Les militaires au pouvoir en Egypte, après la destitution du président Mohamed Morsi et la décapitation des Frères musulmans avec l'arrestation de presque tous leurs dirigeants poursuivis pour incitation au meurtre, veulent redresser la barre et remettre politiquement le pays sur les rails. En même temps, la lutte contre les poches 'terroristes'' au Sinaï s'intensifie, et la menace d'attentats terroristes devient de plus en plus évidente. Face à une situation sécuritaire préoccupante, les autorités de transition veulent reprendre la main sur le plan politique avec la révision de la constitution. Et c'est tout naturellement l'ancien chef de la diplomatie et ancien candidat du camp des démocrates à la présidentielle, Amr Moussa qui a été nommé président de la Constituante et a été chargé de diriger les travaux de la révision de la constitution égyptienne, une des revendications de l'opposition du temps de la présidence de Morsi. M. Amr Moussa a été élu, hier dimanche, président du «Comité des 50» qui a entamé ses travaux de révision de la Constitution, qui a été suspendue par l'armée lors de la destitution du président Morsi. Lors de cette session inaugurale organisée dans l'enceinte de la Choura, la Chambre haute, M. Moussa, également ancien secrétaire général de la Ligue arabe, a été élu devant Sameh Achour, président du syndicat des avocats et chef du parti arabe nassériste. Le «Comité des 50», composé de 50 personnalités principalement issues des courants libéraux et de gauche, devait aussi élire les deux adjoints du président et former plusieurs commissions. Ce comité a désormais 60 jours pour remettre la version finale du nouveau texte de la Constitution amendée au président par intérim, qui aura alors 30 jours pour annoncer la date d'un référendum. Pour rappel, l'actuelle Constitution avait été adoptée en décembre dernier par référendum mais elle était soupçonnée d'ouvrir la voie à une islamisation de la législation, et sa révision représente l'un des principaux chantiers prévus par la feuille de route présentée par l'armée pour la transition. Les 50 membres de ce comité représentent des institutions religieuses d'Egypte, de la société civile, du mouvement Tamarrod, instigateur des manifestations du 30 juin sur lesquelles s'est appuyée l'armée pour déposer M. Morsi le 3 juillet, ainsi que de l'armée, de la police, des syndicats, des étudiants et des femmes. Un premier comité, formé fin août et composé de quatre professeurs d'université et de six magistrats avait préparé des amendements à la loi fondamentale, sur lesquels le «Comité des 50» doit désormais plancher. L'annonce de la mise en place de ce comité et celle de nouveaux chefs d'inculpation sur les responsables des Frères musulmans, dont l'ex-président Morsi, met un terme à toute participation de courants islamistes à la future vie politique en Egypte, d'où la crispation sur le front sécuritaire. Et, hier dimanche, l'aviation égyptienne poursuivait ses bombardements sur le Nord-Sinaï, à la lisière de la frontière avec la bande de Gaza, au lendemain de raids qui ont fait au moins neuf morts parmi des islamistes présumés. LA CONFRERIE DES FRERES MUSULMANS DECAPITEE Des hélicoptères Apaches de l'armée bombardaient à la mi-journée des positions proches du terminal de Rafah qui relie l'enclave palestinienne à la péninsule instable du Nord-est égyptien, alors que les communications téléphoniques avaient auparavant été coupées dans toutes les villes du Nord-Sinaï, où les attaques d'islamistes présumés se sont multipliées depuis la destitution du président Morsi. L'armée égyptienne avait lancé samedi cette opération, déployant des blindés autour des repaires présumés d'islamistes. Selon l'armée «neuf islamistes radicaux ont été tués, neuf autres arrêtés et trois caches d'armes ont été détruites» à l'issue de cette première journée. Depuis deux mois, quand les attaques contre les forces de sécurité ont redoublé, les militaires ont assuré avoir tué une centaine d'islamistes dans le Sinaï et affirmé que ces derniers ont tué 58 policiers, 21 soldats et 17 civils. Par ailleurs, le Parquet égyptien a annoncé hier que le Guide des Frères musulmans, Mohamed Badie, serait jugé dans une deuxième affaire de heurts ayant entraîné la mort de plusieurs manifestants, selon des sources judiciaires. Quatorze personnes, dont plusieurs hauts dirigeants de la confrérie dont est issu le président déchu Mohamed Morsi, comparaîtront avec M. Badie lors de ce procès dont la date n'a pas encore été fixée, ont précisé ces sources. Ces dirigeants des Frères musulmans sont poursuivis après la mort de sept personnes le 16 juillet en marge de manifestations réclamant le retour au pouvoir de M. Morsi au Caire. Parmi les co-accusés de M. Badie figurent notamment Mohamed Beltagi, ancien parlementaire, Essam el-Arian, dirigeant de la confrérie, Safwat Hegazy, influent prédicateur pro-Morsi, et Bassem Kamel Mohamed Ouda, ancien ministre de l'Approvisionnement de M. Morsi. M. Badie, actuellement incarcéré, pour «incitation au meurtre» de manifestants doit répondre de la mort de huit manifestants tués alors qu'ils tentaient d'attaquer le siège des Frères musulmans au Caire le 30 juin. Depuis le 3 juillet dernier et les affrontements entre manifestants pro-Morsi et les forces de l'ordre, plus de 2.000 membres de la confrérie ont été arrêtés et un millier de pro-Morsi tués par balles lors de ces manifestations.