Les compagnies chinoises, Huawei et ZTE, classées parmi les plus importants fournisseurs d'équipements télécoms dans le monde, sont soupçonnées ou accusées d'espionnage. Un rapport du Sénat français recommande d'interdire leurs équipements en France et en Europe. Leur pénétration a été limitée aux USA et interdite en Australie. Le Maghreb n'a pas été affecté par l'espionnite des Occidentaux. Les deux équipementiers y jouissent d'une importante position. Un rapport du sénateur français, Jean-Marie Bockel, fait au nom de la commission des affaires étrangères et de la défense, rendu public le 18 juillet dernier recommande purement et simplement l'interdiction de s'équiper en routeurs Internet et autres équipement réseau fabriqués par les deux équipementiers chinois Huawei et ZTE. Le rapport qualifie «les routeurs de réseaux» d'équipements hautement sensibles «du point de vue de la sécurité des systèmes d'information». «Rien n'empêcherait, en effet, un pays producteur de ce type d'équipements d'y placer un dispositif de surveillance, d'interception, voire un système permettant d'interrompre à tout moment l'ensemble des flux de communication», note le document. Cela d'autant plus que le fait de placer un tel dispositif de surveillance directement au cœur du «routeur de réseaux» rendrait ce dispositif presque totalement «invisible» et indétectable. Selon le sénateur, «de forts soupçons pèsent sur la Chine en matière de provenance des attaques informatiques». ZTE est la plus grande entreprise chinoise en matière des télécommunications et Huawei est la plus grande entreprise privée en Chine. Formellement, elles ne sont pas contrôlées par l'Etat chinois, mais les occidentaux émettent des soupçons sur des présumées «relations entretenues avec le gouvernement et le comité central du parti communiste chinois», allant jusqu'à recevoir des subventions de l'Etat. Limitées aux USA et interdites en Australie Le rapport puise ses arguments d'une récente enquête lancée par des parlementaires américains sur les activités de Huawei et de ZTE aux Etats-Unis. «Nous sommes très inquiets par les attaques informatiques menées par le gouvernement chinois à l'encontre de nos réseaux nationaux. Notre inquiétude porte sur la possibilité pour le gouvernement chinois d'accéder par l'intermédiaire des équipements Huawei ou ZTE aux conversations téléphoniques ou aux e-mails, et qu'il puisse interrompre ou détruire les systèmes de communication», note Dutch Ruppersberger, l'un des parlementaires ayant lancé l'enquête. Les autorités ont d'ailleurs pris ces dernières années plusieurs mesures afin de limiter la pénétration des équipementiers chinois Huawei et ZTE sur le marché américain pour des raisons liées à la sécurité nationale. Elles soupçonnent que les puces, routeurs et autres équipements informatiques chinois soient équipés de «portes dérobées» permettant au gouvernement chinois d'accéder à des informations sensibles transitant par ces équipements. En Australie, les autorités ont carrément interdit aux opérateurs de télécommunications l'utilisation de «routeurs chinois» pour équiper les réseaux sur leur territoire en raison des soupçons de cyberattaques en provenance de Chine. «Nous avons la responsabilité de faire le maximum pour protéger l'intégrité des réseaux nationaux et des informations qui y circulent», a déclaré le porte-parole du gouvernement, cité dans le rapport Bockel. Pas de problèmes apparents sur le marché maghrébin Au Maghreb, les deux entreprises chinoises jouissent d'une place très importante au sein d'un marché des télécoms sensible aux avantages économiques de ces équipements proposés par les entreprises chinoises à moindres coûts. Les deux chinois sont très présents dans les pays maghrébins où ils s'imposent devant des leaders mondiaux en équipements de télécommunication pour équiper les opérateurs historiques et fournir les équipements et les services aux opérateurs des réseaux mobiles en en Algérie, en Tunisie, au Maroc et en Libye notamment. En Libye, ZTE et Huawei ont remporté des contrats pour l'optimisation du réseau de l'opérateur public de téléphonie mobile Libyana, la mise en place du réseau de fibre optique ; en Tunisie aussi : fourniture de système de câblage sous-marin, déploiement réseaux de Tunisie Télécom ; au Maroc : les deux entreprises travaillent avec Maroc Telecom sur l'internet et le Mobile. En Algérie, bien que bannis tout récemment des marchés publics algériens pour une durée de deux ans après des condamnations pour corruption, trafic d'influence et blanchiment d'argent, les deux équipementiers demeurent les fournisseurs par excellence des équipements de connexion notamment pour entreprises, ministères, administrations et institutions. Algérie Télécom est même entrée en partenariat avec Huawei Telecom pour équiper ses clients. Cette entreprise est aussi un partenaire du Ministère de la Poste et des Technologies de l'information et de la communication, de Mobilis et d'entreprises telle que Sonatrach. Autant dire, que les deux chinoises se positionnent très bien au Maghreb comme d'ailleurs dans toute l'Afrique grâce à une politique de prix agressive mais appropriée aux pays en développement. L'équipement à moindre coût des chinois ne suscite pas des soupçons d'espionnage dans ces pays là du moins pour l'instant. De toute évidence, qu'il s'agisse d'Alcatel ou d'Huawei, l'équipement à bas coût que privilégient les opérateurs de télécom proviendra de la lointaine Chine.