L'intégration dans la réforme fiscale nationale du principe d'équité mais aussi la numérisation et l'efficacité de l'administration concernée sont, désormais, une nécessité pour mettre l'impôt en adéquation avec les défis de la nouvelle vision économique du pays, a indiqué, hier, à Alger, le Premier ministre, Abdelaziz Djerad. Une vision économique, a-t-il expliqué, basée sur «la promotion des start-ups, de la numérisation et pouvant permettre à notre pays de sortir de sa dépendance aux produits d'extraction et l'intégrer dans la chaîne de valeurs internationales.» Intervenant à l'occasion des Assises nationales sur la réforme fiscale, le Premier ministre a, ainsi, estimé nécessaire pour l'Administration fiscale de prendre en considération le principe d'équité, en faisant en sorte que la charge fiscale soit également répartie, sur les contribuables comme c'est le cas, notamment, pour l'impôt sur le revenu. Ceci, a insisté M. Djerad, doit passer par la lutte contre l'économie parallèle qui constitue «un préjudice pour la conformité fiscale». Il a noté, à ce propos, l'absence de contribution aux recettes fiscales des opérateurs activant dans le circuit parallèle ce qui oblige, a-t-il dit, les opérateurs activant dans la légalité à supporter l'ensemble de la charge fiscale. Selon le Premier ministre, cette disparité «contribue également à réduire l'efficacité des politiques publiques dans le cadre du soutien de l'investissement, car cela constitue un obstacle à la bonne marche de l'Economie nationale», a-t-il souligné. En effet, a-t-il insisté, l'économie parallèle constitue un préjudice pour la conformité fiscale qui hypothèque les efforts de l'Etat visant à relancer et à promouvoir l'investissement, en ce qu'elle bafoue les règles de la concurrence loyale et prive l'Etat des ressources financières escomptées. Dans son allocution, le Premier ministre a précisé que : «l'économie parallèle, malgré tous les efforts déployés par les pouvoirs publics pour faciliter son intégration, continue de bafouer les règles légales, ce qui constitue un préjudice pour la conformité fiscale». Dans ce cadre, le Premier ministre a invité les participants à ces Assises à formuler des propositions et des exposés à même d'assurer la conformité fiscale des contribuables en garantissant un équilibre entre les capacités des opérateurs économiques et les besoins de financement de l'Etat, tout en veillant à asseoir une répartition équilibrée de la charge fiscale. Cette réforme fiscale doit être accompagnée d'une réhabilitation du service public à travers la prise en considération des préoccupations des citoyens, l'éradication de la bureaucratie et la lutte contre toute forme de pratique pouvant, négativement, impacter l'Economie nationale et entraver le processus de sa reconstruction. Numérisation des opérations fiscales Le Premier ministre a aussi relevé l'intérêt pour l'Administration fiscale de s'appuyer sur une vision basée sur la numérisation des opérations fiscales. «La réforme fiscale attendue doit reposer sur une approche basée sur la numérisation des opérations fiscales, avec un mode opérationnel qui permet aux contribuables de contacter, à distance, l'Administration fiscale». Aussi, a-t-il souligné, la réforme de la fiscalité de l'Etat est indissociable de la réforme relative aux Collectivités locales, la fiscalité locale étant la source principale des ressources financières de ces collectivités, a-t-il souligné. «Nous ne sommes pas sans savoir que notre système fiscal qui est de caractère centralisé, exige à l'avenir, de revoir sa structure, de sorte à aller dans le sens d'une participation active des Assemblées locales élues, tant au niveau des wilayas que local», a-t-il ajouté. Le Premier ministre a, en outre, assuré que «la protection juridique et sociale des fonctionnaires de l'Administration fiscale, constitue une des préoccupations majeures des Pouvoirs publics. «Ces réformes entreprises par les Pouvoirs publics, entrent dans le cadre d'un plan global qui porte sur la révision de notre système financier et bancaire avec pour objectif de soutenir la nouvelle vision économique de l'Etat», a déclaré Djerad. Cette vision, a-t-il poursuivi, devrait accompagner l'Algérie, tout au long des prochaines décennies. «Cela permettra de lever les défis et d'assurer les équilibres financiers du pays, tout en préservant l'aspect social dans les politiques publiques». Le Premier ministre a regretté le fait que les ressources financières de l'Etat soient toujours dépendantes de la fiscalité pétrolière, essentiellement, en ajoutant qu'une partie de cette ressource est mobilisée, ces dernières années, pour couvrir les dépenses liées au budget du fonctionnement au lieu qu'elle soit mobilisée pour le financement des investissements productifs qui contribuent au développement du pays. Le chef de l'Exécutif a prévenu qu'il s'agit-là d'une ressource financière basée sur des Energies non renouvelables et sur laquelle le pays ne peut s'appuyer éternellement», sans parler de l'instabilité de son prix qui reste dépendant des fluctuations du marché mondial et des facteurs externes que le pays ne peut maîtriser». «Cela conduirait, inévitablement, à une incapacité de garantir une durabilité des ressources financières pour répondre aux besoins de la croissance», a-t-il prévenu. Concernant les revenus de la fiscalité ordinaire, le Premier ministre a fait constater qu' «en dépit des efforts consentis tout au long de ces dernières années, sur le plan législatif, fonctionnel et structurel, les niveaux des revenus n'ont pas atteint les résultats escomptés», ce qui affecte l'équilibre budgétaire de l'Etat et entrave la réalisation des projets de développement», a-t-il encore regretté. De plus, considère M. Djerad, le système fiscal actuel est loin de répondre au principe de l'équité escompté du fait que la charge fiscale n'est pas imposée aux différents agents économiques selon leur capacité de contribution. Pour étayer ses propos, il a cité l'exemple édifiant de l'impôt sur le revenu qui concerne essentiellement les salariés tandis que les impôts en provenance des autres catégories demeurent «anormalement» faibles. Equité fiscale et la redistribution de la richesse nationale de façon équitable De son côté, le ministre des Finances, Aymen Benabderrahmane a estimé que la personnalisation du système fiscal doit permettre une répartition juste de la charge d'imposition, notamment, à travers la numérisation en cours de l'administration et l'intégration des activités économiques parallèles. «Ces assises doivent permettre de personnaliser le système fiscal et de trouver les outils et méthodes d'améliorer la fiscalité, en accord avec les objectifs fixés par les Autorités du pays et les exigences des citoyens», a-t-il souligné. Une amélioration qui doit porter, selon lui, sur la question de l'équité fiscale, la diversification juste de la charge fiscale et la redistribution de la richesse nationale de façon équitable. Dans ce cadre, il a rappelé que l'Administration fiscale a connu des réformes basées sur une approche globale et simplifiée, permettant des améliorations organisationnelles au niveau de l'ensemble des services de l'Administration fiscale. Ces réformes ont permis également de répartir les contribuables selon le volume de leurs activités et l'importance de leur contribution fiscale. «Le système fiscal a connu plusieurs avancées concernant la facilitation des procédures, la baisse des niveaux de l'impôt et l'amélioration de la communication avec les contribuables», a-t-il rappelé. Cependant, selon le ministre, des adaptations législatives sont nécessaires afin qu'elles soient en meilleure adéquation avec les exigences économiques et sociétales du pays. Par ailleurs, le ministre a rappelé les chiffres concernant les recettes de la fiscalité ordinaire et pétrolière qui ont augmenté entre 2010 et 2019 de 4.202 milliards de DA à 5.504 milliards de DA ce qui correspond à une croissance de 3,44%. Pour sa part, la fiscalité ordinaire a représenté 1.382 milliards de DA en 2010 et 2.986 milliards de DA, en 2019 soit une moyenne de croissance de 12,9%.