Le ministre français de l'Intérieur multiplie les déclarations hostiles à l'égard de l'immigration et des étrangers, dans des annonces «effets de manche» à même d'attiser la haine raciale et le sentiment sans cesse envahissant d'une xénophobie rampante. Dernière en date, sa lutte contre «la délinquance étrangère» en mettant en place tout un système répressif, privatif de liberté individuelle. Claude Guéant veut mettre en place des «mesures spécifiques» telles que la privation de titre de séjour pour un étranger qui se rendrait coupable d'un délit grave, lorsqu'il vit en France «depuis peu de temps» et qu'il n'y a «pas d'attache familiale». Voilà pour l'explication du texte. Mais les observateurs et les adversaires politiques de Sarkozy y voient une manipulation médiatique, doublée d'une réelle campagne préélectorale, en vue de la présidentielle de 2012. Stigmatisé pour une politique intérieure «défaillante», au plus bas dans les sondages et donné archi battu par le candidat socialiste, le président français ne voit de salut, et de second mandat, que dans le carré de l'extrême droite pour y chasser des électeurs sensibles à son discours protectionniste. Et qui mieux pour sonner le tocsin que son fidèle Guéant, ô combien aguerri à ce genre d'exercice. Sa proposition a déjà eu les faveurs de la droite populaire qui s'est félicitée d'une telle initiative alors que les socialistes, campagne présidentielle oblige, sont montés aux remparts pour dénoncer une énième dérive «sécuritaire» de l'UMP. Najat Vallaud Belkacem, une des porte-parole de François Hollande, dénonçait « l'esbroufe permanente » du ministre de l'Intérieur et « la stratégie électoraliste d'une droite prête à tout pour garder le pouvoir ». Malgré le retard d'une journée, la réaction du PS et plus particulièrement le choix de la préposée à l'indignation a de quoi faire sourire jaune. Pourtant, cette sortie synchronisée du locataire de la place Beauveau est cousue de fil blanc puisqu'elle s'inscrit, fatalement et ouvertement, dans une logique d'un programme électoral dont la seule finalité est d'engranger le maximum de voix possibles puisées dans le vivier lepéniste. Ainsi, montrer du doigt l'étranger, l'islam, les immigrés et leurs enfants fait partie de cette stratégie d'attaque-défense en montant en épingle la peur et la délinquance chez ces catégories de personnes. Et au-delà des états-majors politiques, cette nouvelle loi contre la délinquance étrangère, Christophe Régnard, président de l'Union syndicale des magistrats (USM), rappelle qu'elle existe déjà, mais sous d'autres formes. Il conseille à Claude Guéant de relire l'article 131-30 du code pénal. «Un article qu'il doit bien connaître puisque, lorsqu'il a été réformé par deux fois en 2003 et 2006, il était au cabinet de Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur». Un tel désaveu venu d'un professionnel de la justice prouve, encore une fois, que la politique menée par la droite française n'obéit qu'à une seule formule, limiter sinon en finir avec l'immigration légale fut-elle ou illégale. «C'est plus facile de s'intégrer si on est un peu moins nombreux que si on est plus nombreux, c'est tout simple», avait déclaré Claude Guéant au micro de RTL tout en se défendant d'une quelconque proximité idéologique du Front national. Coutumier du fait, il a derrière lui quelques sorties chocs comme celle du 28 novembre où il expliquait que la France accueillait chaque année 200.000 étrangers et que c'était «trop» ou celle du 25 mai, lorsqu'il réaffirmait que les deux tiers des personnes sortant de l'école sans qualification seraient des enfants d'immigrés. Le 17 mars, et au micro d'Europe 1, il dira: «Les Français, à force d'immigration incontrôlée, ont parfois le sentiment de ne plus être chez eux». Un florilège qui n'a pas échappé à Marine Le Pen, qui a déclaré que Claude Guéant «pourrait être adhérent d'honneur du FN puisqu'il est touché par la grâce, sauf que cela n'annonce que les prochaines élections». La présidente du FN a tout compris. Dommage.