Cherif Yagoub, 71 ans, un mostaganémois, ancien partisan de l'Algérie française, avait 17 ans, le 27 janvier1960, lorsqu'il a manifesté devant la mairie de Mostaganem pour l'Algérie française. Blessé par balles, 54 ans après, il obtient le droit à la pension, après un parcours de combattant qui a duré une cinquantaine d'années devant les tribunaux français ! Avec son avocate Me Cambla, Cherif Yagoub, 71 ans, montre sa blessure (photo) où se trouvent toujours deux balles reçues en 1960 à Mostaganem. Blessé lors d'une manifestation à Mostaganem en 1960, Cherif Yagoub vient d'obtenir un droit à la pension devant la cour d'appel. Une première pour une victime civile des «événements» en Algérie qui préfigure, peut-être, une évolution importante de la jurisprudence.«J'ai écrit à tout le monde. Le général de Gaulle, M. Pompidou, M. Mitterrand, M. Chirac... Tous les présidents. M. Hollande m'a répondu qu'il ne pouvait pas se prononcer, qu'il respectait l'indépendance de la justice. Alors j'ai saisi la justice. Je n'allais pas renoncer.»Cherif Yagoub, 71 ans, moustache blanchie par les années, avait 17 ans le 27 janvier 1960. «Nous manifestions devant la mairie de Mostaganem pour l'Algérie française, se souvient-il. Ça a tiré. Qui ? Je ne sais pas. Il y a eu des morts. J'ai été touché à la jambe. Au moins deux balles. Elles sont toujours là», dit-il en relevant son pantalon. Arrivé en France au lendemain de l'indépendance de l'Algérie, Cherif Yagoub victime civile des «événements» a toujours voulu obtenir une pension pour ses blessures. «Mais selon la loi, seules les personnes de nationalité française en 1963 ont droit à une pension», souligne Me Jennifer Cambla. L'avocate toulousaine, désignée par le barreau de Toulouse pour assumer la défense de la victime via l'aide juridictionnelle, a plaidé devant la chambre des pensions militaires que cette spécificité était discriminatoire. La première instance lui a donné tort. Devant la cour, elle a alors déposé une QPC, une question prioritaire de constitutionnalité. «Retoquée», prévient le conseil. En revanche, la cour a été sensible à son argument. «Elle vient de juger que la question de la nationalité était discriminatoire. Donc Monsieur Yagoub a droit à une pension.». «L'Etat risque de se pourvoir en cassation», tempère Me Cambla(lire l'encadré). En terme financier, cette évolution de la jurisprudence, si elle est confirmée, pourrait en effet avoir des conséquences importantes pour le ministère de la Défense et l'Etat. En effet toutes les victimes civiles d'attentats commis pendant la guerre d'Algérie entre 1954 et 1962 pourraient réclamer une indemnisation.La décision de la cour d'appel de Toulouse peut encore faire l'objet d'un pourvoi en cassation. Le ministère de la Défense a jusqu'à vendredi 19 décembre pour se pourvoir en cassation.