Le nouveau Pdg de l'Agence nationale d'édition et de publicité (Anep) n'en est pas à sa première sortie bruyante. Déjà, à sa désignation en tant que conseiller du ministre, il avait mis le doigt dans la plaie. Une stratégie de communication inévitable, sachant certainement bien que plus il attendait ou louvoyait, moins ses chances de sortir indemne allaient durer. Car, avec son expérience de journaliste et de gestionnaire dans deux quotidiens publics, il savait que la lutte pouvait être inégale dès que la garde était baissée. On se souvient qu'à «An Nasr», il avait réussi à s'en sortir, le quotidien (le vétéran de la presse) étant assez prisé dans tout l'Est algérien et n'avait pas beaucoup de gros concurrent. D'où, une base de lecteurs appréciable et pas mal de pages publicitaires. Ce ne fut qu'une heureuse parenthèse dans sa vie professionnelle car, on ne sait pour quelle(s) raison (s), il fut nommé à la direction d'«El Massa», un quotidien qui souffrait énormément tant au niveau du lectorat qu'au niveau du quantum publicitaire. Si mes souvenirs sont bons, même l'Anep le «boycottait». Il m'avait, lui-même, à l'époque, assuré qu'il (le journal) «tirait le diable par la queue» pour maintenir un semblant de vie. C'est dire que le marché publicitaire géré par «mémé Anep», était surveillé de très près, depuis exactement 1999, par des minist(è)res, tous proches du «pouvoir» et, surtout, de la «Famille». Une surveillance (faisant participer, assurait-on, de manière indirecte, certains services de sécurité qui, peut-être, pour certains de leurs représentants, en ont fait bien «trop»), souvent élargie, parfois retreinte selon les événements, les humeurs, les amitiés, les calculs, les ambitions et les «coups à monter». Bien sûr, durant les années 90, cela a aussi existé, mais en moins «institutionnalisé» et très circonstanciel. Il y avait une certaine liberté de «faire» tant au niveau des journaux qu'à celui des innombrables régies alors existantes, car le pouvoir de l'époque avait un autre «chat à fouetter». Le terrorisme et il n'y avait pas encore de concurrents «sérieux» comme les réseaux sociaux et les télés privées «off-shore». De plus, la manne n'était pas très considérable, la trésorerie du pays étant «à plat». Seuls moins d'une dizaine de titres, les publics et des privés «bien en cour», en avaient largement profité. 20 ans et un peu plus et peut-être même depuis la mise sous le boisseau de la loi relative à l'Information d'avril 90, tout particulièrement après la suppression, sous le gouvernement Ghozali, du Conseil supérieur de l'Information, ce qui avait créé un grand «trou noir» dans le tout jeune et tout nouveau paysage médiatique national, un trou qui n'a été que (très mal volontairement ?) comblé le 12 janvier 2012 et le 24 février 2014 (avec deux lois, l'une relative à l'information et l'autre relative à l'audiovisuel). Un trou qui a permis à tous les virus médiatiques de prospérer. D'autant que, jusqu'à présent, les textes réglementaires fondamentaux ou/et d'application tardent à venir, ce qui a permis aux «copains et aux coquins» de continuer à «faire leur beurre» et, pour certains, de faire beaucoup de mal à la trésorerie nationale, mais aussi et surtout aux travailleurs et à la crédibilité de la presse et, plus grave encore, aux lecteurs, auditeurs et téléspectateurs. A travers le diagnostic du Pdg de l'Anep, qui est aussi conseiller du ministre de la Communication, c'est, en fait, la présentation - réaliste bien qu'incomplète au niveau des bénéficiaires de la rente - d'un secteur objectivement sinistré où les «niches de la corruption», entre autres, sont nombreuses ; en attendant les diagnostics d'autres champs comme celui de l'affichage, de l'imprimerie, du sponsoring, de la presse publique (ce qui en reste !), de la diffusion, de l'audiovisuel public et «privé» Donc, dans son entretien accordé à deux quotidiens nationaux (qui, à vrai dire, ont connu avec le «système», durant les années 2000, bien des mésaventures, frisant même la mise des clés sous la porte ayant un peu plus de chance que «Le Matin» de Benchicou), le Pdg de l'Agence nationale d'édition et de publicité (Anep), Larbi Ounoughi, est revenu sur «la gestion catastrophique et scandaleuse» de l'agence durant les deux dernières décennies, tout en révélant une panoplie de chiffres «hallucinants». Les caisses de l'entreprise qui a eu à gérer «un portefeuille de plus de 15.000 milliards de centimes ces 20 dernières années», «sont vides», annonce le Pdg. Je me souviens avoir entendu qu'au début des années 2000, les dites caisses étaient pleines, si pleines que le Pdg de l'époque avait lancé des projets «pharaoniques», dont une imprimerie avec «Al Ahram» et une compagnie aérienne. Rien que ça ! Et d'expliquer que «le cumul de la mauvaise gestion a fait que l'argent de l'agence n'est pas dans ses caisses, il est à l'extérieur». Il a fourni des noms et des lieux (les titres) mais pas tous ! Les créances de l'Anep, selon Larbi Ounoughi, s'élèvent à plus de 4.300 milliards de centimes. Pire encore, il révélé que «près de 5.000 autres milliards sont définitivement perdus parce que ce sont des créances anciennes». Dire que lors de mon très, très court passage à la tête de l'Anep (moins d'une année au début des années 80) on était tout heureux de faire une recette qui permettait aux journaux en régie (c'était le monopole total en dehors de l'Entv et l'Enrs qui, déjà, volaient de leurs propres ailes) d'assurer régulièrement la paie des travailleurs. Le même «boss» indique qu'une réorganisation des activités est en cours. Ainsi, le plan de développement va concerner la création d'une Unité, basée à Sétif, qui produira le drapeau national. L'ANEP diversifiera, affirme-t-il, ses ressources, et se lancera également dans l'emballage, ainsi que dans la production cinématographique à travers la mise en place de trois studios spécialisés dans la production des clips artistiques, des spots publicitaires et des films documentaires. Larbi Ounoughi indique aussi que l'Anep créera une chaîne de télévision publicitaire qui fera la promotion de la destination Algérie. Rien que ça ! Mais cela - les organes et toutes les bonnes volontés ne créant jamais de bonnes fonctions - va-t-il permettre aux métiers de base du secteur publicitaire (au sens large du terme) de se développer sainement ? Peut-être ben que oui, peut-être ben que non ! Car il faut d'abord une loi et des règlements sur la publicité (sponsoring y compris), une libération des capacités, une libéralisation sincère et une régulation (sévère) des activités dans la transparence des comptes et dans une concurrence ouverte mais surveillée, afin d'éviter tout favoritisme et interventionnisme avec le respect des lois.