L'émissaire international Kofi Annan doit évaluer mardi devant le Conseil de sécurité de l'ONU l'application en Syrie de son plan de sortie de crise, au lendemain de législatives tenues sur fond de violences, boycottées par l'opposition et dénoncées par la communauté internationale. Kofi Annan doit rendre compte une nouvelle fois de sa médiation devant le Conseil de sécurité de l'ONU par vidéoconférence depuis Genève. Peu après l'exposé de M. Annan, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a indiqué que le monde était désormais "engagé dans une course contre la montre pour éviter une véritable guerre civile" en Syrie. M. Ban a également dénoncé ces élections législatives sur fond de "violence" continue, selon son porte-parole Martin Nesirky. "Seul un dialogue large et sans exclusive peut mener à un véritable avenir démocratique en Syrie", a affirmé le porte-parole, estimant que "ces élections ne se tiennent pas dans ce cadre". "Il est essentiel qu'il y ait un arrêt de la violence (...) et que des mesures soient prises pour appliquer le plan" de M. Annan, a-t-il ajouté. Mardi, trois civils ont été tués dans un assaut des troupes sur le village de Tamanaa, dans la province d'Idleb (nord-ouest) et à Homs (centre), a d'ailleurs rapporté l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). En outre, les forces gouvernementales ont mené des perquisitions et arrêté plusieurs jeunes hommes à Douma, près de Damas, selon l'OSDH. Lundi, jour de scrutin en Syrie, l'OSDH a dénombré 25 morts dans des violences à travers le pays : 17 civils, trois déserteurs et cinq soldats. "Organiser des élections législatives dans ce genre d'atmosphère frise le ridicule", a commenté lundi le porte-parole du département d'Etat américain Mark Toner. "Ce n'est pas vraiment possible d'organiser des élections alors que les citoyens se voient privés des droits de l'Homme basiques et que le gouvernement continue d'agresser quotidiennement son propre peuple", a ajouté le porte-parole. L'opposition syrienne, qui réclame avant toute chose le départ du président Bachar al-Assad, a dénoncé des tentatives du régime d'acquérir une légitimité à travers ce scrutin qualifié d'"absurde". "Celui qui baigne la Syrie dans le sang, pousse à l'exode deux millions de Syriens et tire sur le peuple syrien ne possède aucune légitimité pour rédiger une Constitution, promulguer une loi électorale ou convoquer des élections", a affirmé le Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l'opposition. La presse syrienne, officielle ou proche du régime, s'est de son côté félicitée de ces élections, dont le taux de participation atteint, selon le quotidien Al-Watan, environ 60% "malgré les menaces et les opérations terroristes". "Les Syriens ont participé par millions aux premières élections législatives depuis la refonte de la Constitution" qui autorise le multipartisme, affirme le quotidien, après près d'un demi-siècle de règne sans partage du parti Baas. Selon l'agence officielle Sana, un nouveau scrutin va avoir lieu mardi dans deux bureaux de vote à Damas à la suite de fraudes. Les résultas des législatives seront annoncés lorsque la commission électorale aura reçu les résultats de tous les gouvernorats, ajoute Sana. A travers le pays, 7.195 candidats étaient en lice pour 250 sièges de députés, alors que le Parlement ne siège pas depuis un an en raison du soulèvement. Sept des neuf partis créés récemment ont présenté des candidats grâce à la nouvelle Constitution adoptée par référendum en février, qui a supprimé l'article accordant au parti Baas le rôle dirigeant dans la société. La répression et les combats en Syrie ont fait en près de 14 mois plus de 11.100 morts, en majorité des civils, selon l'OSDH et poussé à l'exil plus de 65.000 Syriens selon l'ONU, sans compter les dizaines de milliers de détenus. Selon l'ONU, plus de 9.000 personnes ont été tuées en Syrie depuis le début de la crise en mars 2011.