Après une relative accalmie, la tension entre le Syndicat national des magistrats (SNM) et sa tutelle est montée d'un cran, ce mardi, suite au rejet par le Conseil supérieur de la Magistrature (CSM) de la majorité des recours introduits par les magistrats concernés par le dernier mouvement décidé par le CSM, lors de sa session du 24 octobre 2019. En effet, sur un total de 1454 recours introduits par les magistrats, seuls 189 ont été approuvés. Les autres ayant été rejetés «pour non fondement», a indiqué le Conseil supérieur de la Magistrature (CSM) dans son communiqué rendu public lundi. Une décision qui n'a pas tardé à faire réagir le Syndicat national des magistrats (SNM) qui, dans un communiqué virulent diffusé le lendemain, a accusé le CSM de «légèreté» dans son traitement des recours, qui prouve, selon lui, «pour la énième fois que le juge demeure l'otage des bandes et des manœuvres dans son parcours professionnel et sa situation sociale, avec une préméditation décidée dans des chambres fermées, loin des mécanismes juridiques et des outils de transparence». Le ton est donc donné ouvrant la voie à un nouveau bras de fer entre les magistrats et leur tutelle. Aussi, ajoute le Syndicat national des magistrats, dans son communiqué, «les organes du syndicat ont été ciblés de manière flagrante, en procédant à la mutation des membres du Conseil national et du Bureau exécutif, en dehors des Cours où ils ont été élus, au mépris des textes régissant l'activité syndicale et qui punissent de prison et d'amendes ce genre d'actes», estimant que le SNM avec sa composante actuelle dérange par «son indépendance sans précédent». Poursuivant sa diatribe contre le Conseil supérieur de la magistrature, le SNM affirme s'être «battu pour que le CSM recouvre l'intégralité de ses prérogatives», mais ce dernier, a-t-il accusé, «a trahi les magistrats en adoptant une position injustifiée légalement et moralement.» «Son communiqué du 25 novembre 2019 démontre la légèreté avec laquelle a été traitée la dernière crise», écrit le syndicat dans le communiqué publié, ce mardi 26 novembre. Le syndicat s'en prend, par ailleurs, au ministre de la Justice Belkacem Zeghmati et menace d'une escalade. «Le ministre s'est dérobé des engagements pris pour la prise en charge des recours et a opté pour le fait accompli, devant les membres du bureau permanent du CSM suivant des critères qu'il a inventés et qu'il a imputés injustement au SNM, en maintenant son injustice historique. Les jours et mois prochains éclaireront tout le monde sur ce qui s'est passé, car la boule de neige grossit et durcit et son prochain mouvement sera sévère. Le reste des revendications attend la concrétisation dans les plus brefs délais et les ajourner donnera lieu à une situation plus tendue qu'il sera difficile de gérer ou de contrôler», menace le syndicat des juges. Dans un début d'escalade annoncé, concernant notamment le recours à la force publique contre les magistrats, le 3 novembre au siège de la Cour d'Oran, le SNM informe qu'une «plainte officielle sera déposée contre les commanditaires et les exécutants de cet acte qui a porté atteinte à l'image de la Justice algérienne devant l'opinion nationale et étrangère». Il est à rappeler, à ce propos, que les forces de l'ordre sont intervenues sur demande du parquet général pour faire face à une tentative d'empêchement de l'ouverture de la session criminelle à la dite cour. Les magistrats grévistes de la Cour d'Oran se sont rassemblés dans l'enceinte même de la Cour et ont tenté par la suite d'empêcher l'ouverture de la session criminelle qui devait avoir lieu dans la matinée. La gendarmerie nationale et la police dépêchées sur les lieux sont alors intervenues. Une scène surréaliste qui s'est déroulée sous les yeux abasourdis de dizaines de citoyens. Des vidéos prises par des témoins présents sur les lieux, largement diffusées sur les réseaux sociaux, montrent en effet des éléments de la gendarmerie nationale en uniforme et équipements antiémeutes en train d'avancer en rangs serrés à l'intérieur même du tribunal, et en face d'eux des personnes, vraisemblablement des magistrats qu'ils tentent de faire reculer.