Le discours officiel sur la réforme en Algérie pèche beaucoup par sa généralité, ce qui permet d'utiliser des mots généreux et beaux qui tournent à vide. Et c'est pour cela qu'on attend toujours des signaux que l'on a décidé de sortir de l'immobilisme et de la stagnation. Les changements survenus dans la proximité immédiate de l'Algérie - allant d'un mouvement authentique en Tunisie à un mouvement très fabriqué de l'extérieur en Libye - ont bien montré que le statuquo est la pire des options. Les discours alarmistes sur les menées étrangères ne peuvent en aucun cas justifier que le développement politique du pays soit bloqué et que l'expression libre, plurielle et organisée de la société soit entravée. Cela fait des années que l'on constate que ces entraves qui font le lit d'une dépolitisation n'apportent pas la stabilité ; elles peuvent donner, pour un temps, une illusion de tranquillité, elles n'apportent jamais la stabilité. Plus une société est dépolitisée et plus les risques d'une «manipulation étrangère» si lourdement invoquée par le pouvoir et ses périphéries ont des chances de réussir. L'immobilisme imposé à l'Algérie n'arrête pas la marche du monde, ni les flux de l'information et des idées. Et il n'existe pas de réforme compatible avec l'immobilisme. L'Algérie est mise dans une sorte de spécificité brumeuse où le souci de «maîtriser» la réforme aboutit à la neutraliser. On attend toujours le contenu de la révision constitutionnelle pour décoder les intentions du pouvoir. L'horizon politique est totalement confus à moins d'une année de la tenue des élections présidentielles. Comme à chaque échéance, la question est la même : sera-t-elle ouverte ou non ? Interrogation qui n'est pas artificielle. Si des candidats potentiels doivent attendre l'ouverture d'une campagne officielle pour accéder aux médias audiovisuels et présenter leur programme, cela signifie que les jeux sont bel et bien verrouillés. C'est aujourd'hui - et c'est déjà très tard - et non dans dix mois que la nature de l'élection se détermine. Pour l'heure, le pouvoir n'émet pas Il faudra se résigner à essayer de deviner ses intentions à travers les textes de loi censés incarner sa réforme «maîtrisée». Et ceux qui ont lu l'avant-projet de loi sur l'audiovisuel qui doit être examiné aujourd'hui par le gouvernement sont particulièrement refroidis. L'ouverture de l'audiovisuel n'est pas au rendez-vous. Le projet de texte fixe tellement de conditions et de contraintes qu'il devient pratiquement impossible de lancer une télévision. Au mieux, certains pourront lancer une chaîne thématique dont - cela a été déjà prouvé ailleurs - la rentabilité est quasi nulle. Le souci de «contrôler» l'information est l'obsession et c'est bien là où le bât blesse. Ce «contrôle» ne risque de s'exercer que sur les Algériens qui veulent travailler en Algérie. La loi sur l'audiovisuel n'entravera pas les informations qui viendront de l'extérieur qu'elles soient le fait d'Algériens ou non. C'est une vision surannée et pauvre qui tente d'empêcher le développement des contenus audiovisuels en tout genre «en Algérie» alors qu'il faut l'encourager Au lieu de s'engager dans l'avenir en se disant qu'on a pris trop de retard, on semble s'accommoder de tour de passe-passe en permettant à des «amis» agréés de s'installer en télévision algérienne de «droit étranger». C'est un mauvais signal.