Le moudjahid Yacef Saadi, décédé vendredi à Alger à l'âge de 93 ans, est considéré comme l'un des architectes de la Bataille d'Alger, ayant combattu l'armée coloniale avec «une volonté de fer, courage et abnégation» jusqu'au recouvrement de l'indépendance. Issu d'une famille originaire d'Azzefoun (Tizi-Ouzou), Yacef Saadi (né le 20 janvier 1928 à la Casbah d'Alger) a grandi dans ce quartier où il obtient un certificat d'étude primaire. Mais son parcours scolaire se heurte aux soldats de l'alliance américaine et britannique, qui s'installent dans son école pendant la Seconde guerre mondiale. Après la réquisition de son école, il arrête ses études à l'âge de 14 ans pour travailler dans la boulangerie familiale avec son père, qui était un point de contact important entre les militants du Parti populaire algérien (PPA), qu'il rejoint à un très jeune âge. Yacef Saadi a, ainsi, participé aux manifestations organisées début mai 1945, ayant précédé les manifestations historiques du 8 mai 1945. Il rejoint, de 1947 à 1949, l'Organisation spéciale (OS), l'aile paramilitaire du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD) où il était considéré comme l'un de ses combattants les plus en vue de la région d'Alger. Suite au démantèlement de l'OS, il immigre pour la France, où il réside jusqu'en 1952, puis retourne en Algérie. Il reprend son activité militante en liant des contacts avec les cellules des militants de la Casbah, en vue de la lutte armée. En 1954, date du déclenchement de la Révolution algérienne, Yacef Saadi, accompagné des dirigeants du Front de libération nationale (FLN), tels que Rabah Bitat et Souidani Boudjemaa, a été chargé de constituer un groupe de commando prêt à entrer en action. Il a abrité dans sa maison de la Casbah des révolutionnaires et militants, ainsi que des dirigeants de la Révolution à l'image de Krim Belkacem et Abane Ramdane. Yacef Saddi est envoyé, en 1955, en Suisse pour prendre contact avec la délégation «extérieure». Après son retour, il est arrêté, puis emprisonné en Algérie pendant quatre mois, pour être libéré par la suite. Après la division de la capitale en trois zones, Yacef Saadi a été désigné responsable de l'aile militaire de la zone militaire autonome, qui comprenait les quartiers de Château Neuf, El-Biar, la Casbah, le quartier européen et l'Est du Champ de Manœuvre (Place du 1 Mai). Les groupes formés par Yacef Saadi ont connu un grand succès tant au niveau d'Alger qu'à l'échelle nationale du fait de sa connaissance de la région et de la maîtrise de l'action militante et révolutionnaire. Suite aux succès de Yacef Saadi sur le terrain, les dirigeants de la Révolution ont décidé de focaliser la lutte au centre d'Alger, où se trouvent la presse internationale et les autorités coloniales officielles, à travers l'intensification des opérations de Fidayia, appelées la «Bataille d'Alger». Le moudjahid Yacef Saadi a été, ainsi, nommé commandant de la Zone autonome d'Alger en 1957. Il a contribué en compagnie de Hassiba ben Bouali, Ali Lapointe et autres feddayin à l'intensification de l'action de «guérilla» dans la capitale en plaçant des bombes explosives dans les centres de rassemblement de l'armée française, au niveau des commissariats et bars. Yacef Saadi a poursuivi sa mission de cibler notamment les sièges du commandement de l'armée coloniale française, continuant ainsi sa lutte armée jusqu'à son arrestation par la Division des parachutistes le 23 septembre 1957, subissant les pires sévices et tortures. Condamné à mort, la peine n'a pas été exécutée. Yacef Saadi a été libéré après le cessez-le-feu. Après l'indépendance, il a été président de l'Entreprise des films la Casbah qui a produit le célèbre film historique «La Bataille d'Alger», qui a remporté le Lion d'Or à Venise et dans lequel il a participé en tant qu'acteur, jouant son propre rôle. Ecrivain, il a produit un ouvrage sur son parcours militant lors de la «Bataille d'Alger» en 1982. En 2001, il a été nommé membre du Conseil de la Nation, au sein du tiers présidentiel. Le moudjahid Yacef Saadi a été inhumé au cimetière d'El kettar, à Alger, hier après la prière d'El Asr.