Le collectif Nabni a comparé huit transitions démocratiques considérées comme concluantes, menées ces quarante dernières années à travers le monde et présente des leçons de ces expériences et des premières pistes de réflexion pour l'Algérie. En effet, Nabni s'est penché dans son 4ème chantier de la refondation sur la période de transition sur huit transitions démocratiques concluantes qui ont toutes eu lieu durant le dernier quart du siècle précédent (Brésil, Chili, Espagne, Indonésie, Mexique, Philippine, Pologne). A l'exception de la Tunisie (2011). Quatre grands défis se présentent aux acteurs du processus de transition : préparer la transition, démanteler le « système » et ses pratiques en préservant le fonctionnement de l'Etat, concrétiser et gérer le transfert du pouvoir et ancrer et institutionnaliser la démocratie naissante. Confrontés à ces défis émaillés de moments décisifs, les dirigeants des transitions étudiées ont dû faire preuve d'anticipation, de réactivité, se sont heurtés à de fortes résistances et ont pris des décisions cruciales, précise Nabni. Pour le collectif, il est impératif de construire la coalition des forces du changement la plus large possible. Les transitions étudiées ont réussi parce qu'elles ont créé du compromis. Le compromis ne plaît à personne mais arrange tout le monde. Il n'existe pas actuellement, selon Nabni, de force structurante majeure capable de canaliser les revendications populaires. Le paysage sociopolitique algérien se caractérise par une trop faible représentativité des partis de l'opposition face au pouvoir politique, un déficit d'organisation des corps intermédiaires et l'absence d'organisations de poids de la société civile. De nouvelles forces du changement devront se structurer, créer un consensus et se donner l'objectif commun de mettre en place un Etat de droit et mettre fin aux pratiques de l'ancien système. De nombreux collectifs citoyens et coordinations estudiantines se sont créés à la faveur du mouvement du 22 février. En l'absence d'une réaction forte des partis politiques de l'opposition, ces organisations, soudées par l'idée démocratique, pourraient être une alternative à ces acteurs traditionnels pour représenter le mouvement populaire et porter ses revendications. Aussi, le collectif précise que toutes les transitions étudiées n'ont pas forcément abouti à la rédaction d'une nouvelle Constitution. Dans la majorité des cas de transition par le haut, au Chili, au Mexique et en Indonésie la Constitution a été amendée pour améliorer son caractère démocratique et garantir les libertés individuelles et collectives. Au Brésil, le débat sur une nouvelle Constitution s'est tenu 13 ans après le début de la transition et a duré deux ans. A la crise politique s'ajoute très souvent un contexte de crise économique à gérer durant la transition. Les enjeux économiques sont prioritaires et vont de pair avec la mise en place d'un Etat de droit et une justice sociale. Le contexte économique et le niveau d'adhésion de la population orientera le rythme et la profondeur des réformes à engager. La majorité des transitions démocratiques réussies ont initié des réformes économiques conjuguant ouverture, discipline budgétaire et justice sociale. La Pologne a opéré sa transition économique en appliquant une véritable thérapie de choc pour sortir du modèle communiste. Les pays latino-américains (Chili, Brésil, Mexicain) ont privilégié une politique dite de croissance économique dans l'équité. Sur la réforme de la justice dans sa structure, Nabni pense que son organisation et ses nominations est un défi majeur à mener dès les premiers mois d'un mandat de gouvernement de transition. L'indépendance du pouvoir judiciaire et le renforcement des prérogatives du pouvoir législatif doivent garantir le rééquilibrage des pouvoirs. Comme septième enseignement, Nabni estime qu'il faut garantir un cadre institutionnel ouvert aux partis politiques et aux corps intermédiaires. Les partis politiques et les corps intermédiaires sont le lien entre le peuple et le gouvernement. Ils jouent un rôle essentiel dans les transitions démocratiques. Et enfin, il faut placer les forces armées sous autorité civile graduellement, ou dès que possible, les pouvoirs de transition ont entamé des négociations avec les chefs militaires et les responsables des services de renseignement afin de placer les forces armées et appareils de sécurité sous contrôle civil.