Merzak Allouache a animé jeudi à Béjaia un ciné café dans lequel il est revenu sur son parcours cinématographique et ses choix artistiques récents après la projection, la veille, de son film "Normal" programmé aux Rencontres cinématographiques de Béjaia. En compagnie des principaux acteurs du film (Adila Bendimerad, Nabil Asli et Ahmed Benaïssa), le cinéaste a répondu aux questions du public, venu en grand nombre au théâtre régional de Béjaia, et évoqué par la même occasion ses orientations artistiques liées à l'expérimentation et au "rapport à la censure". Merzak Allouache considère "Harraga", un film sorti en 2010, comme un "échec" : "Je suis arrivé à saturation après ce film, lourd du point de vue de la fabrication, et je voulais sortir de la démarche +bureaucratique+ d'organiser un tournage", répond Merzak Allouache à une question sur la forte improvisation et la mise en abîme dans "Normal". Réalisé en 2011, "Normal" relate l'histoire d'un jeune réalisateur qui décide de reprendre un film inachevé en le montrant à ses acteurs dans un contexte marqué par les manifestations à Alger en février de la même année. La projection a tourné au débat politique sur ces évènements... " +Normal+ est un film épidermique", dit le cinéaste en expliquant les différentes étapes du tournage et les changements dans l'écriture du scénario Un premier tournage du film a commencé en 2009, lors du deuxième festival panafricain (Panaf), avant que le réalisateur ne revienne deux ans après en changeant l'idée de départ. "Je voulais d'abord faire un film pour critiquer ce festival (Panaf), mais au fur et à mesure ce dernier s'est mué en simple décors au film", justifie Allouache. A une question sur la dimension politique dans ce film, illustrée par les "débats qui tournent en rond", entre les acteurs, sur la nécessité de manifester ou de poursuivre le tournage, le cinéaste avoue avoir surtout voulu montrer "le profond désarroi et l'absurdité" qu'il a constatés lors des marches de février 2011 à Alger. Le débat entre Allouache et son public s'est également intéressé au le parcours du réalisateur depuis "Omar Guatlatou", son premier film réalisé en 1976. De sa carrière de cinéaste, Merzak Allouache en compagnie de Ahmed Benaïssa (comédien) a évoqué plusieurs anecdotes de tournage, comme celles liée à "Bab el Oued City", tourné en 1994 en plein tourmente terroriste et montée de la violence islamiste et qui avaient contraint l'équipe à tourner une partie du film à Béjaia. Le réalisateur a conclu le ciné café en lançant un appel à la jeune génération de cinéaste à "faire preuve de plus de liberté" et à "surtout éviter l'autocensure". Ouvertes dimanche, les rencontres cinématographiques de Béjaia se poursuivent jusqu'au 15 juin avec notamment la projection jeudi en soirée du dernier film de Merzak Allouache "Le Repenti" primé à Cannes cette année.