«Quand la rumeur entre par la porte du palais de justice, la vérité en sort par les fenêtres», dit-on. Le départ, en silence, du procureur général de la cour d'Oran, M. Sâadallah Bahri, fait encore mystère. Une semaine après que M. Sâadallah Bahri a inopinément quitté et pour de bon son bureau, le suspense demeure total au majestueux palais square Maître Thuveny. L'absence de l'information officielle a mis en place un climat propice à la rumeur, la spéculation, voire même l'intox. Aussi bien dans les couloirs du palais et aux alentours du siège de la cour, que dans les tribunaux et les différents établissements sous la coupe de cette institution judiciaire, le départ quasi énigmatique du PG est sur toutes les langues. Toutes les tentatives entreprises par nos soins, jeudi en fin de semaine, pour connaître la version officielle liée à ce fait se sont avérées vaines. Aucune instance «locale», aucun responsable de la cour n'a voulu se prêter au simple exercice d'apporter une réponse à la question relative au départ du «chef de cour», ne serait-ce qu'en donnant la référence du fax émanant du ministère de tutelle mettant fin aux fonctions du premier responsable du parquet général de la cour d'Oran. Le PG par intérim, en l'occurrence le premier procureur général adjoint (PGA), M. Mellah Mohamed, a expliqué, par le canal du secrétariat du parquet général, qu'il n'était pas habilité à faire une déclaration à la presse à propos de ce sujet, soulignant avoir de tout temps assumé, à titre intérimaire, et ce de par son poste de 1er PGA, la fonction du PG pendant l'intervalle de temps où se poste est vacant. Il n'en demeure pas moins que l'ambiguïté réside dans le fait que la fonction de communication est, du moins sur le plan formel, exercée exclusivement par le procureur général de la cour, qui «incarne» physiquement la cellule de communication. Et on peut tout à fait comprendre que le PG intérimaire s'est d'autant senti dans l'embarras que le sujet à propos duquel il a été sollicité de s'exprimer était assez délicat. Notre tentative de trouver des éléments de réponse auprès du président de la cour, M. Medjati Ahmed, n'a pas abouti non plus, pour la simple raison que ce chef de cour n'était pas à son bureau durant toute l'après-midi du jeudi. On nous fait comprendre que la correspondance ayant fait l'objet de la notification de fin de fonction du PG a été reçue par le président de la cour. Une certitude cependant: il s'agit bel et bien d'une mise à la retraite. Il y a lieu de noter que M. Sâadallah Bahri avait demandé son départ à la retraite depuis au moins deux années. Après une très longue carrière où il avait occupé plusieurs postes dans différents départements, structures et services, et ce aussi bien au niveau central qu'à l'échelle territoriale, du secteur de la Justice, M. Sâadallah était dans son droit le plus légal et le plus légitime de partir en retraite. «Ses loyaux services, son abnégation au travail ainsi que la symbiose, dont il était à l'origine, qui était de mise entre la justice et notre barreau, ce sont autant de vertus et de valeurs sur lesquelles nous voulions mettre l'accent à travers la petite réception cérémoniale que nous avons récemment dédiée à M. Sâadallah à l'occasion de son départ en retraite. C'est la moindre des choses que nous devions accorder à ce magistrat inlassable qui a tant donné à la justice», témoigne le bâtonnier d'Oran, M. Ouahrani El-Houari, contacté par nos soins. En revanche, côté chancellerie - ou le département de M. Tayeb Louh pour être plus précis -, rien n'a été fait pour que ce serviteur de la justice ait une sortie digne d'un ancien chef de cour, pour ne comptabiliser que ce statut. Au contraire, tout a été fait pour que sa fin de parcours professionnel se fasse dans l'anonymat le plus total. «Que cache cette décision qui intervient en dehors du mouvement dans le corps de magistrature, qui est pourtant imminent ?», s'interrogent plusieurs fonctionnaires et autres auxiliaires de justice.