L'Algérie n'est pas contente des résultats de l'accord d'association avec l'Union européenne (UE) et le fait savoir. Le ministre du Commerce, Amara Benyounès, a en effet remis en cause la dynamique de l'accord signé en 2002 qui signifiait, du côté algérien, une promotion de ses exportations hors hydrocarbures en direction de l'Europe. Et il n'est pas le seul puisque nombre d'experts et d'industriels algériens, tournés vers l'exportation, n'ont cessé ces dernières années de «critiquer» cet accord, entré en vigueur en 2005, appelant même à son gel. Dans une interview parue dans le dernier numéro de «The Parliament Magazine», le ministre reproche à l'accord paraphé avec l'UE de ne pas avoir répondu aux attentes algériennes, principalement en termes d'échanges économiques et d'investissements directs étrangers (IDE) qui constituent pour l'Algérie, en plus des exportations hors hydrocarbures, «deux objectifs motivant la conclusion de tout accord de libre-échange». Et pour étayer son réquisitoire, M. Benyounès reviendra sur trois faits majeurs qui ont marqué les échanges commerciaux algériens avec l'Europe et qu'il estime qu'ils ont joué en défaveur du pays. Il évoquera un «déséquilibre structurel» de la balance commerciale hors hydrocarbures en faveur de l'UE et conséquemment un attrait qualifié de timide des IDE européens, notamment ceux orientés vers l'exportation dans les branches industrielles et filières agroalimentaires. Pour preuves, en 2013, l'Algérie a importé auprès de l'UE pour 28,5 milliards de dollars et exporté pour 42,7 milliards de dollars. Concernant les exportations hors hydrocarbures, le montant est passé de 552 millions de dollars en 2005 à 1,5 milliard de dollars en 2013, mais restent intimement liées au secteur de l'hydrocarbure puisqu'elles sont constituées essentiellement des produits dérivés des mines et de l'énergie. Il soulignera aussi la volonté toute européenne de consolider, depuis l'entrée en vigueur de l'accord, sa part du marché dans les importations algériennes, soit 52% en moyenne annuelle malgré la concurrence ardue des produits du reste du monde, expliquera-t-il. Ce déséquilibre trouve ses racines, selon l'analyse du ministre, dans les conditions techniques et réglementaires «de plus en plus exigeantes et difficilement maîtrisables» par les opérateurs économiques algériens pour accéder au marché européen. Ali Bey Nasri, consultant et président de l'Association des exportateurs algériens, qui animait en 2013 une conférence à l'Ecole supérieure des affaires d'Alger, avait estimé alors que les pays européens protègent leurs marchés par le biais de plusieurs mécanismes, une sorte de verrouillage par les textes qui fait que les entreprises algériennes n'arrivent toujours pas à se placer sur les marchés européens. Conséquence : les marchés européens restent fermés et très peu de producteurs algériens arrivent à y placer leurs produits. Le ministre du Commerce parlera, lui, d'absence de connexion entre les PME algériennes et européennes pour favoriser les exportations. M. Benyounès jugera, en résumé, que l'accord avec l'UE doit évoluer suivant la dynamique que connaît l'économie algérienne depuis une décennie, mais de là à évoquer son gel, comme souhaité par les professionnels du secteur qui parlent de pertes fiscales de l'ordre de plus de deux milliards de dollars et une quasi-impossibilité de placer des produits algériens en Europe, il n'y a qu'un pas que le gouvernement n'a pas encore franchi.