Le marché parallèle de la monnaie étrangère qui s'appuie essentiellement sur les entrées en devises au titre des pensions et des retraites des nationaux ayant travaillé à l'étranger (la Banque d'Algérie en estime le volume global à 2,5 milliards d'euros) est aujourd'hui boosté par la demande d'Algériens fortunés désireux d'acquérir des biens immobiliers et autres actifs dans les pays européens sévèrement ébranlés par la crise. C'est ce qui explique, selon Djamel Benbelkacem, économiste et conseiller à la B.A., le raffermissement du marché informel de la devise, quelques années après que la mesure d'interdiction de l'importation des véhicules de moins de trois ans eut annulé les 20% d'écart qui séparaient les taux de change parallèle et officiel : « La réglementation des changes soumettant ce genre de transactions à une autorisation du Conseil de la monnaie et du crédit, beaucoup d'Algériens disposant de dinars préfèrent contourner la loi et s'adressent au secteur informel de la devise », a estimé Djamel Benbelkacem, hier matin, à l'émission l'invité de la rédaction de la chaîne trois. Une fuite des capitaux également mise en évidence par l'accroissement de la monnaie fiduciaire (les billets) au détriment du chèque qui, lui, permet une traçabilité des transactions économiques et de la circulation des masses monétaires. D'où la nécessité, selon le même économiste, de réhabiliter l'usage du chèque pour pouvoir suivre les opérations économiques et évaluer les activités réelles des agents. Remettant en cause les 1.300 milliards de dinars de déficit budgétaire au premier semestre de l'année en cours annoncé par le ministre des Finances, Karim Djoudi, le conseiller de la Banque d'Algérie a rassuré qu'en termes réels, le chiffre devait être beaucoup moins important : « La loi des Finances a été établie sur la base de 37 dollars le prix du baril de pétrole alors qu'en réalité, il était de 13 dollars ; et pendant ce temps, les dépenses des caisses, elles, sont réelles. Vues sous cet angle, les dépenses sont effectivement supérieures aux recettes et le déficit est bien de l'ordre des 1.300 milliards de DA. Mais si nous prenons les recettes au prix réel du baril de pétrole, le déficit sera beaucoup moins élevé », a-t-il brièvement indiqué en soulignant qu'il revenait au ministère des Finances de s'expliquer sur la question. Sans être franchement ravi de la situation économique du pays, Djamel Benbelkacem n'en a pas moins appelé à se garder de tout «catastrophisme»: «Depuis une dizaine d'années, la gestion macroéconomique est saine, le compte courant de balance des paiements est en excédent, les réserves de change tournent autour de 180 milliards de dollars, l'épargne publique avoisine les 70 milliards de dollars, l'inflation a été maîtrisée jusqu' au début de l'année..., les indicateurs montrent que la situation économique est au beau fixe », a-t-il énuméré en ajoutant que la croissance hors hydrocarbures des dix dernières années est appréciable (de 5 à 6%) même si elle a été essentiellement soutenue par le BTP et les services marchands et que l'industrie reste très faible. Et que, comme tout le monde le sait, cette bonne santé repose sur les exportations des hydrocarbures. Relativement maîtrisée jusqu'au début de l'année 2012 (entre 3,5% et 3,9% en 2011), l'inflation est repartie à la hausse (7.53% ce juillet) en raison de la croissance cette année des indices de prix de la pomme de terre, de la viande ovine et des fruits et légumes. Et, contrairement à ce que l'on pourrait penser, ce ne sont pas les marchés internationaux qui ont provoqué cette hausse : « Il n'y a pas eu d'augmentation des prix des produits de base importés, les droits de taxes n'ont pas changé et la masse monétaire est même en décélération. L'inflation provient uniquement des dysfonctionnements du marché national », a analysé le conseiller de la Banque d'Algérie en précisant qu'il n'est pas dans les attributions de la BA de réguler les marchés : « Notre mission est de veiller à la stabilité des prix, à la maîtrise de l'inflation et la conformité des pratiques bancaires avec la réglementation », a-t-il rappelé (là encore) à l'adresse du ministère des Finances.