Le président américain fait l'objet de deux enquêtes conjointes, menées par le procureur spécial sur l'affaire russe et par une commission parlementaire. Si les faits sont confirmés, une procédure de destitution deviendra de plus en plus probable. Les semaines passent et se ressemblent pour Donald Trump. Ce jeudi, le Washington Post a révélé que le président américain est désormais directement inquiété par l'enquête du procureur spécial sur les liens entre son administration et des officiels russes. Les soupçons de Robert Mueller, nommé pour conduire les investigations, se portent sur une possible obstruction à la justice de la part du président-milliardaire. Jusqu'à ces dernières semaines, celui-ci était relativement épargné par les différents volets de cette enquête, concentrée sur ses proches. Il pouvait également botter en touche face aux accusations de divulgation d'informations classifiées auprès du ministre russe des Affaires étrangères et de son ambassadeur aux Etats-Unis, lors d'une visite en mai, au motif que le président des Etats-Unis détient le pouvoir déclassifier des informations sensibles. Désormais, le danger est immédiat pour Donald Trump et peut venir à la fois de la commission d'enquête parlementaire et des investigations du procureur spécial. L'obstruction à la justice peut le conduire tout droit vers une procédure de destitution (ou «impeachment»).
Un délit passible de cinq ans de prison... Le code pénal américain décrit les faits de cette manière : «quiconque tente, par corruption, par des menaces ou par volonté d'influencer, de faire obstruction (...) à la bonne application de la loi en vertu de laquelle toute procédure peut être conduite par un ministère ou une agence des Etats-Unis». La peine maximale prévue est de cinq ans d'emprisonnement. ... et pouvant justifier un «impeachment» L'article 2 de la Constitution américaine stipule que «le président, le vice-président ou tout autre responsable des Etats-Unis, peuvent être destitués pour des faits avérés de trahison, corruption, ou tout autre haut crime ou faute.» Cette dernière partie est volontairement vague, laissant aux parlementaires le soin d'apprécier la gravité des faits reprochés au président. L'obstruction à la justice entre dans cette catégorie de «haut crime ou faute» et a déjà été utilisée contre un président en exercice. En 1998, il avait été retenu – avec le délit de parjure - dans l'acte d'accusation contre Bill Clinton, finalement acquitté dans l'affaire Monica Lewinsky. Avant lui, Richard Nixon avait également été sous le coup d'une accusation d'obstruction, mais avait démissionné avant le lancement de la procédure d'«impeachment».
Des éléments à charge contre Trump Le vrai danger pour Donald Trump tient dans les éléments déjà en la possession du procureur spécial et de la commission d'enquête. L'audition publique de l'ex-patron du FBI James Comey, congédié par Trump en mai, devant les élus la semaine dernière, leur a déjà donné du grain à moudre. S'il a déclaré que le président ne lui avait pas formellement demandé l'arrêt d'une enquête sur l'ex-conseiller à la sécurité nationale, Michael Flynn, il a souligné des conversations «dérangeantes», au cours desquelles il a eu «l'impression» que Trump tentait de faire pression sur lui. Robert Mueller, lui, s'intéresse particulièrement à un témoignage, celui de Daniel Coats :ce patron du Renseignement américain a affirmé que Donald Trump lui a demandé d'intercéder auprès de James Comey pour que celui-ci arrête l'enquête. Il doit être entendu par le procureur spécial, tout comme le directeur de la NSA (National Security Agency) et son adjoint.
L'attitude des élus républicains scrutée de près Si les conclusions de Robert Mueller ou de la commission d'enquête parlementaire démontrent une volonté d'obstruction de la part de Trump, les députés américains auront toutes les cartes en main pour lancer une procédure de destitution. Reste à savoir s'ils sont prêts à franchir le pas et tout dépendra de l'attitude des élus républicains, dont la loyauté envers le président est particulièrement instable. Si les députés de son camp décident de le lâcher, l'«impeachment» pourrait être voté par la Chambre des Représentant, au cours d'un scrutin à la majorité simple. Il faudrait ensuite attendre le procès mené par les sénateurs et le vote à la majorité des deux tiers. Là encore, les Républicains disposent d'une majorité de sièges et il faudrait un revirement très important pour obtenir la destitution de Donald Trump. Une procédure de destitution de Donald Trump préparée au Congrès Sur fond d'une vague de critiques à l'encontre du dirigeant américain Donald Trump, le député démocrate du Texas Al Green a déclaré qu'il souhaitait voir destituer le Président des Etats-Unis. La proposition serait soutenue par 48% des électeurs américains, selon un sondage réalisé le 16 mai. "J'appelle le Président de la Chambre des représentants à annoncer une procédure de destitution du Président des Etats-Unis pour obstruction à la justice", a déclaré Al Green.