Me Bourayou. Un avocat dénonce ce qu'il considère être comme «une ingérence du ministre de la Justice dans les prérogatives de la profession qui reposent essentiellement sur la liberté et l'indépendance». Ce dernier estime que l'avocat «garantit à tous les citoyens le droit d'accès à un procès équitable consacré par le droit constitutionnel», et «sa présence aux côtés des autres parties aux procès renforce la confiance dans les institutions de la justice et améliore la qualité de leurs décisions. De ce fait, toute atteinte à la profession d'avocat touche inévitablement le droit du citoyen à l'accès à la justice». Le texte est rédigé par la commission juridique de l'APN qui a écouté les 15 bâtonniers. Le texte est élaboré pour une durée de 10 ans par une commission composée d'avocats, notamment des bâtonniers et des magistrats, et dirigée par un président de chambre au niveau de la Cour suprême qui y a travaillé pendant 4 ans. Le projet de loi a été déposé, en juin dernier, sur le bureau de l'APN. Il devra être présenté au vote des parlementaires des deux chambres. «La commission est certes composée de bâtonniers et de magistrats, mais durant les quatre années qu'a duré son élaboration, les moutures ont été retouchées à l'insu des avocats pour sortir avec le projet présenté à l'APN et dont les dispositions sont liberticides», rétorque de son côté un avocat. Le projet de loi de la profession d'avocat n'est pas le seul point évoqué à Bejaia. D'autres entraves à l'exercice de la profession, comme certaines dispositions du code de procédure civile, sont relevées. Une série de recommandations est aussi arrêtée visant à l'amélioration des conditions d'exercice de la profession d'avocat.