CLXXXXIVe nuit Les princes ne r?pondirent autre chose, sinon qu?ils apporteraient la r?ponse dans peu de temps, et ils revinrent, ? toute bride, annoncer ? Camaralzaman que la derni?re arm?e qui venait d?arriver ?tait celle du roi Schahzaman et que le roi son p?re y ?tait en personne. L??tonnement, la surprise, la joie, la douleur d?avoir abandonn? le roi son p?re, sans prendre cong? de lui, firent un si puissant effet sur l?esprit du roi Camaralzaman, qu?il tomba ?vanoui d?s qu?il eut appris qu?il ?tait si pr?s de lui; il revint, ? la fin, par l?empressement des princes Amgiad et Assad ? le soulager; et lorsqu?il se sentit assez de forces, il alla se jeter aux pieds du roi Schahzaman. De longtemps il ne s??tait vu une entrevue si tendre entre un p?re et un fils. Schahzaman se plaignit obligeamment au roi Camaralzaman de l?insensibilit? qu?il avait eue en s??loignant de lui d?une mani?re si cruelle. Camaralzaman lui t?moigna un v?ritable regret de la faute que l?amour lui avait fait commettre. Les trois rois et la reine Margiane demeur?rent trois jours ? la cour du roi des Mages, qui les r?gala magnifiquement. Ces trois jours furent aussi tr?s remarquables par le mariage du prince Assad avec la reine Margiane et du prince Amgiad avec Bostane, en consid?ration du service qu?elle avait rendu au prince Assad. Les trois rois enfin et la reine Margiane, avec Assad, son ?poux, se retir?rent chacun dans son royaume. Pour ce qui est d?Amgiad, le roi des Mages, qui l?avait pris en affection et qui ?tait d?j? fort ?g?, lui mit la couronne sur la t?te. Amgiad mit toute son application ? d?truire le culte du feu et ? ?tablir la religion musulmane dans ses ?tats. La ville de Balsora fut longtemps la capitale d?un royaume tributaire des califes. Le roi qui le gouvernait du temps du calife Haroun-al-Raschid s?appelait Zinebi; et l?un et l?autre ?taient cousins, fils de deux fr?res. Zinebi n?avait pas jug? ? propos de confier l?administration de ses ?tats ? un seul vizir, il en avait choisi deux: Khacan et Saouy. Khacan ?tait doux, pr?venant, lib?ral, et se faisait un plaisir d?obliger ceux qui avaient affaire ? lui, en tout ce qui d?pendait de son pouvoir, sans porter pr?judice ? la justice qu?il ?tait oblig? de rendre. Il n?y avait aussi personne ? la cour de Balsora, ni dans la ville, ni dans tout le royaume, qui ne le respect?t et ne publi?t les louanges qu?il m?ritait. Saouy ?tait d?un tout autre caract?re: il ?tait toujours chagrin et il rebutait ?galement tout le monde, sans distinction de rang ou de qualit?. Avec cela, bien loin de se faire un m?rite des grandes richesses qu?il poss?dait, il ?tait d?une avarice achev?e, jusqu?? se refuser ? lui-m?me les choses n?cessaires. Personne ne pouvait le souffrir, et jamais on n?avait entendu dire de lui que du mal. Ce qui le rendait plus ha?ssable, c??tait la grande aversion qu?il avait pour Khacan, et qu?en interpr?tant en mal tout le bien que faisait ce digne ministre, il ne cessait de lui rendre de mauvais offices aupr?s du roi.