Le cadre juridique régissant les relations de travail, qui fait polémique depuis une décennie, revient s'imposer durant cette période inédite, marquée par le confinement imposé par la pandémie du Covid-19, engendrant un changement de la notion de travail avec le risque de fermeture des entreprises et des pertes d'emploi par milliers. Comment s'adapter à ce nouvel environnement socioéconomique très fragile, dès lors que la législation en vigueur n'offre aucune accroche juridique « loyale », ni aux employeurs ni aux travailleurs ? Des voix d'experts commencent à se faire entendre, soulignant l'impératif renforcement du cadre juridique régissant les relations de travail à travers des mesures qui donneraient la permission aux employeurs de mettre en place un mécanisme adaptée à la situation d'urgence, dont le recours au travail partiel et le télétravail, avec tous corollaires sur le plan du contrat de travail et du salaire. Ces mêmes experts soulignent dans ce contexte l'urgence de mettre au point une telle législation, car les employeurs font face actuellement à un effarant vide juridique en matière de gestion du personnel qui pourrait donner lieu à d'innombrables conflits individuels. A commencer par cette obligation faite aux employeurs publics et privés de libérer 50% du personnel des entreprises des secteurs publics et privées dans le cadre de la lutte contre la propagation du coronavirus, dont l'application reste « appréciée » selon les humeurs des uns et des autres. Car, certains employeurs, pour éviter de payer des travailleurs mis au « repos forcé », ont trouvé l'astuce de mettre les concernés en congé, soit en liquidant les reliquats de jours de congé ou d'anticiper le congé annuel. Pas question, donc, de les payer sans travail effectif accompli. Pourtant, le décret exécutif relatif aux dispositions de prévention et lutte contre la Covid-19 du 22 mars 2020, et celui complémentaire datant du 25 mars de la même année, parle dans ce contexte d'un « congé exceptionnel rémunéré » pour la période arrêtée par lesdits décrets, totalement en contradiction, donc, avec la pratique en question qui consiste à mettre les travailleurs concernés en congé annuel ou en liquidant leurs reliquats des congés. Un dossier potentiellement conflictuel, selon les affirmations de juristes, que dire alors du recours au congé sans solde, dont l'idée germe dans certains esprits, soutenus par des experts qui veulent saisir cette opportunité pour réformer un Code de travail élevé au rang de sacre en Algérie, du fait de ses dispositions sociales. Pour mémoire, un nouveau Code de travail est en gestation depuis les années 2000, on affirmait même que ses textes étaient fin prêts ces deux ou trois dernières années, mais personne n'a osé s'aventurer à lui faire voir le jour. Pourquoi ? Tout simplement parce que les syndicats qui s'opposent farouchement à toute nouvelle législation touchant aux sacro-saints acquis sociaux, font planer la menace de la protestation musclée si le nouveau Code de travail n'est pas conforme à ces principes. Situation d'urgence sanitaire ou pas, le moment n'est pas bien choisi pour tenter de forcer un quelconque changement dans la législation de travail. Une législation appelée forcément à connaître de profonds changements, mais pas sans concertation avec les partenaires sociaux et à tête reposée du fardeau coronavirus. Quant à cette conjoncture difficile et inédite, la solidarité reste le maître-mot de la situation.