Le ministre des Affaires étrangères Abdelkader Messahel est formel : l'Algérie n'ouvrira jamais de centres de rétention pour les migrants, en partance vers l'Europe. Une déclaration officielle de l'Algérie, face à une énorme pression de certains pays européens du Sud, qui voudraient que des pays méditerranéens adoptent leur politique migratoire musclée, dont l'Italie. Le ministre de l'Intérieur italien Matteo Salvini, chef de file de l'extrême droite, a défendu, lundi, lors d'un déplacement en Libye, l'idée d'installer des centres d'accueil pour migrants dans le pays. «Nous soutiendrons, d'un commun accord avec les autorités libyennes, la mise en place de centres d'accueil et d'identification de migrants, au sud de la Libye, à sa frontière externe, pour l'aider autant que l'Italie à bloquer la migration», a-t-il ajouté, sans préciser dans quels pays ces centres devraient être installés. Pour M. Messahel, il est donc «exclu que l'Algérie ouvre une quelconque zone de rétention. Nous sommes déjà confrontés aux mêmes problèmes», a-t-il indiqué, dans un entretien à la radio RFI. Il a ajouté que «nous procédons à des reconductions, mais nous le faisons selon des arrangements que nous avons avec les pays voisins». Et, «lorsqu'il s'agit de la migration clandestine, il faut que les choses soient bien comprises : nous sommes confrontés aux mêmes problèmes», et «nous connaissons les mêmes phénomènes». Pour le chef de la diplomatie algérienne, «nous devons lutter contre la migration clandestine, dans le cadre des conventions des Nations unies, dans le cadre de l'arrangement avec les pays d'origine et les pays de transit», précisant que «c'est ce que nous faisons, en tous les cas, en tant qu'Algérie». Pour autant, le ministre algérien a souligné, sur la politique migratoire adoptée par l'UE, que «je ne m'intéresse pas directement à ce que les Européens peuvent faire». «C'est leur affaire», a-t-il dit, estimant que «les Européens ont suffisamment de capacités, de moyens et d'imagination pour gérer ce genre de situation». Quant aux critiques des ONG sur la gestion, par l'Algérie, de la crise migratoire, notamment au sud du pays, il a répondu que cela «n'engage» que ces ONG, mais que ces critiques «ne sont pas innocentes». Selon lui, «c'est une campagne que certains essaient de mener contre l'Algérie», avant de relever que «nous sommes très sereins parce que, ce que nous faisons, nous le faisons dans le cadre du respect de nos lois. Nous le faisons dans le cadre du respect de la dignité humaine et nous le faisons dans le cadre de la concertation avec les pays de transit». Sur le dossier de la crise libyenne, il a estimé que les Libyens ont «suffisamment» de capacités pour régler leurs problèmes, et pour lui, le processus de paix «doit être un processus libyen», car le retour de la paix, dans le pays doit être «le processus des Nations unies. Je crois que même la réunion de Paris l'a conforté», a-t-il dit, avant de préciser que ce processus doit être surtout «un processus libyen. Il faut qu'il y ait une appropriation, par les Libyens, de leur avenir, un processus qui préserve l'unité, la stabilité de ce pays». «Paris est venu renforcer ce courant, eh bien nous l'avons soutenu». Pour autant et face à une reprise des combats dans le croissant pétrolier, entre milices rivales, M. Messahel a rappelé que «nous n'intervenons jamais dans ces affaires. Nous pensons que les Libyens ont, suffisamment, de capacités pour régler leurs problèmes. Ce que nous regrettons, c'est que ce genre de situation ne concourt pas à ce que la paix et la stabilité reviennent rapidement», a-t-il estimé, admettant que la Libye a repris la production de pétrole à «peu près» au même niveau que ce qu'elle faisait avant 2010-2011. «Les Libyens sont capables de trouver des formules pour s'en sortir», a-t-il dit. Sur l'Opep et sa dernière décision de hausse de la production, M. Messahel a expliqué que cela n'a pas un impact sur l'Algérie : «il est évident que les prix sont ce qu'ils sont aujourd'hui. Est-ce que cela a des conséquences, une baisse ? Je ne pense pas», a-t-il dit, affirmant qu'au sein de l'Opep, l'Algérie n'a «aucun problème» avec certains membres de cette organisation. Par ailleurs, le chef de la diplomatie algérienne a expliqué que le processus de paix au Mali «avance, et il avance très bien», faisant remarquer qu'«il ne faut pas confondre entre la mise en oeuvre des accords de Bamako, nés du processus Alger -donc la solution politique avance très bien-, et la lutte contre le terrorisme.» «Ce sont deux situations différentes. Il y a un processus politique qui avance», a-t-il encore expliqué, affirmant qu'il faut «faire aboutir le processus politique pour que réellement la lutte antiterroriste soit une lutte beaucoup plus efficace». Quant à la présence dans le sud algérien du terroriste malien Iyad Ag Ghali, chef du groupe Ansar Eddine', le ministre a expliqué que «nous n'avons pas d'informations comme quoi il se cache en Algérie. Je l'ai dit et répété aux officiels français et je l'ai répété à vos collègues, ces sources-là n'engagent que leurs déclarations», a-t-il affirmé.