Martine Aubry ne sera pas de la partie dans le nouveau gouvernement français dirigé par Jean-Marc Ayrault. L'ancien Premier ministre Laurent Fabius arrive au Quai d'Orsay et Manuels Valls s'installe au ministère de l'Intérieur. Un bras de fer s'est déroulé entre Pierre Moscovici et Laurent Fabius pour le poste de ministre des Affaires étrangères. Depuis vingt-quatre heures, la toile française s'enflammait sur celui qui l'emportera et quel arbitrage fera le nouveau président français, François Hollande. Le fidèle Pierre Moscovici, qui avait organisé toutes les activités internationales du candidat François Hollande, pouvait escompter, «naturellement», devenir le nouveau chef de la diplomatie en remplacement d'Alain Juppé. Mais il faisait face à une forte concurrence de l'ancien Premier ministre Laurent Fabius qui aspirait au poste. C'est le fidèle qui est passé à la trappe. Laurent Fabius a obtenu le poste en raison des impératifs de dosages internes au sein du Parti socialiste. Le nouveau chef de la diplomatie française, un rallié tardif à François Hollande, n'est pas connu pour avoir une grande expérience internationale, sa carrière s'étant construite sur un profil «interne». «GAULLO-MITTERRANDISTE» VS NEO-ATLANTISTE Un article du journal Le Monde qui cite des «diplomates et experts» proches du PS, met en avant une différence subtile entre un Laurent Fabius qui incarnerait une option «gaullo-mitterrandiste» et un Pierre Moscovici qui serait franchement «néo-atlantiste». Dans cette lecture, Fabius serait un «peu moins» suiviste à l'égard de l'aile «néoconservatrice» de la diplomatie française qui s'est fortement exprimée sous Sarkozy. Cette tendance de la diplomatie française dans laquelle s'insère Moscovici a placé «la France, ces dernières années, dans un état de soumission aux radicaux du Likoud, le parti au pouvoir en Israël, à propos de l'Iran...». Le constat sur le «néo-atlantisme» de Moscovici paraît fondé au regard de ses prises de positions publiques. Rien n'indique cependant que Laurent Fabius, qui ne s'exprime pas beaucoup sur les sujets internationaux, soit plus «gaullien» et moins atlantiste. Cela reste à démontrer. Le nouveau ministre des Affaires étrangères a fait une carrière brillante mais très centrée sur la vie politique française. Il a été ministre du Budget, de l'Industrie et de la Recherche, Premier ministre et président de l'Assemblée nationale. En réalité, le choix, immédiat, du chef de la diplomatie française relève de la cuisine politique interne et n'indique pas une option déterminée en matière de politique étrangère. On devra attendre tout simplement un énoncé clair de cette politique extérieure pour voir dans quelle direction François Hollande et le nouveau locataire du Quai d'Orsay orienteront la politique extérieure française. Et il est très probable que cette politique ne changera pas au sujet de l'Iran, thème prioritaire d'Israël qui pourrait constater dans ce domaine une «continuité». VALLS, UN SOCIALISTE DE «DROITE ET D'ORDRE» Mais le fait politique majeur, interne, est bien le refus de Martine Aubry d'entrer au gouvernement de Jean-Marc Ayrault alors que les pronostics la donnaient à la tête d'un grand ministère. Martine Aubry, «trop à gauche», ne fera pas partie du gouvernement. Elle reste, à priori, à la tête du Parti socialiste qu'elle mènera pour la bataille, qui s'annonce difficile, des législatives. L'arrivée de Manuel Valls à l'Intérieur ne surprend pas et même s'il a vivement critiqué la dérive droitière de Sarkozy, il n'est pas loin de reprendre, en l'édulcorant un peu, le discours sécuritaire en vogue. Député-maire PS d'Evry, Manuels Valls a publié un livre intitulé «Sécurité, la gauche peut tout changer» dans lequel il récuse «l'opposition entre liberté et sécurité», défend la vidéosurveillance et souligne l'importance de la répression. Il est pour des «quotas migratoires» en défendant une politique très à droite. «Je préfère susciter des remous chez mes camarades que la colère des Français», a-t-il déclaré en estimant que l'immigration «peut être profitable à la France si les flux sont véritablement maîtrisés». Selon lui, la «gauche doit donc sortir d'un discours dogmatique ou compassionnel pour construire une politique efficace».