Les quartiers Daya, communément appelé Petit Lac et El Hamri ont été les plus touchés par la colère citoyenne enregistrées la semaine dernière. Ces deux quartiers ont connu une contestation sévère qui devait se traduire par un échange d'hostilité entre les manifestants et les forces de sécurité. Mais sur les lieux, les citoyens tiennent à assurer que leur révolte n'est pas l'expression d'un ras-le-bol devant seulement l'augmentation des prix du sucre et de l'huile mais que cela n'a été en fait que la goutte qui a fait déborder le vase… H. El Djilali (père de trois enfants, chômeur) "Je travaillais dans une entreprise publique qui a déclaré faillite et je me suis donc retrouvé au chômage, ce qui a énormément compliqué ma situation. J'étais obligé d'opter pour des petits boulots pour nourrir ma famille. Je vis ainsi au jour le jour. Mais ce qui me tourmente le plus, c'est le sort de mes enfants, surtout avec la cherté de la vie et je ne suis qu'un exemple parmi des centaines de citoyens et pères de familles, souffrant de la même situation. L. Mohamed (commerçant) «L'absence des élus sur le terrain, en ne prenant pas en compte nos problèmes et encore moins nos souffrances, n'a fait qu'empirer la situation et aggraver la colère des jeunes. Ces derniers auraient dû se révolter contre l'injustice qui règne et les grands problèmes dont ils souffrent et non pas à cause des prix de l'huile et du sucre. Même les associations, censées transmettre les préoccupations du peuple aux autorités responsables, n'ont d'yeux que pour leurs intérêts, et ce, au dépens de ceux des citoyens. Nous sommes contre la violence car elle n'apporte aucun résultat, bien au contraire, tout ce qui a été bâti en 10 ans, a été détruit en quelques minutes.» O. Rachid (fonctionnaire) «Nos jeunes sont déçus et complètement démoralisés, face à une souffrance quotidienne, des difficultés à trouver un emploi ou un logement, et bien d'autres. Toutes les portes leur ont été fermées, alors que notre pays est riche et regorge de ressources qui sont exploitées par des étrangers. C'est ce qui a donc favorisé le phénomène de la harga et de la fuite des cerveaux, n'empêche que nous sommes contre la destruction des biens publics, car ils appartiennent au peuple.» M. Zakaria (lycéen) Les jeunes n'ont pas trouvé d'autres moyens pour exprimer leur souffrance quotidienne, devant le chômage ou la crise du logement, et surtout la bureaucratie qui règne dans les différentes entreprises publiques, que de sortir dans la rue pour revendiquer leurs droits, et ce, après avoir perdu l'espoir de voir leurs revendications satisfaites, suite notamment aux promesses mensongères des responsables. Moi personnellement, je suis encore étudiant et j'ignore tout de ce qui m'attend à l'avenir, surtout en voyant tous ces jeunes diplômés au chômage. Certains d'entre eux sont devenus des revendeurs de cigarettes alors que d'autres ont choisi de risquer leurs vies, en tentant la harga vers l'Europe.» M. Reddioui (Chef du bureau d'Oran de la Fondation algérien ne de la protection des droits de l'enfant et de l'adolescent) «Nous ouvrons droit le feu sur les associations activant à Oran et n'ayant pas donné signe de vie, lors de cette crise. Au lieu de tenter de calmer les esprits, elles sont là à courir derrière l'obtention de budgets. Nous appelons donc le gouvernement à prendre en considération les revendications des citoyens. Nous réfutons tous ces actes de destruction et demandons aux jeunes de se calmer et de bien réfléchir aux conséquences de ces émeutes.» Un marchand ambulant «Je vends des serviettes et ça ne me rapporte pas grand bénéfice. 200 Da à 300 Da, tout au plus, mais je ne me plains pas et je n'oserais jamais avoir recours à la violence ou à la destruction des biens publics, ce n'est guère la solution pour résoudre les problèmes. Les conditions dans lesquelles je vis sont difficiles, notamment après la mort de mon père où je me suis retrouvé responsable de toute une famille. Je pense que les choses pourraient se régler, dans l'entente et les négociations et j'espère que le gouvernement prendra en considération nos soucis et tentera ainsi de calmer les esprits.» Gh. Mohamed (chômeur) «A chaque fois que je me présente pour un emploi, je me retrouve en face d'une bureaucratie implacable et il nous est même interdit de poser des étals pour vendre des petits articles qui nous rapporteront quelques centimes. Ceci me pousse à penser à la harga, ainsi que des dizaines de jeunes, ayant penché vers la délinquance, et ce, après avoir perdu l'espoir, devant les conditions de vie difficiles. Ce n'est pas la flambée des prix qui a fait bouger les jeunes, mais plutôt la mal vie.» H. Menaouer (45 ans) «Je ne me plains pas de la flambée des prix de l'huile et du sucre. Je souffre plutôt de la crise de logement, ma famille et moi, depuis de nombreuses années. Nous avons été marginalisés par les parties responsables qui ont même refusé de venir inspecter nos logements qui risquent de s'effondrer à tout moment et nous avons alors opté pour l'installation de tentes, de peur de périr sous les décombres. J'étais même obligé de mettre ma fille, encore nourrisson, dans une armoire, de peur que le plafond ne s'écroule sur elle.» Dj. Badra (mère de 10 enfants) «Nous sommes contre tous ces actes ayant mené à la destruction de biens publics, et ce, bien que nous comprenions les problèmes ayant poussé les jeunes à se révolter. Nous ne souffrons pas uniquement de la cherté de la vie, mais aussi d'une grande crise de logement. Comment se fait-il qu'un jeune de 20 ans puisse encore, à cet âge, partager une pièce avec ses frères et ses parents?».