La célébration de la Journée mondiale de l'architecte, coïncidant avec le 2 juillet de chaque année, aura lieu à Oran. C'est la première décision prise par le comité scientifique du Conseil de l'ordre des architectes réuni à l'hôtel Phoenix hier et avant-hier. Pour cette occasion, le Conseil de l'ordre des architectes a décidé d'innover en invitant notamment les étudiants d'architecture des différentes universités à exposer leurs travaux. «Une opportunité pour impliquer et initier les futurs architectes aux débats concernant leur futur profession» nous dira Touileb Athmane, président de ce Conseil. Par ailleurs, les bureaux d'études en architecture seront aussi conviés et probablement le débat se rapportant aux problèmes dans lesquels se débat cette profession sera engagé. Aussi, un hommage particulier sera rendu à Yellès Bachir, artiste, considéré comme une personnalité qui a énormément apporté à l'architecture. Mais en dehors du programme de célébration de cette journée, les présents à la réunion ont profité pour poser quelques-unes des difficultés qu'ils rencontrent dans l'exercice de leur métier. Dès le départ, ils insistent et précisent que leurs références sont les recommandations des deuxièmes assises de la profession qui ont eu lieu en 2006 sur recommandation du président de la République et la loi-cadre, dite 94/07, réglementant le métier. Concernant le premier point, ils affirment que les recommandations, transmises notamment au ministre de l'Habitat, sont restées lettre morte et n'ont jamais été prises en compte par ce département ministériel. Concernant la loi-cadre, documents à l'appui, ils affirment que le ministre de l'Habitat ne rate jamais une occasion pour piétiner les dispositions de ce texte de loi. A titre d'exemple, ils citent le cas d'octroi des agréments à des bureaux d'études, notamment étrangers, d'établir l'étude et la réalisation des projets. Excédé, M. Kahouadji, architecte de Tlemcen et membre du Comité national du Conseil de l'ordre dira «on ne peut pas être juge et avocat à la fois». Et d'expliquer «la conception est une chose et la réalisation en est une autre». Abondant dans ce sens, il dégage la responsabilité de sa profession quant à la laideur et l'absence de style de nos nouvelles villes. Il tonnera «le ministre cherche la quantité alors que nous voulons maintenant la qualité». Allant dans ce sens, Ahmed Chérifati, d'Alger, presque un véteran du métier, dira «nous voulons éviter à notre pays l'expérience vécue ailleurs : se sentir obligé de détruire ce qui a été construit auparavant». Plus mesuré, le président Touileb Athmane nous résumera la loi 94/07 qui stipule entre autres que «l'exercice du métier d'architecture est du ressort du Conseil de l'ordre». Et d'ajouter: «l'article 15 de cette loi est encore plus précis: nul n'est autorisé à exercer le métier d'architecte s'il n'est pas inscrit sur le tableau du Conseil de l'ordre». Or, remarque-t-il, le ministre de l'Habitat ignore allègrement ces dispositions de la loi et accorde les agréments aux bureaux d'études (et non aux architectes à qui incombe la responsabilité en tant que personnes physiques en cas de sinistre). Dans ce cadre, notre interlocuteur signale que les agissements du ministre sont totalement en porte-à-faux avec une instruction du Premier ministre Ahmed Ouyahia portant le N° 680 / PM datant du 21 décembre 2009 et qui vise la limitation du recours aux bureaux d'études étrangers et avantager les compétences nationales. Cette instruction a été promulguée après un constat lourd de sens et de conséquence : le marché des études a enregistré 12 milliards de dollars dont la majeure partie a été accaparée par les bureaux étrangers, nous explique-t-on. Moula Djamel, architecte installé à Aïn Témouchent et membre du Conseil national du Conseil de l'ordre nous citera l'exemple le plus récent d'un bureau qui a obtenu l'étude du projet de 45.000 logements à Alger. Synthétisant les débats, Touileb Athmane nous affirme que le Conseil de l'ordre, le seul habilité légalement à délivrer les agréments, n'a agréé aucun bureau d'études, exception faite de celui chargé de la réalisation de la Grande Mosquée d'Alger. Constatant sa marginalisation dans toutes les décisions prises par le ministre de l'Habitat et exclu de toute consultation se rapportant au secteur, le Conseil de l'ordre compte saisir le Conseil de l'Etat juste après la célébration de la Journée mondiale de l'architecte pour l'annulation de toutes les circulaires qui s'inscrivent en faux par rapport à la loi-cadre 94/07. Parmi ces circulaires, on cite celles autorisant les bureaux d'études, notamment étrangers, de s'acquitter de la conception. Par ailleurs, le Conseil de l'ordre envisage de saisir le président de la République pour «mettre» les architectes sous une autre tutelle. «Pourquoi pas ne pas créer un ministère du cadre du bâti où les architectes seront sous sa tutelle» nous dit-on. Dans ce sens, on nous signale qu'au Maroc, le Conseil de l'ordre des architectes relève de l'autorité directe du monarque lui-même. En France, il relève de la tutelle du ministère de la Culture. Pour signifier le peu d'égard manifesté à cette profession, on nous dira que le prix national de l'architecture est doté de la somme modique de 50.000 DA. Ça veut tout dire