Les manifestants ont investi, hier, les rues à Alger et dans plusieurs autres wilayas du pays pour exiger un « Etat civil et non militaire » et réclamant « une justice indépendante et une presse libre ». « Le système est plus dangereux que le risque du coronavirus » pouvait-on lire sur une pancarte brandie par un manifestant à Alger. Mais, force est de constater que la mobilisation a connu un certain déclin comparativement aux derniers vendredis. Certes, certains manifestants ont pris leurs « précautions » en mettant des masques de prévention contre le coronavirus, mais la grande majorité parmi eux des enfants étaient à visage découvert, au milieu de la foule. Les éléments des services de la police présents sur les lieux avec un nombre relativement réduit arboraient des masques de protection contre ce nouveau virus. Pourtant des appels ont été lancés via les réseaux sociaux pour suspendre ces marches temporairement. D'ailleurs même parmi les manifestants, certains ont réclamé de suspendre les marches. Sur une pancarte brandie par une manifestante, il était écrit « que pensez-vous de l'idée de reporter les marches jusqu'au 03 avril pour se protéger du risque de la propagation du coronavirus, car le système ne pourra pas nous protéger ? ». Pour certains, l'heure est grave, recommandant d'être vigilants. L'enregistrement de deux décès en Algérie liés au Covid 19 plus 26 cas confirmés, la décision prise par le président de la République de fermer les écoles et les universités a suscité l'inquiétude chez les citoyens. Sur les réseaux sociaux des internautes ont appelé les habitués du hirak à penser à d'autres formes de protestation, les appelant à la sagesse : « La sagesse doit primer ! Il y va de la vie de tous ! Arrêter les marches temporairement ce n'est pas renoncer ! Notamment quand on connaît l'état de nos hôpitaux et que les moyens médicaux sont obsolètes, il vaut mieux s'abstenir » ou « Allah yahdikoum ya nass pour l'amour de vos familles prenez une pause du hirak et songez à d'autres formes de protestation pour maintenir la pression sur ce système ». Convergence ou divergence de vue, les spécialités de la santé à travers le monde appellent à la vigilance car le monde ne fait pas seulement face à une épidémie, mais à une pandémie qui menace déjà un nombre important de pays. Des spécialistes dans la santé en Algérie, parmi eux des habitués du hirak, ont appelé à la vigilance. Sur sa page Facebook, Lyes Merabet, président du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP), a appelé les Algériens et les autorités à prendre au sérieux cette catastrophe sanitaire. C'est aussi l'appel lancé par le professeur en médecine interne Mansour Brouri, un militant au sein du hirak, qui a recommandé « d'éviter les rassemblements de masse qui sont un facteur de contamination si le virus est déjà présent dans la population ». Il précise dans ce message, repris par la page d'Algérie Debout, que « Les hôpitaux algériens et le système sanitaire national ne sont pas du tout préparés à ce genre de catastrophe et de virus ». A Alger, la manifestation a débuté par l'arrestation d'une dizaine de manifestants qui se sont regroupés le matin à la rue Victor Hugo, ainsi que d'autres interpellations opérées près de la Mosquée El Rahma. Les manifestants défient le coronavirus en scandant « Makanach corona, kayan massira » (Il n'y a pas de corona, il y a une marche). Les protestataires ont réclamé la libération de tous les détenus sans exception, en brandissant le portrait de l'ex-policier, Toufik Hassani. Aucun incident majeur n'a été enregistré à Alger durant la manifestation.