Il y a le feu dans les marchés des fruits et légumes. Une virée, hier matin, au marché couvert du centre-ville de Tiaret, baromètre de la mercuriale locale, nous a permis de mesurer la «surchauffe» qui prévaut sur les étalages, sous le regard du chaland, comme hébété. Avec une fréquentation en baisse «depuis plusieurs semaines déjà» se plaint un légumier, la lecture des prix affichés donne le tournis. A commencer par ce «fruit du pauvre» qu'est la pomme de terre, proposée entre 50 et 60 dinars, la tomate à 60DA le kilo, la carotte (60), le navet (50) et l'oignon à 80 DA. Au rayon des «produits interdits» pour la ménagère, figurent en bonne place «sa majesté» la courgette culminant à 200 DA le kilo, talonnée de près par les haricots verts, proposés à 180 DA le kilogramme. Si les légumes sont frais et de bonne qualité, il n'est pas possible au chaland de s'approcher des étals sans se brûler les doigts. Un légumier, à l'entrée du marché propose ses produits à la criée, pour attirer des clients, de plus en plus rares. Avec des étalages propres et bien rangés, le légumier, le sourire forcé, «fourgue» des aubergines de piètre qualité moyennant 120 DA le kilo, des choux fleurs à 90 DA, et des artichauts à 130 DA le kilogramme contre 150 DA pour le poivron. «Au rythme où vont les choses, bientôt nous devrons jeûner toute l'année», ironise, l'air surpris, un nouveau retraité du secteur de l'enseignement. Une tournée au marché des fruits et légumes de «Volani», au sud de la ville, confirme la tendance à la hausse générale des prix, annonciatrice d'un avenir difficile pour les moyennes et petites bourses. D'autres légumes narguent de leur «sommet» le chaland au portefeuille «essoré». L'ail, ingrédient indispensable dans le couffin de la ménagère, est proposé à 200 dinars le kilo. Le citron joue, lui aussi, à la star et ne se fait pas céder à moins de 140 dinars le kilo. La folle sarabande des prix règne en maîtresse du logis dans pratiquement tous les marchés de la ville et toute la région de Tiaret. Mais la hausse est encore plus perceptible aux rayons des fruits de saison. L'orange est hors de prix à plus de 180DA le kilo. Selon l'avis de ceux au fait des choses du monde agricole, cette hausse des prix va encore se poursuivre pour toucher d'autres produits. «Il faudra s'attendre à une flambée des denrées alimentaires dans les prochaines semaines», s'inquiète un mandataire du marché de gros de la route de Frenda. «Il y a une espèce d'affolement sur le marché qui est très sensible aux inquiétudes et aux incertitudes qui pèsent sur l'économe nationale», estiment des spécialistes, ajoutant que cet affolement va toucher graduellement d'autres produits. LE POULET «DEPLUME» LA MENAGERE Au chapitre des produits carnés, c'est carrément le feu sur les étals des bouchers. Jugez-en : si la viande ovine franchit le « seuil psychologique » des 1400 dinars le kilogramme, contre 1 000DA pour le bovin, les viandes blanches suivent une courbe ascendante, atteignant jusqu'à 350 dinars pour le poulet évidé et 450DA pour la dinde. Saâd, un éleveur avicole de la localité voisine de Karman, dans la proche banlieue de Tiaret, explique cette hausse « rédhibitoire » des viandes blanches par la baisse du taux de mortalité du poulet vivant, durant la période hivernale, « contrairement aux période de chaleur, où la mortalité est importante » explique-t-il. « Pendant toute la période hivernale, les aviculteurs, en proie à nombre de difficultés, augmentent les prix pour compenser les pertes de la période estivale », ajoute-t-il. Toujours selon notre interlocuteur, qui exploite un parc avicole, le poulet est cédé sur pied à 230 DA/pièce contre 310DA évidé en prix de gros. Sur les étals des bouchers, les prix vont jusqu'à 350DA pour le poulet et 460DA pour la dinde, autrement dit « la marge bénéficiaire des bouchers est plus importante que celle des aviculteurs », nous confie-t-il. Si pour d'autres aviculteurs, les prix des viandes blanches ont pris leur envol à cause de l'envolée de l'aliment de bétail, pour Mechri, un aviculteur de la région de Frenda, les prix du poulet pourraient augmenter davantage, jusqu'à 400, voire 420DA le kilo, d'ici à l'automne prochain. Il faut que cette situation intenable cesse », dénonce un membre de l'association locale de protection du consommateur. « Nous comptons organiser une journée sans achats pour mettre les autorités devant leurs responsabilités », menace-t-il. De quoi mettre le moral de la ménagère au ras des pâquerettes !