Parce qu'il a épinglé leur pays sur la question des droits de l'homme au Sahara Occidental occupé et sur les entraves qui empêchent la Minurso d'exercer pleinement ses fonctions de surveillance, de maintien de la paix et d'observation dans ce territoire, les autorités marocaines ont décrété leur « retrait de confiance » à l'envoyé spécial de l'ONU au Sahara Occidental, Christopher Ross, et lui interdisent l'entrée dans le Royaume où il devait se rendre dans le cadre d'une nouvelle visite dans la région. Ce que faisant, les autorités marocaines ont infligé un humiliant camouflet à Ban Ki-moon, le secrétaire général de l'ONU, qui a endossé le rapport de Christopher Ross les clouant au pilori. Mais leur décision constitue également un défi à la communauté internationale qui a donné son aval à la nomination de Christopher Ross. C'est pourquoi les Nations unies ne doivent pas se satisfaire de la simple expression par Ban Ki-moon du « maintien de sa confiance » à son envoyé spécial, mais agir plus fermement en direction de Rabat. Les Marocains veulent en fait pousser Ross à jeter l'éponge et, par voie de conséquence, torpiller les négociation qu'ils ont été obligés d'engager avec le Polisario sur la base du plan de paix de l'ONU, basé sur le principe de la reconnaissance pour le peuple sahraoui à exercer son droit d'autodétermination. Leur geste vise aussi très vraisemblablement à mettre devant le fait accompli le nouveau président français François Hollande. Ce n'est pas un hasard en effet si leur décision est intervenue à peine Hollande investi à l'Elysée. Il n'est pas attendu que le nouveau Président français « révolutionne » la position de l'Etat français sur la question du Sahara Occidental, qui est, comme on le sait, favorable au Maroc. Mais il lui est prêté la détermination de ne pas se montrer indifférent, comme le fut son prédécesseur, aux souffrances du peuple sahraoui victime de la répression du Makhzen et aux atteintes aux droits de l'homme qui se commettent contre lui. Gênées par l'initiative marocaine visant l'envoyé spécial des Nations unies, les nouvelles autorités françaises se sont contentées de faire savoir qu'elles « en prennent acte ». Il est clair cependant qu'après les soutiens internationaux qui se sont exprimés en faveur de Christopher Ross, elles doivent expliciter le sens et les conséquences de « leur prise d'acte » de la décision marocaine. Hollande n'ignore pas que le soutien sans faille prodigué par la France à la partie marocaine est la cause que les autorités chérifiennes défient la communauté internationale et bafouent sans crainte les droits de l'homme en territoire sahraoui occupé. C'est la France qui, notamment, bloque l'élargissement de la mission de la Minurso que demande explicitement Christopher Ross dans son accablant rapport qui a fait réagir Rabat. Après ce rapport, cet élargissement de la mission de la Minurso s'impose comme une urgente nécessité pour la protection de la population sahraouie. Et c'est de la réponse que fera sur le sujet le nouveau pouvoir français que l'on saura si François Hollande a décidé d'en finir avec la politique à géométrie variable et sélective en matière de défense des droits de l'homme qu'a pratiquée son prédécesseur. Certes, le nouvel occupant de l'Elysée a l'emploi du temps accaparé par d'autres priorités, mais les « amis marocains » lui imposent de se découvrir sur la question sahraouie et ont fait ce qu'il fallait pour lui forcer la main.