Le flou persiste toujours dans la partie nord du Mali, contrôlée par plusieurs groupes armés. Et, ce qui devait être une alliance entre les deux principaux groupes touareg qui avaient proclamé l'indépendance de l'Azawad (nord du Mali en targui) au mois d'avril dernier a définitivement été abandonné et dénoncé par le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA). Hier vendredi, dans un communiqué, le MNLA a «dénoncé l'accord» de fusion annoncé samedi dernier avec le groupe armé islamiste d'Ansar Eddine, d'importants désaccords ayant apparu entre les deux mouvances quant à l'application de la loi islamique prônée par le groupe d'Iyag Ag Ghali, chef d'Ansar Eddine. «Le Bureau politique du MNLA, devant l'intransigeance d'Ansar Eddine sur l'application de la charia dans l'Azawad, et pour être fidèle à sa ligne de conduite résolument laïque, dénonce l'Accord en date du 26 mai 2012 avec cette organisation et en déclare nulles et non avenues toutes dispositions y afférentes», indique le communiqué daté de Gao et signé par Hamma Ag Mahmoud, membre du Bureau politique du MNLA. L'annonce samedi dernier de la fusion du MNLA et Ansar Eddine en un seul mouvement et la proclamation d'un Etat islamique dans l'Azawad avaient ravivé les inquiétudes, quant à l'avenir du pays, de la communauté internationale, et les observateurs. Le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) et le groupe islamiste Ansar Eddine, lui-même épaulé par les groupes terroristes d'Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), avaient vite fait de proclamer leur autodissolution, et annoncé la création d'un «Conseil transitoire de l'Etat islamique de l'Azawad», selon l'accord conclu entre les deux groupes. «Nous sommes tous pour l'indépendance de l'Azawad», «nous acceptons tous l'islam comme religion», le Coran et la Sunna sont «la source du droit», sont les principaux points de ce document. Il aura fait long feu. Il n'était «pas question» pour Ansar Eddine «de revenir sur l'application de la charia», qui est son objectif affiché pour l'ensemble du territoire malien, tandis que le MNLA indiquait «chercher une formule acceptable par tous» mais que cette formule n'était «toujours pas trouvée», selon des observateurs. Le MNLA et Ansar Eddine contrôlent tout le nord malien, et les principales villes comme Gao, Tombouctou et Kidal sont entre leurs mains. Dans cette partie du pays, les groupes d'Aqmi sont devenus très présents, et ils y circulent depuis la déroute de l'armée malienne en toute tranquilité, avec un autre groupe dissident d'Aqmi, le MUJAO (Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest). Une situation qui préoccupe au plus haut point la communauté internationale, alors que le gouvernement malien a déjà rejeté toute idée d'indépendance de l'Azawad. «Le gouvernement du Mali rejette catégoriquement toute idée de création d'un Etat de l'Azawad, encore plus d'un Etat islamique», a affirmé le ministre malien de la Communication et porte-parole du gouvernement, Hamadoun Touré. De son côté, le président du Bénin, et président en exercice de l'Union africaine, Thomas Boni Yayi, a plaidé pour une saisine du Conseil de sécurité de l'ONU en vue de la création d'une force africaine d'intervention au Mali, lors d'une conférence de presse mercredi à Paris. «Nous proposons que l'UA renforce sa position pour que le Conseil de paix et sécurité (de l'UA) puisse saisir le Conseil de sécurité de l'ONU», a-t-il dit, évoquant une force qui pourrait être africaine sous l'égide de l'ONU. «Nous pouvons prendre exemple de la Somalie, où une force africaine opère avec le soutien des Nations unies. Nous pouvons aller dans cette direction», a-t-il dit, sans plus de précision quant à la composition et au mandat de cette force. «Nous ne voulons pas d'un Afghanistan ouest-africain. La question de la stabilité n'est pas négociable pour nous»', a-t-il encore martelé. A Alger, la question du retour à l'ordre constitutionnel au Mali est une constante, selon le ministré délégué chargé des affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel. Pour la France, il n'est pas question d'une intervention militaire au Mali. Mardi dernier, le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, avait affirmé que la France «n'a pas vocation à intervenir directement» en Afrique, et, ce qu'il faut, «c'est une action globale de la communauté internationale qui conjugue stabilisation, développement et renforcement de la sécurité», selon lui. Sur le terrain, le Mali est de fait coupé en deux: le nord aux mains de groupes armés, alors que le centre et le sud plongent doucement dans l'une des plus terribles crises politiques du pays.