A la fin de 2010, il existe encore une catégorie d'Algérie, les laissés pour compte, marginalisés en raison de leur situation sociale plus que défavorable. Ces mêmes citoyens vivent à ce jour sous des tentes parce qu'aucun projet de logement ou de construction, fut-il de type socio rural, ne les a concerné. Eté comme hiver ils sont à la merci du temps qu'il fait. C'est dur de survivre toute une vie, sous une tente et continuer à quarante ans de rêver encore d'un logement qui répond à ce nom » déclare monsieur Bendlala, âgé de 41 ans, surpris par notre équipe « Réflexion » entrain de raccommoder la bâche de sa tente, que les violents vents d'hiver ont, encore détruit et déchiré de bout en bout. Boubakeur vient de la plaine d'EL Macta, où son défunt père vivait sous une tente depuis les années 70, en gardant un troupeau de mouton à travers les pâturages de cette vaste plaine. Il a grandi au sein de la « Merdja », en qualité de berger comme son père, il faisait paître les bêtes d'un endroit à l'autre, il a survécu comme les autres bergers, les terribles crues de la rivière d'autrefois, qui les poussaient sans cesse à déménager, en attendant le dessèchement des sols de la plaine. Au cours de la décennie noire, ils étaient obligés, par mesure de sécurité, de quitter le lieu et se rapprocher des douars de la commune de Fornaka, où ils ont dressé leurs tentes de fortune, en attendant le logement promis. Après le décès du père, la famille se dispersa après un tumultueux partage du maigre héritage légué par le vieux, le troupeau fut récupéré par son propriétaire et la part du père, distribué entre les héritiers. Boubakeur émigra à l'Est de la commune, plus particulièrement, vers la zone industrielle de Fornaka, où il dressa son abri de fortune et dénicha un emploi en qualité de gardien de jour et de nuit, dans une entreprise privée. A présent, il vit avec sa femme et ses deux enfants, sous ce toit qu'il a aménagé avec de la bâche, du plastique et quelques troncs d'arbres. Il s'éclaire à la bougie, s'alimente en eau qu'il ramène de si loin, d'une conduite d'eau qui transite par la commune et approvisionne la zone industrielle d'Arzew. Sa femme l'aide, pour juste subvenir aux besoins alimentaires, par l'élevage de quelques poules, par la vente d'œufs et de volailles. Son salaire de 10.000 dinars ne lui suffit plus à survivre en face du pouvoir d'achat qui se dégrade vertigineusement au fil des jours, ce manque de ressources l'oblige à collecter des déchets de plastique et de métaux qu'il récupère à travers les unités de la zone. Cette activité lui permet de toucher quelques sous supplémentaires, qu'il consacre aux frais d'habillement de sa famille et à l'achat de médicaments pour l'un de ses deux enfants. Sa demande de logement remonte presque à une éternité et n'a rien vu venir, il est titulaire d'un reçu de dépôt de dossier pour l'acquisition d'un logement social, sous le numéro 695 en date du 13 Janvier de l'année en cours, malheureusement, à ce jour, aucune commission d'enquête n'est venue s'enquérir de sa situation sociale. Il vit dans l'espoir de voir un jour, les membres de la brigade d'enquête de la daïra, se pointer chez lui dans le cadre des missions qui leur sont conférées en matière d'attribution de logements. Boubakeur demeure un citoyen algérien postulant à un logement dont il ouvre droit au même titre que tous les autres, Mais le sort semble se déchainer contre lui. Tout le marasme et le calvaire vécus au quotidien, n'ont pas eu raison de lui, il se bat continuellement, par la force de son caractère et de sa détermination à vouloir à tout prix sortir un jour de cette situation lamentable. Mais faudrait-il encore que les autorités daingnent un tant soit peu l'aider à sortir de cette ornière.