L'islamophobie qui s'exprime ouvertement en Europe n'épargne pas l'Allemagne où des partis et organisations d'extrême droite et pas seulement organisent des marches et manifestations qui inquiètent par l'ampleur de la participation populaire. Mais contrairement aux autorités françaises qui s'en tiennent à une condamnation verbale aussi molle qu'équivoque de cette islamophobie dont pâtit la communauté musulmane de leur pays, celles de l'Allemagne, le président de la République et la chancelière Angela Merkel, se sont spectaculairement mobilisées pour faire barrage à son extension dans leur pays. Les deux plus hautes autorités allemandes ont en effet pris la fête d'une contre-manifestation à celle qu'organisent les islamophobes qui a drainé dans la capitale Berlin pas moins de cent mille participants. En France où pourtant l'islamophobie est en train de prendre une tournure grave car donnant lieu à des passages à l'acte violents et criminels contre les lieux de culte musulmans et les membres de cette communauté, les autorités qui prétendent être animées de la même fermeté à réprimer les manifestations et propos islamophobes qu'elles mettent à combattre l'antisémitisme se contentent d'en appeler à la tolérance et au respect des différences. Qu'elles soient sans concession et réactives contre l'antisémitisme dont l'expression est une insulte aux conscience et intelligence des êtres humains normaux, l'on ne peut qu'approuver et applaudir. Mais l'odieux de l'islamophobie qui imprègne désormais sans retenue des pans de la société française et transparaît dans les discours d'une partie de la classe politique et les commentaires d'une certaine presse hexagonale, ne le cédant en rien à celui qui caractérise l'antisémitisme, ne semble pas pourtant susciter chez ces autorités la volonté et la détermination d'agir et de mobiliser contre lui. L'on sent au contraire qu'elles sont réticentes à les afficher. Sinon comment comprendre que tout en promettant de combattre l'expression et les manifestations de ce nauséabond et mortifère sentiment, elles enrobent leurs engagements en la matière par la prétendue «nécessité» de comprendre les «raisons objectives» qui font basculer des citoyens français dans l'islamophobie. A quand donc une marche imposante vouée à démontrer le rejet officiel et populaire de la France de l'islamophobie stigmatisante pour près de six millions de ses citoyens, dont les Hollande, Valls et autres hauts dignitaires de la République laïque et de l'égalité et de la fraternité prendraient la tête du cortège ? De cette France-là l'on n'attend pas moins et c'est bien à elle en premier que nous paraît avoir été émise la proposition du président turc Recep Tayyip Erdogan d'organiser une marche internationale contre l'islamophobie. Mais pour l'heure ce n'est pas de la France que nous vient le message que l'on ne doit pas être moins intransigeant dans le rejet de l'islamophobie que celui que l'on manifeste contre l'antisémitisme. Il nous vient d'Angela Merkel, des autorités et du peuple allemands.