La Commission européenne a complaisamment accordé satisfaction au Makhzen sur le dossier de l'accord de pêche UE-Maroc sans pour autant que Rabat cesse le chantage et la pression sur l'ensemble européen. Ce qu'a confirmé la subite prise d'assaut par près d'un millier de migrants de la clôture séparant le territoire marocain de l'enclave espagnole de Ceuta mais aussi l'Afrique de l'Europe. Il est impensable que la ruée de ces migrants s'est produite à l'insu des forces de sécurité marocaines déployées le long de la double clôture s'éparant leur pays de l'enclave espagnole. Il n'est pas si incertain que ces forces de sécurité ont reçu consignes de laisser faire. Le chantage à une migration massive pouvant atteindre l'Europe à partir de la frontière du Maroc avec les enclaves africaines de l'Espagne ressurgit systématiquement brandi par Rabat quand les vis-à-vis européens montrent quelques réticences à entrer dans les vues marocaines. Ce ne peut être un hasard si la frontière marocaine avec l'Europe soit soudainement devenue si poreuse pour des migrants qui en ont été le reste du temps tenus éloignés par la répression rigoureuse exercée à leur encontre par la police du Makhzen. Cela s'est produit presque aussitôt après que la Cour européenne de justice venait de confirmer la validité de ses arrêts sur le dossier de l'accord de pêche UE-Maroc par lesquels elle a statué qu'un tel accord ne peut inclure les eaux jouxtant le territoire du Sahara occidental en raison qu'en droit international celui-ci est une entité territoriale séparée et distincte du royaume marocain. En montrant qu'il n'hésitera pas à laisser sa frontière avec l'Union européenne devenir la voie de passage d'une migration clandestine massive, le Makhzen pense parvenir à «effrayer» les institutions de l'UE que sont son Parlement et sa Cour de justice moins gangrenées que l'est la Commission européenne par la propagande et les largesses du Makhzen. Rabat a eu beau crier «victoire» après le paraphe de l'accord de pêche renégocié avec Bruxelles, les autorités marocaines savent néanmoins que l'affaire est loin d'être gagnée pour leur pays et dans l'enceinte du Parlement européen et dans celle de la Cour de justice. La ruée de migrants clandestins facilitée intentionnellement par le Makhzen a été destinée à faire comprendre aux deux institutions européennes ce qu'il pourrait en coûter à l'union continentale si elles n'accordent pas leur blanc-seing à l'accord de pêche renégocié par la Commission de Bruxelles. La question qui se pose est celle de savoir jusqu'à quand et pourquoi l'Union européenne acceptera qu'un Etat, le Maroc en l'occurrence, exerce sur elle chantage et pression de façon aussi cynique que dénuée de toute précaution à même de sauver les apparences.