La presse, tous supports confondus, est appelée à faire des efforts en matière de spécialisation des journalistes assurant la couverture des affaires de justice. La justice, quant à elle, et plus précisément le corps de la magistrature, doit sortir de sa bulle, s'ouvrir sur les «autres», mieux communiquer et savoir «coexister» avec les médias. Certes, il y a deux logiques, a priori «parallèles». Les magistrats ont besoin de temps et de distance pour rendre justice, alors que les journalistes ont la volonté d'agir dans l'heure dans un souci de recherche de la vérité, de la démocratie, et pourquoi pas un «scoop» si l'affaire du jour en vaut la chandelle. Or, ces logiques soulèvent un problème : celui du secret de l'instruction. Si une affaire fait la Une des journaux, il est difficile de ne pas porter atteinte à la présomption d'innocence. On constate que même si un non-lieu est prononcé, la couverture médiatique d'une affaire laisse planer un doute dans l'opinion publique. Le secret de l'instruction, qui est une ligne rouge pour tout un chacun et non seulement pour les gens de la presse, est vécu par certains journalistes -à tort ou à raison- comme une manière d'être tenu à l'écart d'une affaire. Ceci n'est qu'une facette, vue d'un angle étroit de la relation -il est vrai, difficile à cerner- entre la justice et la presse. L'initiative de la cour d'Oran, et de manière générale celle du secteur judiciaire sous le ministre de la Justice, Garde des sceaux, M. Tayeb Louh, visant à «créer des espaces de contact et d'échange entre l'institution judiciaire et la famille de la presse, à l'échelle locale, et à promouvoir le travail d'information dans ces aspects liés à la couverture des activités de la justice» est, sous quelque angle qu'on l'aborde, louable à plus d'un titre. La journée d'études, d'échange, de débat et de mise en contact, qu'organisera la cour d'Oran demain jeudi 30 avril au siège du tribunal d'Oran à Cité Djamel au profit des professionnels de la presse locale, est un autre acte à mettre au compte des bonnes actions de la justice pour une meilleure relation avec les médias, avec comme intérêt commun la justice et la démocratie, et donc un Etat de droit. L'objectif concret de telles rencontres, en fait, c'est d'aller vers la spécialisation des journalistes à la couverture des affaires soumises aux tribunaux, de même que le confortement de la relation entre la justice et les médias, qui sont la pierre angulaire d'un Etat moderne. D'aucuns estiment que l'initiation de pareilles rencontres, entre la justice et les professionnels de la presse, constitue un apport important à la formation des journalistes dans ce qui a trait aux activités du secteur. La liberté d'expression et les garde-fous du travail journalistique dans les chartes internationales et la loi sur l'information, le secret d'instruction et d'investigation et la garantie de la présomption d'innocence et l'inviolabilité de l'intégrité morale et la vie privée d'autrui, les délits de presse, l'accès aux sources d'information et le respect du secret professionnel, feront, entre autres thèmes, l'objet de conférences animées par des magistrats de siège, d'instruction et de parquet, qui seront suivies de débats, et ce en présence du président de la cour d'Oran, Ahmed Medjati, et du procureur général, Mhamed Bekhlifi.