Au-delà de la situation économique préoccupante de l'Algérie, à l'instar des pays producteurs de pétrole qui ne dépendent que de cette ressource, c'est l'échéance présidentielle qui approche à grands pas qui, paradoxalement, taraude la classe politique ! Il faut se rendre à l'évidence, ce n'est pas tant la « relance économique» qui préoccupe les autorités en charge des affaires du pays ni les partis politiques, mais plutôt la mise en place du décor pour la présidentielle de 2019. Tout leur savoir-faire semble avoir été investi dans cette entreprise politique devant assurer une succession au pouvoir en place ou sa reconduction. Au grand dam des ménages qui s'apprêtent à vivre une année 2018 des plus pénibles, même si la planche à billets va battre son plein, pour assurer les salaires des fonctionnaires et satisfaire les demandes économiques et sociales «urgentes». Pour autant, la tâche ne sera pas facile pour les candidats parmi les chefs de partis et les personnalités nationales, désireux d'aller à la rencontre de leur destin, bien avant l'heure selon Djamel Ould Abbès, le secrétaire général du FLN, qui rappelle que «le président de la République est bel et bien en poste et qu'il a, plus que jamais, l'intention d'aller jusqu'au bout de son mandat !». Les grandes manœuvres ont, semble-t-il, commencé dans les états-majors des partis en perspective de l'élection présidentielle de 2019 et l'après-Abdelaziz Bouteflika, et ce n'est pas lui faire offense que de le dire, est conjugué au présent par certains candidats, dans et en dehors du pouvoir qui commencent, dès à présent, à affûter leurs armes en perspective de 2019. Pour quelques-uns d'entre eux, ils ont commencé à y penser bien avant le 4e mandat, mais ils ont dû vite déchanter face à la réactivité du président en exercice qui a décidé de rempiler, pour être ensuite réélu le 17 avril 2014. Ils sont, globalement, militants de l'opposition, où l'on recrute les plus impatients présidentiables : Abdelaziz Belaid qui a dit que pour lui « faire de la politique c'est forcément aspirer à prendre le pouvoir », Abdallah Saâdallah Djaballah malgré son «soi-disant» retrait de la présidence de son parti, Ahmed Benbitour, voire même Mouloud Hamrouche. Il y a aussi Ali Benflis qui ne désespère pas d'y aller. Le candidat malheureux des dernières élections peine à l'évidence à s'affirmer comme le chef de file de l'opposition. Le titre lui est contesté par le chef du MSP, qui, après avoir repris les rênes du parti tente de se légitimer comme unique chef des islamistes en déroute, à en juger par leur score aux élections locales. Aujourd'hui, ces candidats-là ne s'en cachent plus ; oui, ils y pensent chaque matin à cette échéance de 2019 et pas qu'en se rasant. Ils se recrutent dans les partis qui participent régulièrement aux élections présidentielles et qui, en quelque sorte, contribuent à la mise en place du décor des présidentielles : FNA, PT, AHD 54, avec les inévitables Louisa Hanoune, Moussa Touati et Ali Fawzi Rebaïne. Et aux observateurs de s'interroger sur les capacités des opposants qui ambitionnent d'investir El Mouradia : - Iront-ils avec un candidat unique ou bien c'est le chacun pour soi qui va prévaloir ? - Peut-on aussi conférer un brevet de représentativité à l'opposition «désunie» au regard de la faiblesse de son enracinement social réel, du caractère parfois squelettique du nombre de ses militants, de la pauvreté de sa doctrine et de l'indigence de son programme ? - Et si l'on ajoute à cela les «egos» démesurés de ses chefs, ce n'est pas demain la veille qu'émergerait, de leurs rangs, une candidature consensuelle parmi les candidats déclarés ou potentiels. - A moins que l'organisation d'une «primaire» n'intervienne pour mettre sur le même pied d'égalité les candidats possibles ? Le pays semble prisonnier d'un système qui, fatalement, conduira à une élection présidentielle où le léger comme l'incompétent pensent qu'il suffira de se présenter, ou de se retrouver au second tour face au candidat du pouvoir, pour gagner. Et l'exemple nous est donné par l'inénarrable Rachid Nekkaz qui ne manquera pas l'occasion de se manifester et de faire parler de lui. Dans les arcanes du pouvoir, l'agitation n'est pas visible ou peu ou prou, car elle est plus feutrée, pour ne pas dire secrète pour l'instant. Ses acteurs, qui font encore dans le «politiquement correct», ont pour noms Ahmed Ouyahia, Abdelmalek Sellal et Chakib Khelil, voire Lakhdar Brahimi. La rumeur sur une probable candidature du dernier nommé a circulé mais aussitôt démentie par l'intéressé. Le doute persiste néanmoins et d'aucuns accréditent cette ambition sachant que Lakhdar Brahimi ne partira pas pour faire 10 ans à la tête de l'Etat mais juste un mandat, manière d'assurer une succession «apaisée» à son compagnon et camarade Abdelaziz Bouteflika, comme il s'est plu à le qualifier lors d'une interview accordée à Berbère TV. L'autre potentiel candidat, en l'occurrence le Premier ministre Ahmed Ouyahia même s'il avance «masqué», fait figure, désormais, de potentiel favori pour la course à la présidentielle. Maintenant plus que jamais, d'autant plus qu'il a entre les mains l'administration et les walis sans compter la machine électorale du RND. Pour autant, quelques questions se posent quant à son avenir de Premier ministre: va-t-il se consacrer, désormais, à préparer le terrain en perspective d'une éventuelle candidature de l'actuel chef de l'Etat ou se déclarer dans le cas où ce dernier renoncerait à se représenter ? Difficile à dire, d'autant plus que les observateurs accordent plus d'attention aux petits pas de Chakib Khelil qui, semble-t-il, coup sur coup, a fait sa déclaration de patrimoine tout juste après avoir accordé un entretien de plus de deux heures à la chaine Ennahar TV, proche des cercles du pouvoir où il a fait, en direct, une étrange offre de service : il dit «se tenir à la disposition de son pays» ! L'homme, c'est vrai, dispose d'un carnet d'adresses des plus étoffés, en plus de son expérience indéniable dans le monde du pétrole. Devant la persistance de la crise, les autorités, dit-on, réfléchissent sérieusement au retour au premier plan de Chakib Khelil qui vient, d'ailleurs, de tacler Ahmed Ouyahia et son mode de financement non conventionnel ! Il est clair que ces deux hommes sont peut-être programmés pour jouer des rôles importants dans une situation économique et sécuritaire très difficile, tant à l'intérieur qu'à l'international : 1. L'ancien ministre de l'Energie, parce qu'il bénéficie d'un préjugé favorable des institutions financières internationales, le FMI notamment, et qu'il serait susceptible d'en obtenir les meilleures conditionnalités en cas de retour à l'endettement externe du pays. 2. Le Premier ministre, parce qu'il est l'homme à poigne indispensable pour conduire un gouvernement de crise. Et forcément impopulaire. L'autre présidentiable du «système» se nomme Abdelmalek Sellal qui a joué le rôle de la «doublure» du président. Il a été sa voix, ses jambes et le premier représentant du président face à tous ses adversaires politiques. Il s'est forgé une stature de tribun et d'homme d'Etat. Il se murmure que n'eût été le veto de puissants militaires, Abdelmalek Sellal était sur la trajectoire pour succéder au président de la République, avant bien sûr que celui-ci ne décide de postuler en 2014. L'homme qui pendant la dernière campagne présidentielle a affirmé qu' «il n'était candidat à rien» est pourtant compatible avec tous les pôles du pouvoir et en tous les cas il semble jouir de la confiance et de l'estime du président. Mais est-ce que cela ferait de lui un présidentiable potentiel, lui qui aurait lâché cette phrase rapportée par la presse : «le service que l'on pourrait me rendre, c'est de me donner une ambassade le plus loin possible» ? Sur qui faut-il miser alors sachant que le système va se succéder à lui-même ? En d'autres termes, on ira vers le changement mais dans la continuité, en l'absence d'un candidat «macronien» qui surgirait de nulle part pour mettre tout le monde «en marche» : 1. Lakhdar Brahimi, lui qui serait partant pour un seul mandat ? 2. Chakib Khelil «l'homme des Américains», dit-on ? 3. Abdelmalek Sellal qui laisse entendre que la présidence «c'est l'endroit à fuir..» ? En tous les cas, la bataille est lancée entre les hommes du président qui, tout en faisant corps avec lui, pour la galerie pensent les observateurs, ont mis le curseur sur 2019 ! On n'en est pas encore là, et le SG du FLN, Djamel Ould Abbès, vient de «doucher» tout son monde en révélant qu' «après Dieu, il connait le nom du futur président de la République et néanmoins candidat du FLN» ! Et c'est le nom d'Abdelaziz Bouteflika qui est dans tous les esprits ! Pour garder la maitrise du débat et priver les détracteurs de son immuabilité et les prétendants à sa succession de ce stratégique élément d'information, le président de la République ne fera rien pour faire connaitre sa décision, a rappelé un chroniqueur ! Et même si pour un motif irréductible, il devait relancer à un mandat supplémentaire, il gardera le silence sur ses intentions pour minimiser les effets des manœuvres et chahuts qui pourraient venir perturber le passage de flambeau qu'il aurait, forcément, concocté, poursuit le journaliste ! Pour l'instant, le président de la République n'envisage pas de transmettre «le code nucléaire» ni à l'un ni à l'autre des dauphins désignés, encore moins à son meilleur «ennemi» Ali Benflis et cela doit, beaucoup, l'amuser. Le maître des horloges, c'est lui ! Il maitrise les agendas. Et tant qu'il ne s'est pas déclaré, rien n'est joué pour 2019.