Il y a, comme ça, des syndicalistes qui méritent leurs noms. Leur activisme provoque des cauchemars chez les patrons. C'est le cas Smain Kouadria, un syndicaliste qui tient tête aux Indiens d'ArcelorMittal (ex-El Hadjar d'Annaba), l'un des plus importants complexes de sidérurgie en Algérie). Par son engagement, il fait trembler des responsables et en arrive même à faire bouger la justice sans même la saisir au sujet des malversations qui minent le géant de l'acier. A 52 ans, Smaïn Kouadria est devenu le plus célèbre, le plus influent de tous les responsables de l'UGTA. Il aurait annulé sa demande de démission. Avec les travailleurs, il a décidé de paralyser cette usine suite au refus de la direction de procéder à une hausse des salaires jugée légitime. Ils étaient de 6.000 à la suivre dans l'exercice d'un droit syndical reconnu: la grève. Dans ce bras de fer, il se fait une réputation qui va jusqu'à faire de l'ombre à Sidi Said, l'inamovible patron de l'UGTA. Comment en est-il arrivé là? Il y a une année, il assurait l'intérim du secrétariat du syndicat. Aujourd'hui, il marque l'histoire en se distinguant comme un meneur intransigeant. Alors que la Centrale syndicale brillait par son absence par rapport aux questions de l'heure, Smaïn Koudria se fait porte parole des revendications des salariés d'ArceorMittal. Avec ses collègues il était prêt à faire face aux tribunaux. Bardé de diplômes dont certains obtenus à l'étranger, Kouadria fait l'essentiel de sa carrière au complexe sidérurgique d'El Hadjar. Recruté en 1981 en qualité de cadre, il intègre le syndicat de l'entreprise, sept ans plus tard. Il sera élu secrétaire général du syndicat d'ArcelorMittal en 2009 à l'issue des élections de renouvellement des instances de l'organisation. Son prédécesseur à ce poste est un vieux briscard d'El Hadjar, Aissa Menadi, patron du club de football local, l'USM Annaba, député du RND, accusé de rouler davantage pour ses intérêts, pour ceux de la direction d'ArcelorMittal que pour ceux des travailleurs. Kouadria l'avait qualifié d'«empereur d'El Hadjar». Smaïn Kouadria rappelle à bien des égards une autre grande figure du syndicalisme algérien, Abdelhak Benhamouda, patron de l'UGTA, assassiné en janvier 1997, à deux pas de son bureau du 1er du Mai à Alger. Si certaines firmes étrangères activant dans le pays prennent des libertés avec les droits de leurs employés algériens, ce n'est plus le cas pour ArcelorMittal. La force et la puissance du syndicat dirigé par Smain impose le respect. «El Hadjar est la citadelle du mouvement syndicaliste algérien», disait Smaïn Kouadria, l'homme qui donne des cauchemars aux Indiens d'ArcelorMittal.