Désigné prince hériter en octobre 2011, à l'âge de 78 ans, après avoir été pendant 36 longues années ministre de l'Intérieur d'Arabie Saoudite, Nayef ben Abdel Aziz al-Saoud, est mort, hier, à Genève, en Suisse. Il sera inhumé, aujourd'hui, à La Mecque, a indiqué hier, le Palais Royal, dans un communiqué. C'est un signal. Les premiers princes de la dynastie disparaissent et la succession va devenir, de plus en plus, compliquée. Le prince Nayef, affaibli par la maladie, vraisemblablement un cancer, s'était rendu le 26 mai à l'étranger, pour y subir, selon les médias saoudiens, des examens médicaux pour la deuxième fois en moins de trois mois. Son frère, Ahmed ben Abdel Aziz, avait affirmé, le 3 juin dernier, qu'il se portait bien et allait regagner bientôt le royaume. Il était pourtant manifeste que son état de santé s'était détérioré, la télévision saoudienne le montrant, dans des cérémonies protocolaires obligatoires, les traits tirés et généralement assis. Le prince Nayef qui avait succédé à son frère Sultan, décédé le 22 octobre 2011, aura été le prince héritier pendant seulement 8 mois, illustrant clairement le vieillissement des premiers princes de la dynastie des Al Saoud. Le Roi Abdallah qui était le demi-frère du prince Nayef et qui a survécu à deux princes héritiers, est lui-même âgé de 88 ans. Aucune indication n'a été encore donnée sur le nom du prochain prince héritier, mais tout indique que son frère, Salman Ben Abdelaziz, ministre de la Défense, âgé de 76 ans, devrait lui succéder. LA FRATRIE DES SOUDEIRI La succession au trône s'est faite, depuis le décès du fondateur du royaume en 1953, par ordre d'ancienneté. Le prince Salman, né en 1936, est donc logiquement en orbite. Il l'est d'autant plus qu'il a l'atout d'avoir été l'ancien responsable du Conseil de famille chargé de régler les différends internes d'une famille comptant des milliers de personnes. Il a aussi des solides appuis dans la région centrale du Nejd qui constitue l'assise de la monarchie. Le poste de pré-roi ne devrait donc pas échapper à la puissante fratrie des «Soudeiri» en référence à leur mère, Hassa al-Soudeiri, l'épouse favorite du roi fondateur du royaume Ibn Saoud. Le frère aîné de la fratrie des Soudeiri, Fahb Ibn Abdelaziz a été le Roi d'Arabie Saoudite et serviteur des Lieux saints de 1982 à 2005. Plutôt conservateur, le prince Nayef ne voyait pas d'intérêt à l'élection d'un Majliss Echoura et encore moins la présence de femmes dans ce Majliss. Il aurait joué un rôle décisif dans la décision prise par le régime wahhabite d'accueillir, le 14 janvier 2011, le président tunisien en fuite, Zine Al Abidine Ben Ali. Il a également fortement pesé dans l'envoi de troupes dans le petit royaume voisin du Bahreïn où la monarchie sunnite faisait face à une contestation politique menée par des chiites, majoritaires. UNE PLETHORIQUE SECONDE GENERATION DE PRINCES Le prince Nayef a, en tant que ministre de l'Intérieur, supervisé la lutte sans merci contre les djihadistes d'Al Qaïda qui ont lancé une campagne sanglante d'attentats entre 2003 et 2006. Il a également eu la main lourde contre les contestataires chiites du royaume qui réclamaient plus de droits au sein du royaume. Cette répression, soutenue par l'establishment religieux sunnite, a souvent été présentée comme une volonté de lutter contre «l'hégémonie» de l'Iran. Il est probable qu'avec le contexte tendu dans la région, guerre de position ouverte en Syrie contre les Alaouites, assimilés aux chiites, situation tendue au Bahreïn, contestation des Saoudiens chiites, cette politique «dure» contre Téhéran restera de mise. Mais la disparition progressive des premiers princes de la dynastie, tous d'un âge avancé, risque de poser un redoutable casse-tête successoral parmi les très nombreux princes de la seconde génération qui attendent et se placent.