L'état des nouvelles villes fait toujours débat et les différents gouvernements qui se sont succédé n'arrivent apparemment pas à trouver la bonne formule pour clore définitivement ce dossier. Dimanche dernier, le Premier ministre, Noureddine Bedoui, a présidé une réunion du Conseil interministériel (Intérieur, Finances, Energie, Habitat, Ressources en eau, Travaux publics et des Transports, Environnement) consacrée justement à l'examen de l'état des nouvelles villes en l'occurrence Sidi Abdallah (Alger), Bouinane (Blida), Boughezoul (Médea-Djelfa), El Menia (Ghardaïa), Hassi Messaoud (Ouargla) ainsi que les pôles urbains Ali Mendjeli et Aïn Nehas (Constantine), Draa Errich (Annaba) et Ahmed Zabana (Oran), et des perspectives de leur promotion. Cette réunion a été consacrée à l'examen des « problématiques qui entravent le parachèvement des nouvelles villes et pôles urbains, dans notre pays», indique le communiqué des services du Premier ministre. Sujet extrêmement sensible, les villes nouvelles sont un autre enjeu urbanistique de la politique du pays. En juin 2018, l'ex ministre de l'Habitat, de l'Urbanisme et de la Ville, Abdelawahid Temmar, avait annoncé que le dossier devait être soumis à un conseil interministériel en vue de la préparation de l'étape post-achèvement des travaux et l'arrêt du programme de gestion et d'organisation administratif. Parmi les aspects à débattre «les enveloppes budgétaires pour les travaux d'aménagement et la levée des entraves persistantes », avait alors indiqué le ministre lors d'une plénière de l'APN. Pourtant, et malgré les statistiques lénifiantes du ministre, les interrogations ne cessent d'accompagner ces projets qui ont déjà montré toutes leurs limites. Conçues pour remplacer ou du moins désengorger les anciennes agglomérations, ces villes nouvelles sont carrément qualifiées par des spécialistes en sociologie de « groupement de logements perdu dans la nature » ou d'« une duplication à l'infini ». Les exemples d'un échec d'une politique d'urbanisation sont nombreux, partagés entre Sidi Abdallah et Ali Mendjeli à Constantine, symboles de projets non encore achevés où l'inexistence d'espace public proprement dit offre l'image de normalité d'une ville. « Les projets de villes nouvelles sont mal partis, dès le départ, en Algérie», se désolent des architectes dont certains, comme Mohamed Larbi Marhoume, évoquent l'inexistence d'un dessin de la ville. « Nous n'avons pas réfléchi à l'espace public. Quand bien même on pourrait avoir une résidence, une mobilité et un emploi en ville, mais cette dernière a un devenir incertain si l'espace public est inexistant », affirmera-t-il à un quotidien national. On parle par exemple de la ville de Sidi Abdallah, créée juridiquement dans les années 1980 par une agence locale, sous tutelle de la wilaya d'Alger, et qui n'est toujours pas achevée à cause de raisons procédurales et techniques, commente-t-on. L'autre cas problématique est celui de la ville nouvelle de Ali Mendjeli érigée pour désengorger Constantine et caser les populations des bidonvilles constantinois ainsi que celles bénéficiant des différents modes de logements. D'une conception urbanistique sans âme et inintelligente, Ali Mendjeli est occupée déjà par plus de 300.000 habitants et souffre du manque d'infrastructures. Ce concept des villes nouvelles, même s'il n'est pas récent, est à mille lieues de ce projet de rendre « intelligentes » des villes algériennes. Un thème développé par des experts lors d'une rencontre tenue à Alger, en janvier 2017, et intitulée : « Vision future des villes algériennes ». Pourtant, la priorité n'est pas tant de rendre nos villes « intelligentes » mais simplement vivables, agréables, propres et sécurisées. D'arrêter de clochardiser l'environnement urbain en distribuant des permis de construire à des immondices en béton et à ériger des cités-dortoirs pour y caser les mal-logés. Lors de la rencontre de dimanche dernier, Bedoui a appelé à l'« impératif de parachever les projets accompagnant les programmes de logements en cours de réalisation tels que les établissements scolaires, les réseaux de raccordement en eau, en gaz, et en électricité, ainsi que les réseaux d'assainissement et les routes, à l'occasion de la prochaine rentrée scolaire, notamment dans les villes de Sidi Abdallah où la réception de 13.000 logements est attendue cette année, et de Bouinane qui sera renforcée de 9.000 logements ». A cet effet, le Premier ministre a décidé de plusieurs actions dont la création d'un comité ad-hoc au niveau de ses services chargé du suivi des projets de réalisation des nouvelles villes et pôles urbains. Par ailleurs, le ministre de l'Intérieur et les ministres concernés ont été chargés d'œuvrer à accélérer la concrétisation de la décentralisation de la gestion des nouvelles villes et pôles urbains, notamment à travers l'installation des nouvelles wilayas déléguées et leurs directions exécutives à Sidi Abdallah, Bouinane, Drâa Errich et Ali Mendjli, dans les plus brefs délais.