CLXXXV?me nuit Quand le prince Amgiad eut achev?: ?Si votre fr?re, r?pondit le tailleur, est tomb? entre les mains de quelque mage, vous pouvez faire ?tat de ne le revoir jamais. Il est perdu sans ressource; et je vous conseille de vous en consoler et de songer ? vous pr?server vous-m?me d?une semblable disgr?ce. Pour cela, si vous voulez me croire, vous demeurerez avec moi et je vous instruirai de toutes les ruses de ces mages, afin que vous vous gardiez d?eux quand vous sortirez?. Amgiad, bien afflig? d?avoir perdu son fr?re Assad, accepta l?offre et remercia le tailleur mille fois de la bont? qu?il avait pour lui. Le prince Amgiad ne sortit pour aller par la ville, pendant un mois entier, qu?en la compagnie du tailleur; il se hasarda enfin ? aller seul au bain. Au retour, comme il passait par une rue o? il n?y avait personne, il rencontra une dame qui venait ? lui. La dame, qui vit un jeune homme tr?s bien fait et tout frais sorti du bain, leva son voile et lui demanda o? il allait, d?un air riant et en lui faisant les yeux doux. Amgiad ne put r?sister aux charmes qu?elle lui fit para?tre. ?Madame, r?pondit-il, je vais chez moi ou chez vous, cela est ? votre choix. -Seigneur, r?pondit la dame avec un sourire agr?able, les dames de ma sorte ne m?nent pas les hommes chez elles; elles vont chez eux?. Amgiad fut dans un grand embarras de cette r?ponse, ? laquelle il ne s?attendait pas. Il n?osait prendre la hardiesse de la mener chez son h?te, qui s?en serait scandalis?, et aurait couru risque de perdre la protection dont il avait besoin dans une ville o? il avait tant de pr?cautions ? prendre. Le peu d?habitude qu?il y avait faisait aussi qu?il ne savait aucun endroit o? la conduire, et il ne pouvait se r?soudre ? laisser ?chapper une si belle fortune. Dans cette incertitude, il r?solut de s?abandonner au hasard; et, sans r?pondre ? la dame, il marcha devant elle et la dame le suivit. Le prince Amgiad la mena longtemps de rue en rue, de carrefour en carrefour, de place en place; et ils ?taient fatigu?s de marcher l?un et l?autre, lorsqu?il enfila une rue qui se trouva termin?e par une grande porte ferm?e d?une maison d?assez belle apparence, avec deux bancs, l?un d?un c?t?, l?autre de l?autre. Amgiad s?assit sur l?un, comme pour reprendre haleine; et la dame, plus fatigu?e que lui, s?assit sur l?autre. Quand la dame fut assise: ?C?est donc ici votre maison? dit-elle au prince Amgiad. -Vous le voyez, madame, reprit le prince. -Pourquoi donc n?ouvrez-vous pas? repartit-elle; qu?attendez-vous? -Ma belle, r?pliqua Amgiad, c?est que je n?ai pas la clef; je l?ai laiss?e ? mon esclave, que j?ai charg? d?une commission d?o? il ne peut pas ?tre encore revenu. Et comme je lui ai command?, apr?s qu?il aurait fait cette commission, de m?acheter de quoi faire un bon d?ner, je crains que nous l?attendions encore longtemps?.