La Grèce est dans l'impasse et les marchés financiers envoient des signaux d'alarme. Les Bourses reculent nettement et l'euro s'enfonce en dessous du seuil de 1,30 dollar. L'absence prolongée de gouvernement à Athènes fait craindre aux investisseurs des délais de latence, voire une suspension des aides financières destinées à faire face au service de la dette et à assurer le règlement d'arriérés. Sans cette aide, la Grèce risque la cessation de paiement. Or, rien n'indique qu'un accord de gouvernement puisse être trouvé entre les principales forces politiques grecques. Les élections législatives de la semaine dernière n'ayant dégagé aucun parti majoritaire, les leaders des partis arrivés en tête de la consultation n'arrivent pas à constituer un gouvernement viable susceptible de bénéficier de l'appui de l'assemblée élue. La situation est bel et bien bloquée. La Grèce se dirige ainsi vers l'organisation de nouvelles élections législatives qui pourraient se dérouler à la fin du mois de juin. Mais une forte incertitude pèse sur le résultat en raison de l'opposition de plus en plus marquée de la population aux mesures d'austérité drastiques imposées par les créanciers du pays. La stabilisation de l'économie grecque est conditionnée par la mise en œuvre d'un programme très brutal de réduction des dépenses publiques, combiné à la compression des salaires et des retraites. Les Grecs sont excédés par une politique économique extrêmement cruelle qui pourrait durer plusieurs années. Face à cette situation, les dirigeants européens envisagent à présent la sortie de la Grèce de l'euro, d'autant que les banques créancières ont eu le temps de constituer les provisions à même de leur permettre de résister à la faillite du pays. Le retour à la drachme, l'ancienne monnaie qui avait cours avant l'introduction de l'euro, pourrait permettre à Athènes de recouvrer sa souveraineté monétaire ; et, par la dévaluation, retrouver les marges de compétitivité internationale qui lui font défaut actuellement. Mais une telle sortie ne serait pas sans danger pour une Europe monétaire en pleine zone de turbulences. Le risque de contagion est bien réel et pourrait avoir des répercussions sur l'ensemble des partenaires de l'euro. L'agence de notation Fitch a averti qu'un tel scénario placerait toute la zone sous surveillance négative. La France, l'Espagne, la Belgique, l'Irlande, l'Italie, le Portugal, la Slovénie et Chypre pourraient ainsi voir leurs notes dégradées et mécaniquement subir la sanction des marchés. L'Espagne, qui parvient à emprunter en concédant des taux de plus en plus élevés, est en première ligne dans l'hypothèse d'une sortie de la Grèce. A cela s'ajoute un sinistre financier majeur : les 143 milliards d'euros déjà versés à Athènes par le FMI et l'UE seront difficilement récupérés. La crise politique grecque pourrait ainsi déboucher sur une réaction en chaîne dévastatrice dans un contexte de récession. La bombe grecque pourrait lézarder un édifice européen construit sur des normes financières conservatrices et l'observance dogmatique de l'orthodoxie monétaire imposées par la toute-puissante Allemagne, qui ne parvient pas à dépasser le traumatisme de l'hyperinflation vécue dans les années vingt du siècle dernier. La cruauté du programme d'ajustement a poussé une grande partie du peuple grec dans la misère et le désespoir, sans sortie du tunnel en vue. L'économie hellène, qui ne représente que 2 à 3% de la zone euro, pourrait être le détonateur d'une crise structurelle aux répercussions incalculables. Il est vrai que pour les anciens, les dieux de la Grèce antique étaient ironiques µ